Impôts - IFI : pourquoi ceux qui vont le payer... débourseront nettement plus que pour l'ISF ?
La loi de Finances pour 2018, autrement dit le premier budget de l'ère Macron, a décidé l'extinction du célèbre ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) pour le substituer par un impôt focalisé sur l'immobilier: l'IFI.
Il ne s'agit pas ici de relancer la question du bien-fondé de cette mesure qui aboutit au fait qu'une veuve disposant d'un appartement parisien de près de 80m2 et d'une petite villa côtière de 100 m2 sera soumise à l'IFI là où un trader de 45 ans disposant de six millions d'euros de patrimoine logés dans un portefeuille financier ne paiera rien. Et que dire des propriétaires forestiers des Landes ou du Morvan... On retrouve là l'obsession de l'économiste Jean Pisani-Ferry qui a murmuré avec insistance à l'oreille du président Macron que "l'immobilier, c'est la rente" et que la théorie du ruissellement (le réinvestissements des liquidités libérées par l'abrogation de l'ISF) allait fonctionner.
Pour l'heure, il parait important de souligner que les assujettis à l'IFI vont payer plus que lorsqu'ils étaient soumis à l'ISF. Tout d'abord, parce que le barème fiscal n'a pas été actualisé et que la hausse notable en 2017 des prix de l'immobilier (5% en moyenne voire jusqu'à 12% dans certains quartiers de Paris, Bordeaux, Montpellier, etc.) va augmenter mécaniquement les valeurs nettes taxables et, bien entendu, le nombre d'assujettis. Il y aura plus de contribuables, année après année, redevables de l'IFI du fait de la dynamique haussière des prix à confronter avec le gel du barème.
Aller plus loin: Taxe d'habitation, ISF, "flat tax"...: les principales mesures du budget 2018
Mais, le diable étant dans les détails, il y a un autre point à souligner. Dans l'ISF il n'était retenu –pour ce qui concerne l'immobilier- que les valeurs des biens et nullement les revenus fonciers issus de ses biens. La documentation officielle de Bercy (voir ici) est formelle: l'évaluation des valeurs soumises à l'IFI connait quelques déductions mais précise: "Au paiement des impôts dus à raison des propriétés concernées (par exemple: taxe foncière). En revanche, les impositions incombant à l'occupant (exemple: taxe d'habitation) ne sont pas déductibles. La part de votre impôt correspondant aux revenus de vos biens immobiliers (exemple: revenus fonciers) n'est pas non plus déductible".
Vous avez bien lu: les revenus fonciers ne sont pas déductibles, ils sont donc intégrés à la base de votre IFI ce qui n'était nullement le cas pour l'ISF. Un propriétaire immobilier devra donc déclarer la valeur de ses biens en y ajoutant les revenus fonciers qui ont été générés. Ceci va altérer de plein fouet les rendements d'un patrimoine qui est déjà victime de l'histoire fiscale. Quittons en effet le barème pour analyser les taux. Ceux-ci n'ont pas été modifiés depuis des années mais avaient été définis et votés au temps d'une inflation à deux chiffres. Le rendement actuel n'a rien à voir avec celui d'il y a quinze ans et évidemment cela influe sur le net à payer.
Voir aussi: Impôts locaux - Comment contester le niveau de sa taxe foncière ou de sa taxe d'habitation?
Certes il reste le plafonnement par lequel votre IFI ne pourra dépasser: "L'impôt sur les revenus de 2017 (prélèvements sociaux et contribution exceptionnelle sur les hauts revenus inclus) ajouté à l'IFI 2018 ne doit pas dépasser 75 % des revenus perçus en 2017. En cas de dépassement, la différence est déduite du montant de l'IFI".
Ce mécanisme du plafonnement est essentiel car contrairement à l'ISF, l'IFI est un impôt complexe à honorer. En effet, si votre revenu net vous oblige à puiser dans votre patrimoine, il est clairement évident que cela est plus complexe en matière immobilière qu'en matière financière. Autrement dit, autrefois, il était loisible de procéder à un rachat ponctuel d'une fraction d'une assurance-vie pour payer "son" ISF. Désormais comment des propriétaires immobiliers procèderont-ils? Un patrimoine de cette nature est par essence non sécable: de surcroît, cela peut facilement enclencher le redoutable hachoir que constitue la taxation sur les plus-values. Au final, il est clair que Bercy a su proposer au législateur un IFI bien plus performant qu'on ne le pense.
Rendez-vous, calculette en mains, au 15 juin prochain pour ceux qui sont concernés et qui pourront constater, chéquier en poche, que l'ISF était plus clément que la nouvelle mouture de l'impôt sur le patrimoine. Evidemment, ce fait incontournable sera nié par d'aucuns qui s'évertueront à vous dire que les riches ne payent plus sur "tout" le reste de leur patrimoine. Ce à quoi, il est aisé de rétorquer que l'on a le droit d'avoir des sentiments, des souvenirs de famille, pour sa résidence principale et/ou secondaire: cette dernière étant actuellement l'objet d'une pression fiscale accrue de la part des mairies!
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