Souveraineté et visioconférence : où en sont les outils français ?
Avec le confinement, nombreux sont ceux qui ont découvert le télétravail et avec lui l’outil le plus emblématique du travail à distance: le service de visioconférence. Il en existe plusieurs, mais c’est Zoom qui a le plus fait parler de lui et dont l’utilisation s’est étendue aux domaines extra-professionnels, pour les devoirs à la maison, les conférences, ou même des shootings photos et des pièces de théâtres en ligne! Mais les nouveaux outils en ligne viennent toujours avec leur lot de questions de sécurité des données et de souveraineté numérique. Quelles sont les alternatives françaises, pour éviter les risques liés à l’hébergement des services à l’étranger?
Zoom, un succès fulgurant et un “Zoom-bashing” violent
La plateforme Zoom est celle qui a le plus bénéficié de la ruée vers les outils en ligne, déclenchés par les mesures de confinement. Selon son dernier rapport, publié le 2 juin 2020, Zoom à connu une croissance de 169%, soit une augmentation de 354% de ses utilisateurs. Selon Eric Yuan, le fondateur et directeur général de Zoom, la crise du Covid-19 et les mesures de confinement expliquent cette croissance sans précédent.
Mais Zoom est loin d'être la plateforme de vidéoconférence préférée des Français. L’outil a été fortement critiqué pour ses failles de sécurité et il est vu comme un danger par les universitaires qui se sont montrés réticents à son utilisation pour la surveillance des examens en ligne.
Dans une interview pour Le Mag IT, Loïc Rousseau, responsable Zoom pour la France, s’exprime au sujet des sévères critiques de la part de la concurrence. Selon lui, Microsoft, Google et Cisco ne sont pas meilleurs élèves, ils ont des failles par centaines, et personne n’en parle… Des bug bounty (chasseurs de failles) ont même pu être recrutés par la concurrence pour signaler leurs faiblesses qui, selon la plateforme la sécurité, ne posent aucun problème.
Certaines entreprises ont tout de même banni son utilisation en interne. En France, l’adoption de Zoom n’a pas été aussi unanime que dans d’autres pays.
Le Cloud Act, une des raisons pour soutenir la souveraineté numérique
Comme pour les données de santé, hebergées par Microsoft, l’utilisation de plateformes basées aux USA, comme Zoom, implique un risque d’accès par les services de renseignement d’Etat, permis par le Cloud Act. Des métadonnées, comme les adresses IP, peuvent être demandées à Zoom par le gouvernement américain en cas d’enquête.
Selon Rousseau, cela n'empêche pas Emmanuel Macron, Boris Johnson (pour une réunion avec l'OMS par exemple) ou des acteurs stratégiques comme Airbus, d’utiliser cette plateforme. Airbus a, par ailleurs, déclaré utiliser également des outils Google.
Selon Loïc Rousseau, le CEO de Zoom n’acceptera jamais la réalisation d’une requête basée sur le CLOUD Act ou du Patriot Act et bon nombre d’entreprises américaines ont rejeté ces demandes par des moyens divers et variés.
Quelles alternatives françaises? Jitsi meilleur que Zoom?
La question a été posée sur Twitter par Rand Hindi, entrepreneur dans le secteur de l’IA: “Pourquoi personne en France ne parle de souveraineté sur les outils de visioconférence?”. Quelques acteurs proposent en effet des outils made in France: Amplement, Livestorm, Jamespot, Private Discuss, … sont quelques solutions alternatives, certaines sont basées sur le logiciel open source Jitsi.
Né en France, Jitsi est un logiciel libre qui permet à d’autres services de créer leur propre application de vidéoconférence. Les données sont chiffrées et sécurisées avec une deuxième couche de chiffrement qui permet la sécurisation des messages de bout en bout (pas encore pour plus de deux participants). Jitsi est utilisé par de nombreux développeurs et spécialistes de l’informatique et a même reçu la “bénédiction” d'Edward Snowden! Ce projet open source est utilisé par environ 10 millions de personnes mensuellement et connait un succès important en France, même si l’entreprise a été cédée en 2018 à une société américaine.
Certains spécialistes prédisent un brillant avenir à cette solution qui pourrait profiter de l’importance de la souveraineté numérique pour les outils de visioconférence: « Nous avons fait le choix de Jitsi parce que nous voyons bien qu’il se passe énormément de choses. On maîtrise ce qui se passe et cela va dans le bon sens », confirme Alain Garnier de Jamespot, service de réseau social d’entreprise français.
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