Terrorisme et islam radical en prison : 1.000 détenus dangereux ?
L'attaque de deux gardiens par un détenu radicalisé et ayant glorifié les attentats du Bataclan, ce mardi matin près d'Alençon, réveille la question de la gestion de ces détenus liés de près ou de loin au terrorisme. Et de leur potentiel passage à l'acte, même derrière les barreaux.
Il n'est jamais parti en Syrie, n'a pas participé à un attentant ni même été opérationnel dans une quelconque cellule terroriste. Pourtant, Michaël Chiolo, l'homme qui a grièvement blessé deux surveillants de prison à Condé-sur-Sarthe (Orne) avant de se retrancher est considéré comme un détenu radicalisé et dangereux. La prison où il est détenu est censée être d'un niveau de sécurité maximal pour gérer les détenus islamistes capables d'influencer d'autres détenus.
Mi-décembre, environ 1.500 prisonniers sur les 70.000 personnes détenues en France étaient considérés comme en lien avec l'islamisme radical. Ils étaient précisément 504 en détention provisoire ou condamnés définitivement pour actes en lien avec une organisation terroriste, apologie de terrorisme ou un retour de la zone irako-syrienne (pour 152 d'entre-eux). A ceux-ci s'ajoutent plus de 1.000 détenus incarcérés pour des faits de droit commun, sans lien avec le terrorisme, mais qui se distinguent par un comportement laissant craindre une radicalisation.
L'ensemble de ces prisonniers, une fois identifiés, sont placés dans un "quartier d'évaluation de la radicalisation" (QER) où ils sont surveillés et évalués par une équipe de psychologues, d'éducateurs et de gardiens formés pour ce public particulier. L'objectif? Pouvoir évaluer le niveau de dangerosité des détenus à l'issue du séjour dans l'unité spécialisée.
Pour le tiers des détenus jugés non dangereux, c'est le retour dans un quartier classique où ils purgeront le reste de leur peine. Mais pour les deux tiers restant, soit environ 1.000 détenus, c'est un traitement particulier qui est mis en place pour éviter que ne se répande le risque de radicalisation islamiste. Les détenus jugés dangereux car susceptibles de se laisser embrigader et de passer à l'acte sont placés à l'isolement dans des prisons standards. Mais les quelques dizaines de détenus jugés les plus dangereux car charismatiques et prosélytes, et pouvant donc radicaliser les autres détenus, sont eux incarcérés dans des quartiers spécialisés dans certaines prisons comme celle de Condé-sur-Sarthe, où s'est produite l'attaque de ce mardi.
Lire aussi: Alerte- Alençon: le prisonnier radicalisé poignarde les surveillants au cri de "Allah akbar"
Ce système reste décrié. Certes, il permet d'éviter le contact entre de détenus radicalisés et prosélytes avec des détenus influençables. Mais les prisonniers dangereux ne restent alors qu'entre eux avec un minimum de contact avec l'extérieur ce qui fait craindre qu'ils ne renforcent leur niveau de dangerosité une fois à l'extérieur.
La ministre Nicole Belloubet avait annoncé en janvier (voir ici) que 450 détenus radicalisés devraient sortir des prisons françaises en 2019, dont une trentaine condamnés pour des faits en lien avec du terrorisme islamiste. Si des moyens de renseignement spéciaux, voire des injonctions de soins ou des bracelets électroniques de géolocalisation, peuvent être utilisés pour les scruter une fois dehors, rien ne peut empêcher leur sortie, ces détenus ayant tout simplement achevé leur peine.
Les surveillants pénitentiaires, eux, sont en première ligne face aux risques que représentent ces détenus. La première attaque qualifiée de terroriste recensée en milieu carcéral date de 2016. Depuis, les prisons sont sporadiquement touchées par ces actes violents. Deux s'étaient même produits en quatre jours en janvier 2018, respectivement à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) et Mont-de-Marsan (Landes). Les surveillants pénitentiaires avaient alors initié un mouvement de grève pour dénoncer le danger auquel ils sont exposés. Et qui a encore fait deux victimes ce mardi 5.
Voir aussi:
Qui est Michaël Chiolo, le détenu radicalisé qui a poignardé 2 gardiens à Alençon
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.