Loi Travail : le projet a entamé son marathon parlementaire à l'Assemblée
Le très contesté projet de loi réformant le droit du travail a entamé ce mardi 3 son marathon parlementaire à l'Assemblée, François Hollande vantant un "texte de progrès", alors que la pression d'une partie de la majorité, dans la foulée de la rue, laisse planer la menace du 49.3. Le président de la République a défendu à la mi-journée "un compromis dynamique et juste" pendant que salariés, syndicats et participants à "Nuit debout" étaient toujours mobilisés, jusqu'aux abords du Palais-Bourbon. Peu après, la ministre du Travail a ouvert les débats, après quatre journées nationales de mobilisation, le 1er mai et le mouvement "Nuit debout" depuis plus d'un mois, disant vouloir faire "du bien" au pays avec un projet "de progrès", "juste et nécessaire". Se plaçant dans le "sillon politique et culturel" des lois Auroux de 1982, Myriam El Khomri s'est décrite en "femme de gauche" ne trahissant pas ses convictions.
Les débats sont programmés jusqu'au 12 mai sur quelque 5.000 amendements (près de la moitié du Front de gauche), quasiment autant que pour l'épique bataille sur la loi sur le mariage pour tous. Le vote global est prévu le 17. A l'appel de la CFE-CGC (réformiste), d'un côté, et des syndicats contestataires (CGT, FO, FSU et Solidaires), accompagnés de représentants des étudiants et lycéens, des rassemblements ont été organisés non loin de l'hémicycle. Environ 1.500 personnes, selon la police, ont manifesté aux Invalides pour demander aux députés de "prendre leurs responsabilités".
Depuis le matin et un sit-in de Nuit debout, les abords de la chambre basse étaient sous haute surveillance, un député LR évoquant sur Twitter des allures de "camp retranché". Hasard du calendrier, ce 3 mai marque les 80 ans du Front populaire. Jean-Claude Mailly (FO) a appelé l'exécutif à ne pas "trahir" un de ses héritages en "flinguant la négociation de branche". Côté patronat, Pierre Gattaz (Medef) a menacé de se retirer de la négociation sur l'assurance chômage si "rien ne bougeait". Le texte a été remanié avant même sa présentation, reportée de deux semaines, en conseil des ministres en mars, puis amendé en commission.
Primauté de l'accord d'entreprise en matière de temps de travail, nouvelles modalités pour les licenciements économiques ou les référendums d'entreprises ou encore création du Compte personnel d'activité: les 54 articles font l'objet de milliers d'amendements. Une volonté d'"obstruction", a critiqué le chef de file des socialistes Bruno Le Roux. Les parlementaires LR défendent un retour à la version initiale, jugeant le texte désormais "édulcoré". Le président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde a aussi confirmé ce mardi que désormais les centristes voteraient contre.
A gauche, le rapporteur Christophe Sirugue (PS) a jugé possible que le "déficit" de quelque 40 voix pour une majorité, évoqué la veille en citant les "frondeurs" socialistes, mais aussi "les opposants +de bonne foi+" dans la majorité, soit en train de se "résorber" avec la suite du travail pour "rééquilibrer le texte". D'où des amendements sur le périmètre d'appréciation des difficultés économiques d'une multinationale (international et non national) ou sur les accords d'entreprise. Devant un groupe socialiste à l'ambiance "un peu tendue" ce mardi matin, Manuel Valls a tenté de convaincre les hésitants. "Nous avons conclu un accord avec les syndicats réformistes! Il faut en tenir compte", a-t-il notamment plaidé.
Le groupe PS, qui n'a pas seul la majorité absolue, peut compter sur des radicaux de gauche et écologistes réformistes. Mais écologistes contestataires, Front de Gauche et surtout une majorité des LR et UDI vont probablement voter contre l'une des dernières grandes réformes du quinquennat. L'exécutif pourrait donc recourir à l'article 49.3, comme en 2015, pour faire passer sans vote la loi Macron. Ce "n'est pas un choix que nous privilégions", a cependant assuré Manuel Valls.
Le texte devait être soumis à un premier test avec un vote sur les motions de rejet et de renvoi en commission des députés Les Républicains. Une première motion a été rejetée en fin d'après-midi. Jean-François Copé, qui défendait la motion de rejet, a dénoncé les "reculades" du gouvernement aboutissant à une "loi CGT, Unef, +Nuit debout+" qui "rigidifie" le Code du travail. Le Front de gauche a indiqué qu'il voterait ces motions, tandis que les écologistes contestataires voteront le seul renvoi en commission. La majorité des "frondeurs" ne devraient pas les voter.
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