Les déserts médicaux, une réalité aussi à 40 km de Paris

Auteur(s)
FranceSoir avec AFP
Publié le 05 octobre 2022 - 12:30
Image
Crédits
AFP/Archives - Thierry ZOCCOLAN
La commune de Vert-le-Grand, dans l'Essonne, 2.400 habitants, n'a plus de médecin depuis deux ans
AFP/Archives - Thierry ZOCCOLAN

"La commune de Vert-le-Grand (Essonne) recherche un médecin généraliste": la grande bâche verte plantée à l'entrée de la commune illustre le désarroi de ce village de 2 400 habitants à 40 km de Paris, qui depuis près de deux ans n'a plus de médecins.

"Le seul médecin du village est parti à la retraite au 1er mai 2021. Depuis cette date, il n’y a plus de généraliste à Vert-le-Grand", explique Olivier Josse, maire adjoint de cette commune paisible, qui met en avant "le calme de la campagne".

Un départ qui avait pourtant été anticipé : "Ça fait quatre ans qu’on a commencé la recherche", souligne M. Josse, en charge de la maison médicale où il exerce comme podologue. "On a une partie paramédicale qui, elle, est remplie (...). Mais l’autre partie, deux locaux de 30 m2, qui peuvent accueillir deux médecins avec une salle d’attente et tout aux normes, est vide".

Malgré "2 500 annonces" tous supports confondus, en dépit du bassin de population, de la proximité des universités et même de la capitale (50 minutes via l'A6), le maire Thierry Marais se dit "désarmé". "Il n’est pas nécessaire d’être au fin fond de la Lozère" pour avoir "ce type de soucis", abonde M. Josse.

"Chacun se débrouille par le biais de Doctolib, des hôpitaux ou des cliniques. Nous, on essaie d’accompagner au mieux les personnes âgées (10% de la population). On va même jusqu’à les véhiculer à leurs rendez-vous et la pharmacienne nous aide bien grâce à l’installation de sa cabine de téléconsultation", raconte le maire.

Médecin à Bruyères-le-Châtel, une commune voisine, Patrick le Fur souligne que "ça fait pratiquement 30 ans que le problème est soulevé par la profession médicale en Ile-de-France". Et il n'est guère optimiste pour les années à venir : "Le problème qui se pose à présent, c’est qu’il y a une urbanisation et des coûts de vie importants. Les jeunes médecins le savent, l’interne que j’ai actuellement a le projet de s’installer à Clermont-Ferrand…"

L’IDF, désert médical complexe

Ces choix pèsent sur le nombre de Zones d’intervention prioritaire (ZIP), où la proportion de médecins généralistes est déficitaire. "L'Ile-de-France est passée de 37% de sa population qui vit dans des ZIP en 2018 à 62% aujourd’hui, alors qu'en France c’est plutôt 30% (contre 18% en 2018)", souligne Sophie Martinon, directrice générale adjointe de l’Agence régionale de santé (ARS) Île-de-France.

Les problèmes ont été identifiés : faible recrutement, exigence des jeunes médecins et forte concurrence entre les communes.

L'ARS tente d'enrayer le phénomène en mettant "plus de 20 millions d’euros chaque année sur la table pour accompagner, faciliter, favoriser l’installation des médecins libéraux" en IdF, indique Mme Martinon.

"Nous développons aussi un axe de financement pour les internes et les étudiants en médecine. On paye une partie de leurs études et on les soutient à hauteur de 1 200 euros par mois avec pour contrepartie de s’installer ensuite dans une zone déficitaire, le nombre d’années pendant lesquelles on les a aidés", explique Pierre Ouanhnon, directeur adjoint de l’offre de soins (DOS) à l’ARS.

L'ARS dit également "travailler sur tous les médecins diplômés depuis 10 ans en Île-de-France". "Pour ceux qui ne sont pas installés ou ceux qui n’ont pas encore choisi leur modalité d’exercice (par exemple les remplaçants), on va chercher à les aider, et s’ils ont un projet d’installation en Île-de-France, leur proposer des structures potentielles d’accueil", avance M. Ouanhnon.

Les déserts médicaux pourraient bénéficier de l'année supplémentaire d'études, dite de "consolidation", que les futurs généralistes effectueraient hors de l’hôpital et "en priorité dans des zones sous-dotées", selon un projet du ministère de la Santé.

Une bonne solution selon certains patients, comme Julie Blatanis, 42 ans, assistante maternelle à Vert-le-Grand, qui consulte un médecin en dehors de la commune.

"Si les médecins peuvent finir leurs études dans des petites villes pour voir au plus près le métier déjà, je pense que c’est une très bonne idée", lance-t-elle. Reste à savoir si les futurs généralistes seront sur la même longueur d’onde.

À LIRE AUSSI

Image
Soignants suspendus.
Soignants suspendus : un an de suspension sans salaire depuis le 15 septembre 2021
Mercredi 15 septembre 2021, suite à leur refus de recevoir le vaccin contre le Covid-19, des professionnels de santé - médecins, infirmière, aides-soignants - mais aus...
15 septembre 2022 - 18:50
Société
Image
Pénurie de sage femme et délestage, le cri d'alerte des maternités
Pénurie de sages-femmes et délestage : le cri d'alerte des maternités
Tensions hospitalières, crise de la médecine libérale, manque de personnel soignant… Le système de santé est à bout de souffle ! Face à une pénurie de sages-femmes san...
02 août 2022 - 17:28
Société
Image
Plus de 4.300 lits d'hospitalisation complète ont été fermés en 2021 dans les établissements de
Hôpital : 4 300 lits supprimés en 2021
Plus de 4 300 lits d'hospitalisation complète ont été fermés en 2021 dans les établissements de santé français, qui ont créé dans le même temps 2 700 places d'hospital...
28 septembre 2022 - 10:45
Société

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Les dessins d'ARA

Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.