Rentrée 2016 : le combat contre l'Education nationale de Laura-Julia, mère d'enfant autiste

Auteur(s)
Raphaëlle de Tappie
Publié le 30 août 2016 - 02:19
Mis à jour le 31 août 2016 - 13:15
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Laura Julia Fiquet et son enfant.
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©Laura-Julia Fiquet
"Mon fils n'est pas du tout agressif ni violent, c'est vraiment une crème, il est très doux", assure Laura-Julia Fiquet.
©Laura-Julia Fiquet
Depuis des années, Laura-Julia Fiquet se bat contre l'Education nationale pour que son fils Johan, cinq ans et autiste, ait le droit d'aller à l'école comme les autres et qu'elle puisse enfin reprendre le travail et sortir de la précarité. Fondatrice de l'UMEH, l'Union des mères d'enfants handicapés, cette mère courage a raconté à "FranceSoir" sa lutte au quotidien pour rompre l'omerta qui règne sur le handicap des enfants en France.

"Aujourd'hui en France, des mères et leurs enfants handicapés subissent l'exclusion sociale dans l'indifférence de notre gouvernement". Laura-Julia Fiquet, 30 ans, raconte son combat des trémolos dans la voix. Le combat d'une mère célibataire qui lutte chaque jour pour que son fils, Johan, cinq ans et autiste syndromique, ait le droit d'aller à l'école comme les autres et qu'elle puisse enfin reprendre le travail. Car dans un cas comme celui de Laura-Julia et Johan, "l'ennemi numéro un c'est l'Education nationale", assure celle qui avant la naissance de son enfant était responsable adjointe de magasin.

"Depuis 2005, des lois existent pour garantir l'intégration d'enfants handicapés à l'école. Elles sont plutôt bien faites mais là où ça coince c'est au niveau du mode d'application des lois qui se fait au bon vouloir de chaque école", explique à FranceSoir la jeune femme dans une vidéo YouTube (à voir ci-dessous). En effet, à la première rentrée de son enfant en septembre 2014, Laura-Julia a eu la mauvaise surprise de constater que l'Assistante de vie scolaire (AVS) censée s'occuper de son enfant n'était pas là. "

Le bras de fer a commencé dès le premier jour", explique la maman qui, loin de s'avouer vaincue décide d'accompagner elle-même Johan en classe. Mais au bout de trois semaines, le directeur lui demande d'arrêter et de rentrer chez elle avec le petit garçon. Forte du réseau qu'elle a créé, l'UMEH, l'Union des mères d'enfants handicapés, qui regroupe près plus de 2.400 membres sur Facebook, la jeune femme contacte Ouest-France. L'affaire fait scandale. En quelques jours, la situation se débloque, l'AVS arrive. "Par la suite, mon enfant ne sera toléré qu'une heure par jour. Or il est parfaitement capable de tenir bien plus. Ce n'est pas à lui de prouver qu'il est handicapé mais à l'école de s'adapter. Il n'est est pas du tout agressif ni violent, c'est vraiment une crème, il est très doux. Il mérite d'être intégré comme tous les enfants à l'école", s'insurge Laura-Julia.

A la rentrée suivante, apprenant que la direction souhaite maintenir Johan en petite section, elle décide de déménager pour changer d'école. "Je voulais donner une nouvelle chance à mon enfant mais aussi à l'Education nationale, mais ça a recommencé", témoigne-t-elle. Après quatre mois de retard, Johan est enfin autorisé à participer à la classe, se contentant de l'AVS d'un autre enfant et là encore à raison d'une heure par jour. Mais en juin, c'est le coup de grâce: l'école organise une sortie au zoo dont l'enfant est exclu d'office en raison de son handicap.

"On me dit qu'il n'y a pas l'assistance nécessaire pour accompagner mon fils et quand je me propose de le faire, on me répond que ce n'est pas possible", explique Laura-Julia qui décide malgré tout de s'y rendre, mais en marge de la sortie scolaire, avec Johan. Sur place, elle découvre que l'AVS est là. S'en suivra une altercation verbale avec un membre du personnel éducatif. Scandalisée et épuisée, la jeune maman dépose une plainte au commissariat de Caen contre l'Education nationale pour discrimination et manquement aux obligations de scolarité. "Même les enfants les moins sages de la classe étaient au zoo et moi j'aurais dû laisser passer? Et bien non, à un moment on dit+ stop+", s'insurge la maman qui laisse libre court à sa colère sur les réseaux sociaux.

"Après l'affaire du zoo, j'ai reçu des témoignages d'autres familles qui ont vu leurs enfants exclus d'une sortie scolaire. Une AVS m'a même avouée qu'une fois une maîtresse lui avait demandé de ne pas prévenir la mère d'un autiste de la préparation de l'arbre de Noël parce qu'elle ne supportait plus l'enfant", raconte Laura-Julia, avant d'ajouter: "Il y a de quoi déclencher des enquêtes dans tous les rectorats de France, ce n'est pas une menace envers l'Education nationale mais je veux qu'ils nous prennent au sérieux".

Et sa mobilisation a fini par payer puisqu'à partir de la rentrée 2016, la prise en charge de Johan passera à 15 heures, conformément à la prescription de la CDAPH (Commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapée). "Une équipe de suivi de la scolarisation s'est réunie afin d'anticiper et de préparer au mieux la rentrée de Johan. L'enfant sera scolarisé tous les matins à compter du 1er septembre avec son accompagnant", a assuré le ministère de l'Education nationale contacté par FranceSoir. Aussi, Laura-Julia devra-t-elle continuer à s'occuper de son enfant chaque après-midi.

"Je reste bloquée professionnellement et dans la précarité. Je ne pourrais jamais avoir d'emploi salarié a temps plein dans mon domaine de compétences. C'est pourquoi je développe mon projet de site e-commerce depuis un an maintenant", explique la jeune femme qui, après avoir fondé "UMEH elles entreprennent", un réseau qui réunit les femmes souhaitant créer leur activité tout en s'occupant de leur enfant handicapé, a créé son propre site de lingerie en ligne, Point sensible. Et de conclure, comme elle l'avait déjà fait dans plusieurs médias auparavant: "j'ai compris que tout ce que j'obtiendrai dans ma vie, c'est ce que j'aurais bâti. Si je veux un travail, je dois le créer moi-même". 

(Voir ci-dessous le témoignage sur YouTube de Laura-Julia Fiquet): 

 

Lire également notre interview de Laura-Julia Fiquet: Handicap: "nous ne pardonons plus l'exclusion sociale subie par nos enfants", témoigne une mère à la veille de la rentrée

 

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