Mesures antiterroristes : un durcissement serait-il vraiment efficace ?

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 28 juillet 2016 - 20:39
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Un gendarme enquête.
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©Jeff Pachoud/AFP
Eu égard au nombre d'individus suspects, aux moyens humains et financiers nécessaires et au respect des droits fondamentaux, enfermer tous les individus suspects ne semble pas envisageable.
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L'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray a une nouvelle fois relancé le débat sur les moyens de prévention du terrorisme, notamment l'enfermement des personnes radicalisées. Certaines mesures réclamées existent déjà, leur application pose parfois problème. Les experts sont en tout cas unanimes sur le fait qu'aucune "solution miracle" n'existe.

Rétention des personnes fichées S, peine de sûreté pour les terroristes condamnés, délit de séjour sur théâtre d'opération terroriste: les mesures proposées par la droite, sans rencontrer de franche hostilité, ne sont pas considérées comme la "solution miracle" par les spécialistes.

Pour le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, "ces idées parlent aux Français en apparence par la convocation de la démagogie" mais "sont contraires à l'Etat de droit et inefficaces en matière de lutte antiterroriste". Cette fin de non recevoir a été envoyée à l'opposition qui multiplie ses interventions réclamant un durcissement législatif.

Mais au-delà du fait que la rétention administrative de personne fichées S pour radicalisation ait été jugée anticonstitutionnelle par le Conseil d'Etat, cette idée serait-elle efficace?

"Enfermer tous les fichés S, ça n'a pas de sens (...) on ne peut pas emprisonner 10.000 personnes, c'est irréaliste et contre productif", réagit auprès de l'AFP Patrice Ribeiro du syndicat policier Synergie officiers. "Il faut se méfier des fausses bonnes idées. Il y a combien de fichés S? 10.000... Il faudrait les enfermer, les surveiller... il faut des moyens et de la place", renchérit un policier qui rappelle que la fiche S est avant tout "un outil de renseignement".

Se pose aussi la question de "combien de temps vous les laissez en rétention. Est-ce que vous n'allez pas créer un radical encore plus radicalisé quand il est relâché?", s'interroge Jean-François Daguzan, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique.

"Bien sûr tout est possible, on peut changer la Constitution, sortir de l'Europe (...) Mais, est-ce dans cette société qu'on veut vivre?", s'agace Clarisse Taron, présidente du Syndicat de la magistrature (SM) classé à gauche.

Autre proposition faite par l'opposition: la création d'un délit de séjour sur un théâtre d'opérations terroristes. "Depuis décembre 2012, les individus présents sur les théâtres d'opérations sont systématiquement mis en examen, mais pas forcément mis en détention provisoire", rappelle Jean-Charles Brisard, président du Centre d'analyse du terrorisme.

"Je ne sais pas s'il y a besoin de créer des nouvelles choses. Quand quelqu'un a tenté d'aller en Syrie, il n'est pas logique qu'il puisse se trouver en liberté. Puisqu'on dit que nous sommes en guerre, il faut réactiver le délit d'intelligence avec l'ennemi, la complicité avec une puissance ennemie, qui amène des mesures de privation de liberté", souligne le syndicaliste policier Nicolas Comte d'Unité SGP-FO.

"Il y a un parallèle à faire avec les pédophiles. Il faut appliquer aux radicalisés la même législation qu'aux pédophiles", notamment pour éviter qu'ils sortent trop rapidement avant la fin de leur peine de prison, estime Patrice Ribeiro. "Ce sont des gens dont on sait que leur condamnation ne les guérira pas. On laisse en liberté des gens dangereux."

Une idée qui rejoint une autre proposition: la rétention de sûreté à l'issue d'une peine pour les personnes condamnées pour des crimes terroristes afin d'empêcher leur libération en fin de condamnation si elles sont encore considérées dangereuses.

"Vous pouvez déjà empêcher quelqu'un de sortir de prison. J'ai l'impression qu'on réinvente la roue", se désole Jean-François Daguzan, "le problème des hommes politiques, c'est que tout le monde se jette sur des mesures dont une bonne partie existe déjà ou pour lesquelles se pose la question de leur applicabilité réelle".

"Tout est possible mais après c'est une question sociétale. Il faut que les concitoyens assument aussi les choix qui sont faits", selon un policier pour qui "ces choix sociétaux, on ne peut les faire à neuf mois de la présidentielle". "Il n'y a pas de solution miracle, on ne pourra jamais avoir le risque zéro", insiste un autre.

"Un récent sondage a montré que 78% de nos compatriotes ont compris qu'on ne peut pas empêcher un attentat de manière absolue. Si nos concitoyens ont compris, que nos politiques comprennent eux aussi. Faire une loi derrière chaque attentat n'est pas une solution, on peut toujours alourdir encore les peines en matière de terrorisme mais l'échelle des peines doit avoir un sens", estime Clarisse Taron.

 

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