Paris : un nouveau campement de migrants à Stalingrad
Ils sont environ 500, des Erythréens, des Ethiopiens, des Soudanais ou des Afghans. Entassés sous la ligne de métro aérien, près de la place Stalingrad, ces migrants ont installé un nouveau campement dans l'Est parisien, en attendant une solution. Des matelas et encore des matelas jetés par terre, et puis des couvertures, des sacs, au milieu de détritus qui jonchent le sol: c'est ici, dans le XIXe arrondissement, que ces hommes, avec lesquels vivent quelques femmes et des enfants, ont élu domicile. En face, sur le boulevard où circulent des passants intrigués, le café porte un nom qui laisse rêveur: "Tout va mieux".
"Au début, on avait 50 arrivées par jour", explique à l'AFP Marie-Laure Malric, une habitante du quartier qui leur vient en aide. Selon elle, il y a un "lien" entre le démantèlement de la zone sud de la "Jungle" de Calais (achevé à la mi-mars) et "cette récente affluence". En trois semaines, ce lieu est devenu le nouveau campement de Paris, où plusieurs autres avaient été évacués au cours des derniers mois (non loin de là à La Chapelle, au lycée Jean-Quarré mais aussi vers la gare d'Austerlitz...). Fateh, 25 ans, a vécu "comme un SDF dans un jardin ou sur un bout de trottoir à Bobigny (Seine-Saint-Denis), puis dans les XVIIIe et XIXe arrondissements de Paris" pendant de longs mois. "Normalement un réfugié ne dort pas comme un SDF", il est "pris en charge parce qu'il a quitté un pays en guerre", songe-t-il.
Sa demande de titre de séjour est encore à l'étude. Mais le plus dur pour ce jeune homme, qui a appris à parler français "en écoutant les gens s'exprimer dans la rue", est qu'"on chasse les Afghans de partout". "A chaque fois on me demande si je suis d'Al-Qaïda ou pour Oussama Ben Laden, si je suis un terroriste... Ca fait mal". "Les conditions... c'est pas ça", abonde son voisin d'infortune Zakaria, 19 ans. "Mais il faut résister, et puis petit à petit l'oiseau fera son nid", souffle ce Tchadien, qui veut "garder espoir". Dans quelques heures, son frère, arrivé avant lui en France, le rejoindra depuis Calais, faute d'avoir pu traverser la Manche. "On va demander l'asile tous les deux en France et rester", dit Zakaria. Des migrants "m'ont dit qu'il y avait beaucoup d'associations qui venaient aider ici à Stalingrad, mais bon... Je ne sais pas où, je ne sais pas comment", lâche ce grand gaillard engoncé dans son manteau.
Depuis quelques jours, "l'attente" elle-même "devient difficile", selon Marie-Laure Malric: "ils ont pour la plupart décidé de rester en France mais doivent actuellement patienter trois mois pour faire une demande d'asile". "Beaucoup d'entre eux souffrent de problèmes pulmonaires et, selon des médecins venus les voir, il y a chez ces migrants une détresse psychologique", souligne-t-elle.
Pour l'heure, les associations ont en tête une autre urgence. Conscientes que le campement a pris beaucoup d'ampleur, elles redoutent une évacuation par les pouvoirs publics dans les jours prochains. Inquiet et perdu, Zakaria demande: "Vous avez des informations, vous ? Elle va faire quoi de nous, la France ?"
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