Anorexie : la peur de grossir n'aurait rien à voir avec cette maladie
Contre toute attente, l'anorexie s'expliquerait par le plaisir de maigrir et non par la peur de grossir. C'est en quelque sorte la conclusion d'une étude de l'Inserm publiée mardi 7 dans la revue Translational Psychiatry. Jusqu'à présent, ce trouble du comportement, qui touche 30.000 à 40.000 personnes en France, reposait sur trois critères: la présence d'une restriction alimentaire menant à la perte de poids, une perception déformée du poids et du corps ainsi qu'une peur intense de grossir, selon le manuel de l'Association Américaine de Psychiatrie (le DSM-5).
Mais sur ce dernier point, les avis divergent. D'après les équipes du Pr Philip Gorwoord, chef de service à l'hôpital Saint-Anne (Paris) en charge de l'étude, l'anorexie relèverait d'avantage du registre de l'addiction. "Certes, dans les deux cas, cela conduit à la perte de poids. Mais cette découverte est loin d’être anodine, c’est en réalité d’un changement de paradigme qui pourrait avoir un réel impact dans la prise en charge de la maladie: on passe du registre de la phobie à celui de l’addiction, qui n’implique pas les mêmes circuits cérébraux", a-t-il déclaré.
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont analysé les réactions de 70 personnes atteintes d'anorexie mentale et de 20 personnes en bonne santé grâce à un test qui mesure le taux de sudation de la peau. Selon les experts, l'émotion provoquée par certaines images entraînerait une augmentation de la transpiration, rapide et automatique. Ils leur ont ensuite montré des images de personnes en poids normal ou en surpoids. Chez les anorexiques, "la vision de ces images provoquait à peu près la même réaction que les sujets sains", ont indiqué les auteurs de l'étude. En revanche, "face à des images corporelles de maigreur, les patientes présentaient des émotions évaluées comme positives tandis que les sujets sains n’avaient pas de réaction particulière".
Face à cette découverte des plus déconcertantes, les chercheurs pensent désormais à s'orienter vers de nouveaux traitements. "Cela ouvre des perspectives thérapeutiques", a expliqué le Pr Gorwoord, précisant qu'aucun "pays n'a de médicament ayant une autorisation de mise sur le marché pour l'anorexie". "Cela rend le travail des psychiatres qui s'en occupent très difficile", a-t-il ajouté. Conséquence: seuls "un tiers des cas, les formes les moins sévères, se soldent par une rémission réelle".
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