Recul de l'activité économique : Bercy veut croire à ses prévisions de croissance
Pire qu'un coup de mou pour la croissance, un petit trou d'air: l'activité économique a reculé en France au deuxième trimestre pour la première fois depuis l'hiver 2013, compliquant un peu plus la tâche du gouvernement, à quelques jours de la présentation du budget 2017.
Selon l'estimation définitive de l'Institut national de la statistique et des études économiques publiée ce vendredi 23, le produit intérieur brut (PIB) s'est contracté de 0,1% entre avril et juin, contrastant avec la forte croissance du premier trimestre, qui avait atteint 0,7%.
Ce résultat est inférieur au chiffre jusque-là avancé par l'institut, qui faisait état fin août d'une stagnation du produit intérieur brut (0,0%) au deuxième trimestre. Cette révision est principalement due à des corrections techniques, comme "l'actualisation des coefficients de corrections des variations saisonnières", explique l'Insee.
Ce coup d'arrêt "ne remet pas en cause le scénario de croissance de 1,5% pour cette année et l'année prochaine", a indiqué Bercy à l'AFP, soulignant que l'"acquis de croissance" - autrement dit la progression annuelle du PIB en cas de croissance nulle sur les deux derniers trimestres - restait inchangé à 1,1%.
"Symboliquement, le fait d'entrer en territoire négatif est assez fort", estime toutefois Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture économique chez Xerfi. "C'est un signal négatif qui risque de marquer les esprits, notamment chez les acteurs économiques", ajoute-t-il.
Selon l'Insee, ce sont les dépenses de consommation des ménages, moteur traditionnel de la croissance française, qui expliquent en grande partie cette mauvaise passe. Ces dernières, qui avaient connu une forte hausse (+1,1%) au premier trimestre, se sont repliées, à -0,1%, entre avril et juin.
"Il y a eu un triple effet lié aux intempéries, aux grèves et aux attentats, qui a clairement pesé", estime Ludovic Subran, chef économiste de l'assureur Euler Hermes, qui évoque également un effet de réajustement de la production après l'euphorie du premier trimestre.
"L'activité était sans doute repartie trop vite, plus vite en tous cas que la demande. Du coup, les entreprises ont accumulé des stocks, qu'elles ont dû écouler au deuxième trimestre, ce qui a pénalisé la création de valeur", explique-t-il.
Pour Bercy, ce nouvel à-coup représente néanmoins un réel coup dur, à l'heure de boucler le budget 2017. Dans ses prévisions macroéconomiques, le gouvernement, qui prévoit de ramener le déficit public à 2,7% du PIB en 2017, a en effet prévu 1,5% de croissance cette année comme l'an prochain.
"Ca implique d'avoir une croissance soutenue sur les deux derniers trimestres de l'année", de l'ordre de 0,4% pour l'un comme pour l'autre, reconnaît Ludovic Subran, qui juge ces objectifs atteignables.
Selon l'indice PMI publié vendredi par le cabinet Markit, l'activité du secteur privé a nettement progressé en septembre, après une forte hausse en août, pour s'établir à son plus haut niveau depuis 15 mois.
Le "climat des affaires", calculé à partir des réponses des chefs d'entreprise des principaux secteurs d'activité, s'est quant à lui légèrement amélioré, dans l'industrie comme dans les services, selon l'Insee.
"Malgré tout, on voit mal comment on pourrait accrocher les 1,5% de croissance cette l'année", estime Alexandre Mirlicourtois, qui juge les signaux économiques disponibles pour le troisième trimestre "relativement médiocres". "Et si l'on n'a pas 1,5% de croissance à la fin de l'année, il sera difficile d'avoir 1,5% en 2017", faute d'élan pour démarrer l'année, ajoute l'économiste.
Plusieurs nuages se sont en effet accumulés ces derniers mois sur l'horizon de la croissance française, avec les attentats, le recul du commerce mondial mais aussi le vote sur le Brexit. Ce qui a poussé plusieurs institutions à revoir à la baisse leurs hypothèses pour 2017.
Selon l'OCDE, la croissance française devrait atteindre 1,3% seulement l'année prochaine. D'après le Fonds monétaire international (FMI), elle ne devrait pas dépasser 1,2%... Un ralentissement qui pourrait entraîner une nouvelle dégradation du chômage l'an prochain, avec 79.000 personnes sans emploi supplémentaires selon l'Unedic.
"L'élan pris par la croissance va se poursuivre", a assuré de son côté mardi le ministre de l'Economie et des Finances Michel Sapin. En assurant que les prévisions du gouvernement, sur lesquelles sont construites son projet de budget, étaient "sérieuses".
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