Violences et interpellations lors des manifestations contre la loi travail
Les manifestations contre le projet de loi travail, présenté en Conseil des ministres, ont rassemblé ce jeudi 24 plusieurs milliers de jeunes et salariés en France, dégénérant en violences notamment à Nantes et à Paris, où plus de vingt personnes ont été interpellées.
Contre le texte de Myriam El Khomri, jugé trop favorable au patronat, de nouveaux défilés avaient lieu à Paris, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Grenoble ou encore Besançon, à l'appel de sept syndicats et organisations de jeunes (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL et Fidl). Toutefois, la mobilisation semblait moins importante que la semaine dernière.
A Paris, la manifestation a dégénéré, avec deux voitures incendiées et 15 personnes interpellées en marge du cortège, a-t-on appris de source policière. Deux policiers ont également été blessés. Par ailleurs, l'inspection générale de la police nationale (IGPN), la "police des polices", a ouvert une enquête après la diffusion sur les réseaux sociaux d'une vidéo montrant un policier frappant un jeune.
Pour la ministre du Travail, Myriam El Khomri, ce projet est "un nouvel élan pour la démocratie sociale". Le Premier ministre Manuel Valls, lui, vante une réforme "intelligente, audacieuse et nécessaire", qui doit répondre au chômage de masse (3,5 millions de personnes sans emploi).
Mais même modifié, ce texte continue de susciter une vive opposition.
A Nantes, des incidents ont opposé les forces de l'ordre à des manifestants cagoulés lors d'un défilé de plusieurs milliers de personnes. Au moins neuf personnes ont été interpellées. Des incidents ont également eu lieu à Rouen. A Marseille, sur les banderoles, les lycéens avaient écrit: "Un grand bond en avant vers le 19e siècle".
Dans la capitale, le principal bâtiment de Sciences Po était bloqué, comme plusieurs lycées. Une manifestation à Paris a réuni des milliers de personnes. "Je suis là pour dénoncer le symptôme d'une évolution néolibéraliste de la société", a expliqué Mathieu, 27 ans. "C'est une orientation de la société que je refuse".
Olivier Besancenot (NPA), Jean-Claude Mailly (FO) et Bernadette Groison (FSU) faisaient partie du cortège. "Quand je vois les sondages qui disent qu'une majorité de Français sont opposés à cette loi, on ne peut parler d'un essoufflement du mouvement", a affirmé Mme Groison.
Des grèves et manifestations sont prévues le 31 mars et les sept syndicats promettent une "grosse mobilisation", plus importante que celle du 9 mars, qui avait rassemblé entre 200.000 et 450.000 personnes dans l'Hexagone.
Le projet El Khomri "visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs" comprend de nouveaux droits, dont le compte personnel d'activité (CPA), des moyens syndicaux accrus ou l'extension de la garantie jeunes.
Il met également en place le référendum en entreprise, fait évoluer les règles de la représentativité patronale, du licenciement économique, de la médecine du travail. Il réécrit intégralement la partie du code du travail relative au temps de travail, donnant plus de place à l'accord d'entreprise.
Cette réforme, vraisemblablement la dernière du quinquennat, a été partiellement remaniée après la bronca politique, syndicale et de jeunes, qui y ont vu un texte trop libéral et peu sécurisant pour le salarié : grèves, manifestations, pétition record, tribune incendiaire de Martine Aubry, réunions PS électriques ont jalonné son parcours.
Désormais, il n'est plus question de plafonner les indemnités prud'homales pour les licenciements abusifs, au grand dam du patronat, ni d'autoriser des décisions unilatérales de l'employeur sans accord dans les entreprises de moins de 50 salariés pour le forfait-jour ou les astreintes.
Ces modifications ont permis à l'exécutif d'obtenir les soutiens précieux des syndicats dits "réformistes" (CFDT, CFE-CGC, CFTC, Unsa), ainsi que de la majorité. Mais les "réformistes" escomptent des améliorations, notamment concernant les licenciements économiques. Et les frondeurs, qui promettent "une bataille parlementaire extrêmement ferme", viennent de présenter une "contre-réforme".
Pour compliquer la tâche de l'exécutif, si le patronat semblait acquis à la version initiale, il critique vertement la nouvelle: sept organisations, dont le Medef, la CGPME et la FNSEA, ont lancé mardi 22 un "appel solennel" au Premier ministre afin que le texte "retrouve son objectif d'origine: créer de l'emploi".
Le texte sera examiné en commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale à partir du 5 avril, puis dans l'hémicycle fin avril-début mai.
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