#Metoo : le "début" d'un mouvement prometteur, pour l'icône africaine du féminisme

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Par Lucie PEYTERMANN - Paris (AFP)
Publié le 25 janvier 2018 - 18:02
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La Nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, écrivaine et figure du féminisme en Afrique, lors d'une séance photo à Paris, le 24 janvier 2018
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© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
La Nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, écrivaine et figure du féminisme en Afrique, lors d'une séance photo à Paris, le 24 janvier 2018
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"Il était grand temps" que le scandale mondial du harcèlement sexuel éclate, estime la Nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, écrivaine talentueuse et figure du féminisme en Afrique, où selon elle de plus en plus de femmes revendiquent "avec courage" l'égalité et leurs droits.

Mme Adichie, 40 ans, est l'ambassadrice de l'édition 2018 de la "Nuit des idées", qui consiste en 170 évènements organisés jeudi soir par l'Institut français dans une soixantaine de pays sur le thème de l'"imagination au pouvoir".

Réagissant aux révélations sur le producteur américain Harvey Weinstein, qui ont entraîné une vague internationale de témoignages d'agressions sexistes et sexuelles, l'auteure à la renommée mondiale dit espérer que cette libération de la parole et le mouvement #Metoo soient un "début" prometteur et pas "une mode passagère".

"Pendant trop longtemps, les femmes dans de nombreuses régions du monde ont eu le sentiment qu'elles ne pouvaient pas parler de ces choses-là parce qu'on ne les croirait pas ou parce qu'il y aurait trop de répercussions (graves) pour elles", souligne dans un entretien à l'AFP l'auteure de "L'Autre moitié du soleil", de l'"Hibiscus pourpre" et d'"Americanah", très élégante, rouge à lèvres grenat et yeux charbonneux.

Sa notoriété avait explosé après la diffusion de la vidéo d'une conférence donnée fin 2012 intitulée "Nous sommes tous des féministes", où elle dénonçait, en s'appuyant sur son expérience au Nigeria, les mécanismes de conditionnement et les stéréotypes de genre inculqués dans les familles ou à l'école. Elle exhorte à éduquer garçons et filles "différemment", à "changer les mentalités". Cette vidéo a été vue des millions de fois. Plus récemment, elle a publié "Un manifeste pour une éducation féministe".

L'auteure, qui partage sa vie entre le Nigeria et les Etats-Unis, dénonce inlassablement les inégalités hommes-femmes, le droit pour les jeunes femmes de faire leurs propres choix notamment sur les questions de maternité, de vie de couple, et leur droit à "être ambitieuses et ne pas à avoir à s'excuser pour cela".

Selon elle, le scandale déclenché par l'affaire Weinstein a aussi permis, dans une moindre mesure, de susciter un débat en Afrique et au Nigeria, géant de 190 millions d'habitants encore très conservateur et patriarcal.

- Machisme au quotidien -

"Certaines jeunes femmes ont commencé à révéler certaines de leurs expériences" après l'affaire Weinstein, rapporte Mme Adichie, évoquant le cas d'une Nigériane qui a "balancé" sur les réseaux sociaux le nom du professeur qui l'avait harcelée sexuellement lors de ses études en médecine. "C'est juste une histoire, mais c'est symbolique de ce que tout ce mouvement permet désormais".

Etre féministe en Afrique aujourd'hui, "c'est vouloir aller à l'encontre des usages" et des traditions. "Beaucoup de femmes sur le continent sont pleinement féministes car elles se considèrent à égalité avec les hommes et vont à l'encontre des conventions, en étant mères célibataires, en quittant un mari violent malgré les pressions familiales, en se battant pour changer des pratiques culturelles négatives".

Mme Adichie salue également le combat de Nigérianes pour que leurs compatriotes puissent aller à l'école dans tout le pays, même dans les régions ravagées par le groupe jihadiste Boko Haram. Elle trouve "formidable" la multiplication sur les réseaux sociaux dans son pays de forums dénonçant le machisme au quotidien ou "les propositions indécentes lors d'entretiens d'embauche".

Interrogée sur le sort de milliers de migrantes nigérianes qui quittent le pays clandestinement pour l'Europe où elles sont souvent livrées à des réseaux de prostitution, elle estime que la solution serait de "faire du Nigeria un endroit (plus) vivable" et "de donner des perspectives de vie" à ces jeunes femmes.

"Elles n'entament pas ce terrible voyage et ne finissent pas par se prostituer parce qu'elles en ont envie, elles partent parce qu'elles sont à la recherche d'un avenir meilleur !", lance Mme Adichie, plaidant "pour un traitement plus humain des migrants" et "une contextualisation historique" du débat sur la migration.

"Beaucoup d'Européens sont allés en Afrique illégalement par le passé, et ils y ont pris ce qu'ils voulaient..., et maintenant des citoyens du continent veulent à leur tour venir en Europe pour y trouver un avenir meilleur, c'est simplement le cycle de l'Histoire", conclut-elle.

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