La fermeture de la mosquée de Lagny-sur-Marne devant le Conseil d'Etat
L'arrêté préfectoral actant la fermeture de la mosquée, pris le 1er décembre dans le cadre de l'état d'urgence décrété dans la foulée des attentats de novembre, arrive à expiration ce jeudi 25 à minuit. Il est contesté par six requérants, ex-dirigeants du lieu de culte de Seine-et-Marne et simples fidèles.
Devant la plus haute juridiction administrative, la représentante du ministère de l'Intérieur, inflexible, a prévenu: "tant que nous n'aurons pas de garanties qu'il n'y a pas de risques qu'un nouveau foyer (de radicalisation, NDLR) se constitue, ça ne rouvrira pas". Un nouvel arrêté préfectoral sera pris pour proroger la fermeture de la mosquée après minuit, a-t-elle ajouté, l'état d'urgence ayant lui-même été prolongé de trois mois jusqu'au 26 mai.
Conséquence: si le Conseil d'Etat, qui doit rendre sa décision jeudi en fin de journée, juge l'arrêté du 1er décembre injustifié, la fermeture de la mosquée ne sera quoi qu'il en soit pas remise en question, puisqu'un nouvel arrêté entrera en vigueur.
"Le but n'est pas d'interdire aux fidèles de Lagny de prier, mais d'interdire au groupe de fidèles qui a noyauté l'association de disséminer leur idéologie radicale et de constituer des filières" de recrutement pour le jihad, a poursuivi la représentante de la place Beauvau.
L'avocat de l'Association des musulmans de Lagny dissoute mi-janvier, Karim Morand-Lahouazi, a lui plaidé pour la réouverture, avec une ligne de défense: les instances et les hommes qui ont pris la mosquée en main en mai "n'ont rien à voir avec le passé".
Une allusion à l'imam salafiste Mohamed Hammoumi, 34 ans, qui a officié à Lagny jusqu'à son départ en Egypte fin 2014. Ce dernier "a compté parmi ses élèves des personnes apparues dans l'entourage immédiat d'auteurs d'attentats terroristes", affirmait Bercy dans un arrêté pris en avril pour geler ses avoirs. Et aurait "joué un rôle majeur dans le recrutement de volontaires pour le jihad en Syrie".
"On veut nous faire croire que depuis le départ d'Hammoumi, tout va bien. Mystification!", a balayé le ministère de l'Intérieur. "Hammoumi a laissé des disciples à Lagny, dont le président de l'association". Le Conseil d'Etat a été saisi en référé, une procédure d'urgence, après le refus du tribunal administratif de Melun de suspendre la fermeture de la mosquée, présentée comme salafiste.
Moins de trois semaines après les attentats parisiens, au lendemain de l'arrêté, une opération policière d'envergure avait été menée le 2 décembre en pleine nuit à Lagny, commune de 21.000 habitants à quelques encablures d'Eurodisney.
Bilan dressé par le ministère: un revolver, des documents sur le jihad et "un disque dur dissimulé" saisis, une madrasa clandestine découverte, 22 interdictions de sortie du territoire et neuf assignations à résidence "d'individus radicalisés" prononcées.
L'Association des musulmans de Lagny, qui gère la mosquée, et les deux associations qui l'ont précédée ont été dissoutes dans la foulée, le 13 janvier. Une première, selon l'exécutif, qui affirme qu'aucune association cultuelle n'avait encore été dissoute par quelque gouvernement que ce soit.
Pour le président de l'association dissoute des musulmans de Lagny, Mohammed Ramdane, "il n'y avait rien à reprocher à la mosquée, car rien n'a été trouvé lors des perquisitions". "Les fidèles n'ont plus aucun endroit pour se recueillir, les lieux de culte alentour sont saturés: c'est le travail mené par toute une communauté qui a été détruit", déplore-t-il.
Pour lui, l'opération policière menée à Lagny a été "un coup médiatique".
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