Suppression des kiosques : les Parisiens en colère
La Ville de Paris va-t-elle supprimer ses emblématiques kiosques à journaux? Les Parisiens sont désormais des dizaines de milliers à réclamer dans une pétition que l'aspect extérieur de ces kiosques, hérité du baron Haussmann, soit préservé. La maire de Paris, Anne Hidalgo, "a clairement dit qu’elle ne voulait plus des kiosques haussmanniens. Elle a dit: +je veux un kiosque d’apparence moderne+. Nous avons été placés devant le fait accompli+", affirme le conseiller de Paris Jean-Baptiste de Froment (Les Républicains, opposition), membre du groupe de travail qui se réunit lundi pour examiner le dossier. "L’aspect extérieur des kiosques fait partie de l’identité de Paris, les gens y sont attachés. On attend que Médiakiosk nous rende sa copie lundi. Si on trouve que ce qu’ils ont fait est scandaleux, on encouragera le mouvement de protestation", ajoute-t-il.
La Ville de Paris veut remplacer d'ici à juin 2019, par un modèle "innovant", ses quelque 360 kiosques dont le célèbre modèle surmonté d'un petit dôme et d'une frise a été conçu en 1857 par l'architecte Gabriel Davioud (1823-1881). Pour cela, elle a lancé un appel d'offre remporté par la société MédiaKiosk, filiale du groupe JCDecaux et opérateur actuel des kiosques parisiens. La conception des nouveaux édicules a été confiée à la designer française Matali Crasset. Des premiers croquis des kiosques redessinés montrent qu'ils conserveront leur couleur verte mais qu'ils perdront leur frise et leur petit dôme caractéristiques. Un éclairage vert ou rouge signalera si le kiosque est ouvert ou fermé et des écrans interactifs seront installés. Il sera aussi chauffé et mieux isolé.
"Pourquoi ne pas concilier le charme de l'ancien à la fonctionnalité et au confort du moderne?", demande la pétition lancée sur internet par Juliette Larousse, une Parisienne de 37 ans. "Nous sommes pour que les kiosques à journaux parisiens aient un design qui reprenne ce qui fait tout le charme du +Paris Romantique+ cher aux touristes de France et du monde entier, tout en améliorant le confort des personnes qui y travaillent", souligne le texte qui a recueilli déjà plus de 40.000 signatures sur
"Plus de la moitié des kiosques actuels sont obsolètes et les autres le seront prochainement. Il faut les moderniser", explique à l'AFP Olivia Polski, adjointe à la maire de Paris, en charge du commerce et de l'artisanat. "Notre objectif est double: soutenir le secteur de la presse écrite en attirant un nouveau public dans les kiosques, notamment les jeunes, mais aussi améliorer les conditions de travail des kiosquiers", précise-t-elle.
Or, ce qui provoque la colère des Parisiens et l'incompréhension des étrangers amoureux de Paris, c'est la volonté de la maire d'en finir avec un modèle haussmannien qui a prouvé qu'il pouvait évoluer en 160 ans d'existence tout en préservant son identité. Pour Michel Carmona, spécialiste du Paris haussmannien, "il y a un paysage typique parisien, qui doit beaucoup à Haussmann et qui est l’un des fonds de commerce de Paris: c’est dommage de le démanteler". Pour les défenseur des kiosques haussmanniens, les aménagements sont pourtant parfaitement "conciliables" avec le maintien de leur aspect actuel.
La ville de Rome installe actuellement de nouveaux kiosques "high tech" qui reprennent, à la demande des élus, le modèle historique octogonal et vert. Sur le site de la pétition, des signataires français ou étrangers interpellent directement la maire de Paris pointant du doigt son "obsession du béton et du verre" ou sa volonté de "marquer son passage". D'autres dénoncent la gabegie d'un projet "inutile et coûteux" qui dépasse les 50 millions d'euros.
A la mairie, on objecte que les kiosques, "dont la forme actuelle remonte au XIXe siècle, avaient disparu pour revenir dans les années 90 avec des dômes de style haussmannien, mais en plastique". "Si, à l'époque d'Haussmann, on avait tenu ce raisonnement qui consiste à ne rien changer, le Paris Haussmannien n'aurait pas existé", argumente Olivia Polski.
Les opposants, eux, font valoir que les notions de "patrimoine urbain" et de "paysage culturel", qui sont aujourd'hui la norme en matière de protection des villes anciennes, n'existaient pas au XIXème siècle.
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