Loi Travail : manifestation inédite des forces de l'ordre contre "la haine anti-flic"
Les puissants syndicats de police ont appelé les policiers, hors service et en civil, à des rassemblements statiques dans une soixantaine de villes. Le plus important a lieu sur la très symbolique place de la République à Paris, où se réunit chaque soir depuis fin mars le mouvement citoyen Nuit debout.
Signe des tensions actuelles, des collectifs qui dénoncent les violences policières appelaient aussi à manifester sur cette place emblématique de la capitale, juste avant le rassemblement des syndicats de police. Mais les autorités ont finalement interdit la contre-manifestation du collectif "Urgence, notre police assassine".
Les syndicats policiers disent répondre aux attentes de leurs collègues engagés dans le maintien de l'ordre depuis le début des manifestations, au cours desquelles plus de 350 membres des forces de l'ordre ont été blessés, selon les autorités. Onze d'entre eux l'ont encore été lors d'incidents au cours de la mobilisation de mardi, a affirmé le ministère de l'Intérieur.
"On peut comprendre que ces forces de l'ordre soient un peu exaspérées", a commenté mercredi le directeur général de la Police nationale Jean-Marc Falcone sur Europe 1, évoquant des fonctionnaires qui "se font agresser verbalement et physiquement" lors des manifestations alors qu'"ils sont soumis à une grosse pression depuis les attentats de janvier 2015".
Des accusations de "violences" ont été portées contre eux et des slogans tel "Tout le monde déteste la police" ont fait florès. Un jeune homme a perdu l'usage d'un oeil après avoir été blessé fin avril à Rennes. Une trentaine d'enquêtes de la "police des polices" (IGPN) portant sur de présumées violences policières ont été ouvertes en France, et plusieurs responsables politiques de gauche et syndicaux ont mis en cause le gouvernement dans sa gestion du maintien de l'ordre.
Applaudie au lendemain des attentats de janvier 2015, la police jouit pourtant toujours d'une "image exceptionnelle" avec 82% des Français qui en ont une bonne opinion, selon un sondage Odoxa pour Le Parisien.
Les tensions se sont cristallisées autour d'affiches d'un syndicat de la CGT qui épinglent ces violences policières: outrés, les syndicats de police demandent au ministre de l'Intérieur de déposer plainte et nient toute violence, se disant "usés" par l'état d'urgence instauré après les attentats du 13 novembre.
Ils en appellent au "soutien" de la population et du gouvernement auquel ils réclament la "fermeté" face aux "casseurs" accusés de vouloir s'en prendre délibérément aux forces de l'ordre en marge des manifestions contre la loi El Khomri.
"Je n'ai jamais vu ça", a raconté à l'AFP Arnaud, CRS depuis vingt ans. "Les +casseurs+ (...) sont parfaitement organisés, ramassent tout ce qu'ils trouvent et nous canardent. Sans piller, pour casser et casser du flic."
Les syndicats de police n'ont pas caché leur satisfaction après la mise en examen samedi d'un lycéen, mis en cause dans l'agression d'un policier à Nantes le 3 mai. Ils ont aussi salué la décision d'interdire de manifestation des militants antifascistes - même si la justice administrative a finalement suspendu mardi plusieurs arrêtés préfectoraux.
Les responsables syndicaux policiers veulent éviter toute "récupération politique" des rassemblements, de nombreux hommes politiques ayant annoncé leur venue. Ce sera le cas du député Les Républicains Eric Ciotti qui a pointé du doigt mercredi sur RTL "des manifestants professionnels animés par cette haine du flic".
"Ils seront là comme citoyens, pour dire +on aime la police+, pas plus", a assuré Jean-Claude Delage, le patron d'Alliance, premier syndicat de gardiens de la paix, à l'initiative de ce mouvement inédit.
Face à l'exaspération des policiers, François Hollande a prévenu mardi les "casseurs": "ça suffit et ça ne pourra pas rester sans réponse".
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