Pénurie de personnel : les crèches pourront bientôt recruter des personnes non-qualifiées

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FranceSoir
Publié le 09 août 2022 - 19:00
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Pénurie dans les crèches
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Thomas SAMSON / AFP
Près de la moitié des crèches en France font face à une pénurie de personnel.
Thomas SAMSON / AFP

Pour pallier la pénurie d'effectifs dans les crèches, un arrêté ministériel, publié au Journal Officiel le 4 août, prévoit d’autoriser le recrutement de personnes non titulaires des qualifications requises. Une mesure qui suscite inquiétude et colère chez les professionnels de la petite enfance.

48,6 % des crèches souffrent d'un manque de personnel

À l'approche de la rentrée, les crèches font face à une situation critique. Une enquête de la Caisse nationale des allocations familiales, publiée début juillet, révèle que "48,6 % des crèches collectives déclarent un manque de personnel auprès d’enfants". Depuis plusieurs mois, les établissements de la petite enfance tirent la sonnette d’alarme… en vain. Des salaires jugés trop faibles pour des conditions de travail difficiles dans le bruit des pleurs et des cris, souvent aggravées par un manque de reconnaissance voire le mépris de certains parents, font que la petite enfance ne suscite plus beaucoup les vocations, rapporte France info dans une enquête publiée en juillet.

Pour répondre à cette crise d'effectifs, un arrêté publié au JO, qui entrera en vigueur le 31 août, prévoit d'autoriser l'embauche de personnes non formées à la petite enfance "à titre exceptionnel". Une dérogation qui génère de la crainte chez les syndicats et professionnels des crèches dans un contexte où le manque de connaissances et de compétences d'une partie des employés de ce secteur cause déjà des problèmes.

L’évènement a suscité l’émoi. Le 22 juin, une salariée non titulaire d’un diplôme d’État, employée par une crèche lyonnaise, a intoxiqué une fillette de onze mois au Destop, un produit qui sert à déboucher les canalisations. Le motif : elle ne supportait plus les cris du bébé. Si cette affaire d'empoisonnement constitue un cas isolé, il a néanmoins mis sur le devant de la scène une des nombreuses difficultés dont pâtit le monde de la petite enfance : celui-ci est "devenu la voie de garage pour ceux qui ne savent pas trop quoi faire", explique Fabien Marchand, infirmier puériculteur et directeur de deux micro-crèches, à France info.

Des personnes sans aucune qualification pour gérer les enfants ?

La crainte d'un accueil au rabais. L’article 2 de l'arrêté prévoit notamment "des dérogations aux conditions de diplôme ou d'expérience fixées (qui) peuvent être accordées en faveur d'autres personnes, en considération de leur formation, leurs expériences professionnelles passées, notamment auprès d'enfants, leur motivation à participer au développement de l'enfant au sein d'une équipe de professionnels de la petite enfance et de leur capacité à s'adapter à un nouvel environnement professionnel"

En d'autres termes, "on va demander à des professionnels qui sont déjà en sous-effectif de devenir des formateurs et des formatrices pour des personnes qui n'y connaissent rien au développement de l'enfant", déplore sur France info Emilie Philippe, membre du collectif "Pas de bébés à la consigne", qui regroupe des syndicats et des organisations professionnelles dans le domaine de la petite enfance mobilisés pour défendre de meilleures conditions d’exercice.

Pour Jérôme Dumortier, directeur d'une crèche à Villeneuve-d'Ascq, cette dérogation dévalorise le monde de la petite enfance puisque le métier nécessite des connaissances "en termes de santé de l'enfant, de développement et de psychologie de l'enfant". Il regrette que "le message envoyé à la société soit une catastrophe", ajoutant que "travailler avec des jeunes enfants, ça s'apprend. Et que cela ne peut pas être donné à n'importe qui". Et de poursuivre : "S'il y a des formations, c'est bien qu'il y a une raison".

Une mesure autorisant l'embauche d'un personnel non qualifié dans un secteur social requérant des qualifications auprès d'un public composé de personnes vulnérables, n’est pas une première en France.

Recruter des TIG pour pallier la pénurie de personnel

Après l’instauration de l’obligation vaccinale, les Ehpad se sont également retrouvés en situation de manque d'effectifs. Aussi, en octobre 2021, pour remédier à ce problème, l’Agence régionale de santé d’Auvergne Rhône-Alpes avait proposé de faire appel à des personnes condamnées à des... TIG (Travaux d'Intérêt Général), peines alternatives à la prison ou peines complémentaires.

Une proposition qui avait suscité les craintes de ces établissements. "Si on n'a plus que des TIG pour pallier le manque de personnel dans nos Ehpad, c'est que la situation est vraiment critique et qu'il convient qu'elle soit prise à un niveau national", s’était alarmé Yvan Muschitz, directeur des Ehpad de Marcols-les-Eaux et de Saint-Pierreville.

La pénurie de personnel dans les Ehpads et le monde de la petite enfance fait aussi écho à la situation des services hospitaliers, aussi en proie à une crise : "La quasi-totalité des établissements connaissent des difficultés de recrutement" d'infirmiers et d'aide-soignants "de manière permanente ou ponctuelle", selon une enquête réalisée en juin par la Fédération Hospitalière de France (FHF), qui souligne que l'urgence reste "les infirmiers et la nuit".

Voir aussi : Une vague de démissions s'abat sur la France

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