Teddy Riner refuse de se prononcer sur la campagne de vaccination

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FranceSoir
Publié le 14 septembre 2021 - 21:56
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Teddy Riner à Tokyo le 26 juillet 2021
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Philip FONG / AFP
Teddy Riner à Tokyo le 26 juillet 2021
Philip FONG / AFP

Hier en fin d’après midi avait lieu la cérémonie protocolaire habituelle de félicitations des athlètes olympiques et paralympiques qui ont brillé durant les derniers Jeux de Tokyo. Une grande cérémonie réunissant les médaillés olympiques et paralympiques se tenait, comme c’est le cas à chaque olympiade, à l’Élysée en présence du président de la République, qui réunit traditionnellement tous les athlètes médaillés en les félicitant chaudement et en les décorant de l’Ordre du Mérite ou de la Légion d’honneur, selon la couleur du métal rapporté.

À trois ans de l’organisation des Jeux Olympiques à Paris, cette cérémonie était aussi une opération de communication afin notamment de continuer de motiver les athlètes dans le but d’être le plus performant possible en 2024. Les athlètes, en cette fin d’après-midi, rentraient au compte-gouttes et s’arrêtaient volontiers devant le parvis de l’Elysée ou s’agglutinaient les journalistes. 

L’un des plus attendus, si ce n’est le plus attendu, était notre immense judoka, icône de son sport, le triple champion olympique (dont un titre par équipes) et décuple champion du monde : Teddy Riner, qui s'est arrêté plusieurs minutes afin de se soumettre aux diverses questions des journalistes avant de rentrer dans le palais. Si la plupart lui posaient des questions d’ordre sportif, comme l’envoyé spécial de la chaîne "l'Équipe", qui lui demandait si c’était à chaque fois une fierté d’être décoré par le président français (la quatrième pour lui après les jeux de Pékin, Londres et Rio), et quels étaient ses objectifs pour Paris 2024, l’envoyé spécial de RTL, lui, avait une toute autre idée de la question à poser au champion français.

Rebondissant sur les paroles tenues par le « Monsieur Vaccin » du gouvernement, l’immunologue Alain Fischer, qui souhaite ardemment la prise de position publique des personnalités antillaises afin de convaincre les plus sceptiques de se faire vacciner (au regard notamment de la dernière vague épidémique ainsi que le pourcentage de la population antillaise vaccinée bien en deçà de celui en métropole), le champion originaire de Guadeloupe a catégoriquement refusé d’endosser un quelconque rôle d’ambassadeur de la vaccination.

Une position courageuse, même si elle semblait plutôt neutre au premier abord, de refuser d’endosser ce rôle, compte tenu du contexte sanitaire dans les îles, du lieu dans lequel il se trouvait - le palais de l'Élysée - et de l’image qu’il véhicule auprès du sport français et à l’international - il est certainement le plus grand judoka de l’histoire de ce sport. Quelques minutes plus tard, il allait être décoré par le président lui-même, qui, tout le monde le sait, a rendu la vaccination obligatoire le 12 juillet dernier pour certaines professions, et quasi-obligatoire de fait pour les autres en appliquant le pass sanitaire pour la plupart des lieux de vie, avec des tests payants à compter de la mi-octobre.

Teddy Riner a rétorqué alors que la vaccination était "avant tout une décision individuelle" et que chacun devait être libre de faire ses propres choix. Cette déclaration pleine de bon sens dessine une opposition à l'injection par la contrainte et non par la conviction via une information éclairée. Le colosse ajoutait ensuite que pour sa part, il s’était fait vacciner car il "n’avai[t] pas vraiment le choix" : "il fallait que je me prépare pour les Jeux Olympiques"». Une phrase qui laissait supposer qu'il avait choisi de se plier à la contrainte de ses échéances sportives, davantage qu'à la conviction qu’il se vaccinait pour se protéger et protéger les autres.

Mais l'ogre des tatamis revenait d’une longue blessure au genou gauche, et cette échéance olympique arrivant à grands pas, il était en retard dans sa préparation : pas le temps de tergiverser quant à la décision d’accepter l’injection ou non. Ses différents stages d’entrainements et compétitions pré-JO (Maroc, Qatar), ainsi qu'évidemment sa présence à Tokyo dans un pays ou les spectateurs ont finalement été interdits, et où la vaccination des athlètes étaient fortement recommandée, ont conforté sa décision.

Teddy Riner concluait l’interview par un message de solidarité adressé aux habitants de son île et des Antilles en général. Et déclarait alors envoyer toute sa force et son énergie, tout en pointant que la situation était compliquée outre-mer notamment en raison du fait "qu’on n’a pas de bons hôpitaux".

La encore, on peut y voir un message subliminal à destination du gouvernement français. Ces derniers insistent sur le faible pourcentage de la population vaccinée, mais ne serait-ce pas pour détourner les vrais problèmes et les vrais scandales de cette crise sanitaire outre-mer ? A savoir la vétusté des hôpitaux manquant cruellement de matériel, de lits, et aussi et surtout de bouteilles d’oxygène ?

Voir aussi : Antilles : la politique de la peur pour pousser à la vaccination ? Témoignages

Plutôt que d’envoyer des hommes, des avions pour transfert en métropole à grands coups d’images télévisuelles ; ne serait-ce pas plus pertinent de leur envoyer des équipements et du matériel adaptés ? Les soignants antillais méritent-ils d’être maternés à ce point ? Que peut faire un réanimateur sans oxygène et sans lits de réanimation ?

On se souvient alors que l’ancien défenseur de l’équipe de France de football, de Chelsea et de l’OM, lui aussi originaire de Guadeloupe par ses parents, William Gallas, avait poussé un violent « coup de gueule » à la fin du mois d’août et n’avait pas hésité à charger la gestion du gouvernement concernant la pandémie en Guadeloupe. Il avait critiqué avec force le fait que le trafic aérien en provenance de la métropole n'ait pas été stoppé, afin de privilégier le tourisme, ajoutant également qu’au vu de la vétusté des hôpitaux guadeloupéens, ne pas couper ces dernières était plus que de la négligence de leurs parts.

Saluons la liberté d'esprit et de ton de ces deux athlètes qui, chacun à leur manière, s’opposent et s’indignent de la gestion de crise sanitaire outre-mer, assimilable à de l’abandon. Et en souhaitant bien entendu à Teddy Riner un bon repos puis une très bonne reprise, avec comme objectif ultime l’apothéose de l’or olympique lors de ses derniers Jeux olympiques, à Paris en 2024, espérons - rêvons un peu ? - que covid, vaccination et instrumentalisation des sportifs n'y seront plus que des lointains souvenirs.

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