Vague de suicides chez les policiers : "on ne peut jamais vraiment décrocher"
Un 28e suicide de policier a été révélé jeudi 18, augurant d'une année catastrophique en la matière. Pour Thomas Toussaint, secrétaire national de l'Unsa-Police, il est difficile de séparer les causes professionnelles et personnelles, les premières pouvant être à l'origine des secondes. Il appelle à un "plan Marshall" contre ces drames.
Metz dans la nuit de lundi à mardi, Montpellier et Villejuif jeudi. Trois policiers se sont donnés la mort cette semaine en France, portant à 28 le nombre de suicides depuis le début de l'année, selon les chiffres du syndicat Unsa Police "stabilisés par la Direction générale de la police nationale".
A ce rythme, 2019 pourrait connaître une centaine de décès au sein de la profession alors que depuis une dizaine d'années, il n'en a jamais été dénombré plus de 55 (en 2014) et que ce chiffre était tombé à 35 en 2018. De quoi envisager une année noire pour 2019, sans que les causes soient véritablement identifiées.
"Il n'y a pas d'explication à l'heure actuelle. L'administration ne fait pas grand-chose pour étudier le phénomène. On a déjà eu deux plans anti-suicide et on s'apprête quand même à vivre la pire année en la matière", explique à France-Soir Thomas Toussaint, secrétaire national de l'Unsa. Et de poursuivre:"C'est multifactoriel et dû à la fois à un manque d'effectifs, de moyens, au suremploi… Ce sont des problématiques qui viennent ensuite s'insérer dans la sphère familiale" et ainsi s'ajouter à d'éventuels problèmes personnels.
Voir: Montpellier - plusieurs centaines de policiers rassemblés après un suicide
Si bien sûr chaque cas est différent est lié aussi à des éléments non-professionnels, il pointe "des problèmes, comme le surendettement, liés au travail et présents à la maison. Au travail il y a un sentiment de honte. Cela crée un engrenage néfaste".
Thomas Toussaint, évoque également une question "sociétale", liée aux évènements médiatisés, qui illustre la difficulté à faire la différence entre la vie privée et professionnelle. "Parfois on est adulés, parfois on est détestés, mais cela dure plus longtemps lorsqu'on est détestés. On travaille avec parfois un week-end sur six de repos. Et quand vous allez au sport, que vous discutez avec des gens et que vous leur dites que vous êtes policier, ils vous reprochent de taper sur les Gilets jaunes, même si vous travaillez à la circulation, aux ressources humaines ou assurez une mission de proximité. On ne peut jamais vraiment décrocher".
Il appelle à un "plan Marshall" avec de vrais moyens comme par exemple "débloquer des fonds pour permettre les avances sur salaire pour les policiers dans le besoin", tout en restant pragmatique: "Ça ne se fera pas en un jour. Il faudra y aller à tâtons. Au Canada, il leur a fallu 20 ans pour résoudre le problème du suicide dans la police". Point positif toutefois: le fait que le ministre de l'Intérieur ait reconnu pour la première fois un lien avec la sphère professionnelle. Un premier pas dans la compréhension et la lutte contre ces drames.
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