UberPop : première journée de procès
Le procès d'Uber France et de deux dirigeants, poursuivis pour l'application controversée de transports payants entre particuliers UberPOP, suspendue depuis le mois de juillet par le géant américain, s'est ouvert ce jeudi 11 février devant le tribunal correctionnel de Paris.
Uber France, son directeur général Thibaud Simphal et le directeur d'Uber pour l'Europe de l'Ouest à l'époque des faits, Pierre-Dimitri Gore-Coty, sont poursuivis notamment pour "organisation illégale d'un système de mise en relation de clients avec des personnes qui se livrent au transport routier de personnes à titre onéreux" sans être une entreprise de transport, un taxi ou un VTC, infraction prévue par la loi Thévenoud du 1er octobre 2014. Le Conseil a confirmé l'interdiction d'UberPop le 22 septembre dernier.
Il est, entre autres, reproché aux prévenus d'avoir mis en relation des clients avec des particuliers, qui utilisent leur véhicule privé pour les transporter sans payer de charges. Uber prenait 20% de commissions sur le prix de la course.
Le premier conducteur UberPOP entendu dans la procédure était un ancien taxi, qui, traversant une mauvaise passe, divorce et difficultés personnelles, avait dû revendre sa licence. Il s'était inscrit sur UberPOP pour éviter de demander le RSA (Revenu de solidarité active), même s'il pensait possible de toucher cette prestation sociale. Selon les éléments de sa déposition, lus par la présidente, Uber indiquait aux chauffeurs qu'il s'agissait d'une activité secondaire.
Des autres éléments de la procédure, il ressort que pour le jour d'une grève des taxis, le 15 décembre 2014, Uber conseillait les conducteurs UberPOP, leur indiquant notamment l'itinéraire des grévistes afin qu'ils puissent l'éviter. Mais aussi, de rester discret en cas de rencontre avec des taxis, en invitant les passagers à prendre place à l'avant de la voiture, en ne mettant pas leur smartphone en évidence. Et en cas de problème, conserver calme et sang froid et alerter la police et porter plainte en cas d'incident.
L'ambiance à l'audience traduit le gouffre. D'un côté, les représentants d'Uber, costume et discours millimétré à la barre, de l'autre, dans le public, des chauffeurs de taxi qui pour certains réagissent parfois sans discrétion pendant les débats.
Autres chefs de poursuites: pratique commerciale trompeuse, Uber se voyant reprocher des publicités qui présentaient à tort UberPOP comme étant licite, et complicité d'exercice illégal de la profession de taxi. Mais aussi, concernant Uber sans se limiter à UberPOP, traitement et conservation illégaux de données informatiques, ainsi qu'enregistrement de données à caractère personnel. En cause, des fichiers des cartes d'identité et permis de conduire des chauffeurs, leurs extraits de casiers judiciaires, ou encore une base de données sur les interpellations des chauffeurs. Parmi les parties civiles, l'Union nationale des taxis (UNT) demande plus de 30 millions d'euros de dommages et intérêts.
Quelques jours après la garde à vue de ses représentants fin juin 2015, Uber avait annoncé le 3 juillet suivant la suspension d'UberPOP, à la grande satisfaction des taxis, qui n'ont eu de cesse de dénoncer une concurrence déloyale.
UberPOP comptait alors plus de 200.000 utilisateurs, 3.000 conducteurs dans six villes de France, selon ses dirigeants. Et depuis la suspension d'UberPOP, ils estiment que les utilisateurs se sont tournés vers la concurrence. Heetch notamment, dont les responsables sont convoqués le 22 juin devant le tribunal.
Uber risque jusqu'à 1,5 million d'euros d'amende, les deux dirigeants jusqu'à cinq ans de prison et 300.000 euros d'amende. Les prévenus plaident la relaxe. Les parties civiles réclament au total près de 150 millions d'euros de dommages et intérêts, selon l'un des avocats de la défense.
Le procès se poursuit vendredi 12. le tribunal devrait mettre son jugement en délibéré. Uber a déjà été condamné à Paris à cause d'UberPOP: le 7 décembre dernier, la cour d'appel a condamné la filiale française à 150.000 euros d'amende pour "pratique commerciale trompeuse", car elle présentait cette offre payante de transport comme du covoiturage.
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