Plus de 3.800 morts selon les autorités et 10.000 disparus selon la Croix-Rouge dans la ville de Derna à l’est de la Libye, ravagée par le cyclone Daniel
CYCLONE - C’est la pire catastrophe naturelle en Libye depuis le tremblement de terre de 1963 qui avait détruit la majeure partie de la ville d'al-Marj (au nord-est). Le passage du cyclone Daniel sur l’est de ce pays nord-africain a fait plus de 3.800 décès, selon un bilan des autorités mercredi. La ville côtière de Derna (900 km à l’est de Tripoli) est la plus touchée, ravagée et ensevelie sous de puissants torrents après la rupture de deux barrages. La Croix-Rouge évoque 10.000 disparus et un nombre "énorme" de morts dans cette ancienne capitale de la province de Cyrénaïque tandis que l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) parle de 30.000 personnes déplacées.
Après avoir frappé la Turquie, la Grèce et la Bulgarie, le cyclone subtropical méditerranéen Daniel, qualifié de phénomène "extrême en termes de quantité d’eau tombée", a atteint dimanche après-midi la côte orientale de la Libye. La métropole de Benghazi, deuxième ville du pays après la capitale Tripoli, était la première touchée avant que le cyclone ne se dirige vers les villes de Djebel Akhdar, Shahat, Al-Marj, El Beïda et Soussa, situées à l’Est.
Mais les images les plus dramatiques proviennent de Derna, la ville la plus dévastée. Le cyclone a fait rompre deux barrages dans la nuit de dimanche à lundi. Des ponts ont été détruits et des quartiers entièrement emportés par les puissants torrents vers la mer Méditerranée. Sur les réseaux sociaux, les vidéos montrent les éboulements de terrain et l’ampleur des dégâts qui ont bloqué les routes. Sur les sept entrées de Derna, une ville de plus de 100.000 habitants traversée par un oued, seulement deux situées au Sud étaient accessibles pour les secours et l’armée.
10.000 disparus selon la Croix-Rouge
Pour sauver leurs proches ou récupérer leurs corps enterrés par dizaines sous des décombres boueux, les habitants de la ville côtière se sont adaptés selon leurs moyens, très rudimentaires. Selon les chiffres communiqués mardi 12 septembre par le gouvernement de Tripoli, reconnu par l’ONU, plus de 2.300 personnes sont décédées, près de 5.000 étaient toujours portées disparues et environ 7.000 ont été blessées. Le bilan a été porté mercredi 13 septembre à 3.800 morts, dont plus de 3.000 déjà enterrées. Le blocage des accès à cette ville fait aussi planer les incertitudes quant au nombre exact des victimes.
🚨🇱🇾 | 🌍 International
— Saudi News FR (@SaudiNewsFR) September 13, 2023
📹 On aurait dit une scène de guerre mais non, ce n'est que ce "qui reste" d'une partie de #Derna (#Libye) pic.twitter.com/y5fe6moNKb
La Croix-Rouge parle de 10.000 disparus, craignant un nombre massif de morts. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé hier qu’au moins 30.000 personnes de Derna ont été déplacées. 3.000 habitants d’El Beïda et 2.000 habitants de Benghazi ont également quitté leurs localités, toujours selon l’OIM.
Le gouvernement parallèle de la Libye, nommé par le Parlement et installé dans l’est du pays, a déclaré Derna "ville sinistrée". Le conseil municipal a qualifié la situation de "catastrophique", "hors de contrôle" qui nécessite une "intervention nationale et internationale".
La France envoie un hôpital de campagne
Plusieurs pays se sont vite mobilisés pour venir en aide à la Libye. La France a annoncé mardi l’envoi dans les "24 à 48 heures" d’un hôpital de campagne et d'équipes d'urgence pour secourir les populations locales. Il s’agit d’une cinquantaine de personnels civils et militaires qui peuvent traiter "500 personnes par jour", a indiqué l’Élysée. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a précisé que "les premiers personnels partiront dès mardi soir afin que tout soit opérationnel sous 48 heures". L’avion français transportant une quarantaine de sauveteurs et plusieurs tonnes de matériel sanitaire n’a finalement décollé que mercredi après-midi de la base militaire d’Istres (Bouches-du-Rhône).
À la suite des dramatiques inondations en Libye, nous engageons, à la demande du Président de la République, l’hôpital de campagne de la sécurité civile (ESCRIM). Les premiers personnels partiront dès ce soir afin que tout soit opérationnel sous 48h.
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) September 12, 2023
La Turquie et les Émirats arabes unis ont dépêché des équipes de secouristes, déjà arrivées sur les lieux. L’Algérie a fait part de l’envoi d’une "importante aide humanitaire" composée de produits alimentaires et médicaux, de tentes et de vêtements, à bord de huit avions militaires. L’Égypte a envoyé trois avions d’aide ainsi que des équipes de recherche et de sauvetage. Le Qatar a contribué à cette aide humanitaire avec un autre hôpital de campagne, transféré par avion.
En dehors des pays de la région Afrique du Nord-Moyen Orient, les États-Unis ont déclaré qu’un "fonds d’urgence aux organisations de secours" a été envoyé. Vladimir Poutine a affirmé que la Russie était prête "à fournir l’assistance nécessaire" tandis que l’Union européenne a activé le mécanisme de protection civile. "L’aide offerte par l’Allemagne, la Roumanie et la Finlande est en route. La mobilisation de la Commission continue", a tweeté un porte-parole de l’exécutif européen, Balazs Ujvari.
Le gouvernement de Tripoli a de son côté annoncé l’envoi de deux avions-ambulance et d’un hélicoptère, de 87 médecins, d’une équipe de secouristes et de recherche cynophile. Des techniciens de la Compagnie nationale d’électricité ont également été dépêchés pour tenter de rétablir rapidement le courant, qui a été coupé.
Si des experts expliquent la puissance de la tempête Daniel par la température des eaux de surface de la Méditerranée orientale et de l’Atlantique, "2 à 3°C plus chaudes que d’habitude", d’autres soulignent les conséquences du chaos politique qui règne en Libye pour comprendre la raison du très lourd bilan : la division du pays entre deux gouvernements limite les capacités de prévention, de prévision, de systèmes d’alerte et d’évacuation en cas de catastrophe naturelle. "Des facteurs sociaux, politiques et économiques déterminent qui et où on est le plus exposé" aux catastrophes naturelles, estime Leslie Mabon, maître de conférences à l'Open University du Royaume-Uni.
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