SNCF - 35,4% de grévistes : une mobilisation historique ou décevante ?
La direction de la SNCF a annoncé ce jeudi 22 un chiffre de 35,4% de grévistes au niveau national. Il s'agit selon elle d'un "décompte réel à partir des prises de service", de quoi contester à l'avance un éventuel chiffre dissonant de la part des syndicats.
Car la mobilisation pour cette journée est un élément important de ce conflit social inscrit dans un schéma très différent de celui des précédentes décennies.
Le chiffre de 35,4% n'a en effet rien à voir avec celui des grandes grèves de 1995 ou de 1997. Entre 60% et 70% des salariés avaient alors cessé le travail. Certains parlent déjà d'une mobilisation "historique" quand d'autres parlent d'échec.
La mobilisation des cheminots est en effet nettement à la baisse ces dernières années. Mais elle est pourtant plus importante ce jeudi qu'en juin 2014 (27,64%). De plus, avec la grève par "session" de deux jours sur cinq, les syndicats ont inauguré une nouvelle forme de grogne sociale qui s'étendra sur trois mois. De quoi largement relativiser la portée de la mobilisation de ce jeudi.
Lire aussi: Réforme de la SNCF: une grève serait injustifiée pour la majorité des Français
Il peut également être plus difficile de mobiliser en 2018 qu'en 1995. Les effectifs de l'établissement public ont en effet évolué. Rien qu'entre 2010 et 2016, le nombre de cadres -traditionnellement moins enclins à défiler- a grimpé pour passer à 31.000 au lieu de 4.000 six ans plus tôt. Dans le même temps, le nombre d'agents de maîtrise et de simples exécutants "roulants" ou "sédentaires" a baissé de près de 10.000 personnes pour arriver à 125.000.
La mobilisation est également plus complexe du fait de syndicats plus divisés. En 1996, la CGT représentait à elle seule près de la moitié (46,5%) des élus syndicaux et la CFDT plus de 20%. Dix ans plus tard, aucun syndicat ne représentait plus d'un tiers des salariés.
Mais surtout, le soutien de l'opinion n'est plus le même aujourd'hui. Près de six Français sur dix (58%) estiment que la mobilisation sociale envisagée par les syndicats est injustifiée quand il les soutenaient majoritairement en 1995.
Difficile donc d'accorder si tôt une valeur aux chiffres de la mobilisation, d'autant plus qu'on ne connaît pas encore son impact sur l'opinion des voyageurs: "Si la grève dure, d'un côté elle peut exacerber le mécontentement des usagers, mais d'un autre côté elle est l'occasion d'un débat et, à ce moment-là, une argumentation peut être entendue. Et quand la grève se prolonge, l'obstination des gouvernants ou des dirigeants de la compagnie peut aussi être mise en cause", résume ainsi Michel Pigenet, historien spécialiste des mouvements sociaux.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.