En Afrique du Sud, la guerre contre des chenilles venues d'Amérique

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Par AFP
Publié le 15 février 2017 - 12:57
Mis à jour le 18 février 2017 - 06:00
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Un fermier montre une petite chenille brune sur une feuille de maïs à Onderstepoort, au nord de Pret
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© GULSHAN KHAN / AFP
Un fermier montre une petite chenille brune sur une feuille de maïs à Onderstepoort, au nord de Pretoria, le 14 février 2017 en Afrique du Sud
© GULSHAN KHAN / AFP

C'est une petite chenille brune, qui dévore consciencieusement les feuilles de maïs en laissant derrière elle une pâte gluante. Depuis deux mois, elle dévaste les champs de céréales d'Afrique australe et fait déjà peser la menace de pénuries alimentaires.

Dans leur ferme de Haakdoringboom, à une vingtaine de kilomètres au nord de Pretoria, Adele et son fils Jacques Prinsloo ont déclaré une guerre totale à ces petites bestioles venues d'Amérique du Sud. Jusqu'ici sans grand résultat.

"J'ai essayé tout ce qui était disponible sur le marché. J'ai dépensé 45.000 rands (environ 3.100 euros) rien qu'en pesticides", se désespère Jacques, 24 ans.

"L'an dernier, c'était la sécheresse. Cette année, ce sont les chenilles. Qu'est-ce qui va nous tomber dessus l'année prochaine ? Tout le monde pense que cultiver c'est facile. Ca n'est facile que jusqu'à ce qu'on commence vraiment à s'y mettre"...

Le dépit et l'impuissance de Jacques sont largement partagés dans la région, depuis que la "chenille légionnaire d'automne" a traversé l'Atlantique, très vraisemblablement à la faveur d'importations de plantes, et commencé à faire des ravages dans les champs de céréales africains.

Ceux de Zambie, du Zimbabwe, d'Afrique du Sud et du Ghana ont déjà été largement contaminés. La "peste", comme disent les fermiers, menace aussi le Malawi, le Mozambique et la Namibie.

Contrairement à la chenille processionnaire déjà présente sur le sol africain, sa version sud-américaine ne se contente pas de viser le maïs. Elle s'attaque aussi au blé, au millet ou au riz.

Les dégâts sont donc considérables. Jacques Prinsloo estime que 80 de ses 100 hectares de maïs ont été infestés par l'insecte. Si la totalité venait à l'être, il estime que ses pertes pour l'année pourraient atteindre 700.000 rands (49.000 euros).

Selon sa mère Adele, toutes les exploitations environnantes ont été attaquées par la chenille. "Nous nous battons. Ceux de la ferme voisine aussi se battent", dit-elle.

- 'Désespéré et en colère' -

L'enjeu de cette guerre est crucial. Car cette invasion menace des cultures à la base du régime alimentaire dans une Afrique australe qui souffre en plus d'une de ses pires sécheresses.

Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), près de 40 millions de personnes sont affectées depuis deux ans par le manque de pluies, encore aggravé par l'anomalie climatique El Nino. Ces deux phénomènes conjugués y ont réduit les disponibilités en nourriture de 15%.

Ils constituent "une grave menace à la sécurité alimentaire", a averti le coordinateur régional de l'organisation onusienne, David Phiri, lors d'une réunion d'urgence à Harare.

Face à cette situation, les fermiers se sentent seuls, livrés à eux-mêmes, et regrettent l'absence de soutien de leurs autorités.

"Je suis désespéré, en colère, le coeur brisé. J'ai envie de pleurer et de me laisser mourir", dit Adele Prinsloo. "J'ai investi dans cette activité tant d'argent, tant d'efforts et je ne reçois aucune aide. Comment voulez-vous que j'y arrive ?"

"Je prie pour que quelqu'un veuille bien nous venir en aide", poursuit l'agricultrice, mais "personne ne vient".

La situation est d'autant plus délicate que son exploitation commençait à peine à se remettre d'une précédente saison déjà catastrophique. "Il y a un an, c'était la sécheresse. Mais nous avons depuis eu de bonnes pluies", explique-t-elle, "et maintenant les chenilles détruisent notre récolte..."

Dans un champ, son fils Jacques épluche entre ses doigts les feuilles d'un épi de maïs attaqué par les insectes. Les résidus gluants qui les enduisent sont le signe que la chenille a commencé, de l'intérieur, son lent travail de destruction.

Lui non plus n'entrevoit aucune issue rapide à la crise qui menace son exploitation.

Les plants "ne vont pas produire de maïs à cause des dégâts, les larves continuent à se reproduire et il faut continuer à les combattre", constate-t-il, "les brûler pourrait être notre seule solution".

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