Frères El Bakraoui, testament et bilan : ce mercredi, le "jour d'après" les attentats à Bruxelles
La Belgique a entamé ce mercredi 23 son deuil des 31 morts et 270 blessés des attentats de Bruxelles, auxquels ont participé deux frères kamikazes liés aux attaques de novembre à Paris.
Vingt-quatre heures après ces attentats revendiqués par l'organisation Etat islamique qui ont semé la panique mardi 22 au matin à l'aéroport de Bruxelles puis à la station de métro Maelbeek, en plein quartier européen, la difficulté à identifier les victimes alimentait toutes les craintes de leurs familles.
A l'hôpital bruxellois Erasme, qui a recueilli 16 victimes, le chef du service des soins intensifs, Jacques Creteur, a découvert, après ses collègues parisiens en novembre, "une traumatologie de guerre", avec des "membres arrachés, des impacts de débris de verre (...) des traumatismes cérébraux, lésions vasculaires, fractures".
Une minute de silence à midi a été suivie par des milliers de Bruxellois, notamment sur la place de la Bourse devenue un lieu d'hommages aux victimes. "Nous sommes plus forts que les terroristes. Nous voulons montrer à tout le monde qu'il y a de l'espoir", témoigne Mila Letombe, lycéenne de 15 ans.
Lors d'une conférence presse, le procureur Frédéric Van Leeuw a confirmé que deux des auteurs des attentats étaient les frères Khalid et Ibrahim El Bakraoui, recherchés pour leurs liens avec les attentats du 13 novembre à Paris. Ibrahim, 29 ans, est l'un des deux kamikazes à l'origine de deux explosions qui se sont succédé à 7h58, à quelques secondes d'intervalle, dans le hall de départ de l'aéroport international. Sur la photo captée par les caméras de vidéosurveillance de l'aéroport et diffusée mardi, c'est l'homme au milieu des deux autres qui poussent des chariots à bagages.
"Le second kamikaze, à gauche sur la photo, n'a pas encore été identifié", a précisé le procureur. "Le troisième suspect, vêtu d'une veste claire et portant un chapeau", est en fuite, a-t-il ajouté. "Son sac contenait la charge la plus importante". Elle a explosé plus tard que prévu "après l'arrivée du service de déminage", sans faire de victimes.
Une opération de police était en cours ce mercredi dans le quartier populaire d'Anderlecht, selon des journalistes de l'AFP.
Le frère d'Ibrahim, Khalid 27 ans, a lui été reconnu comme le kamizake qui a attaqué en pleine heure de pointe la station de métro Maalbeek, selon M. Van Leeuw. Les frères El Bakraoui étaient connus des services de police pour des vols avec violences et braquages. Khalid aurait loué sous un faux nom une planque à Charleroi d'où sont partis une partie des commandos du 13 novembre, et un appartement de la commune bruxelloise de Forest, où une perquisition de routine le 15 mars avait permis de retrouver la trace de Salah Abdeslam. Ce dernier a ensuite été capturé vendredi dans la commune bruxelloise de Molenbeek après quatre mois de cavale.
La participation des frères El Bakraoui aux attentats de Bruxelles établit un lien direct entre le réseau à l'origine des attentats de Paris (130 morts) et ceux de mardi à Bruxelles, les plus meurtriers jamais commis dans la capitale belge et européenne. Elle renforce les inquiétudes sur la capacité des réseaux djihadistes belges à continuer à mener des attentats sanglants malgré le renforcement des mesures de sécurité à travers l'Europe et la pression policière considérablement renforcée depuis les attentats de Paris. Une réunion extraordinaire des ministres européens de l'Intérieur et de la Justice a ainsi été annoncée pour jeudi 24.
D'autant que, selon le procureur, la perquisition de l'appartement de Schaerbeek d'où sont partis les trois assaillants de l'aéroport, a permis de retrouver un véritable atelier de fabrication de bombes: "15 kilos d'explosifs de type TATP, 150 litres d'acétone, 30 litres d'eau oxygénée, des détonateurs et une valise remplie de clous et de vis ainsi que du matériel destiné à confectionner des engins explosifs". C'est dans une poubelle de cette rue que les enquêteurs ont retrouvé un ordinateur contenant un message "testament" d'Ibrahim El Bakraoui, selon le procureur.
Il y déclare "ne plus savoir quoi faire", "être recherché de partout". Il semble avertir des complices que "s'ils s'éternisent, ils risquent de terminer à coté de lui". Une apparente allusion à Salah Abdeslam, incarcéré à Bruges dans l'attente d'un transfèrement réclamé par Paris. C'est le chauffeur de taxi qui a conduit les trois hommes à l'aéroport qui a mené la police jusqu'à cet appartement.
La Turquie a annoncé que l'un de ces trois hommes, sans préciser lequel, avait été arrêté en juin 2015 dans le sud de la Turquie, expulsé vers la Belgique puis remis en liberté par les Belges. Selon la chaîne NTV, il s'agirait d'Ibrahim El Bakraoui.
Alors que le procureur a établit le bilan à 31 morts et 270 blessés, puis 300 blessés, dont 150 toujours hospitalisés ce mercredi soir, le gouvernement estime que, dans cette ville cosmopolite, "probablement plus de 40 nationalités" ont été touchées. Une Péruvienne, une Marocaine et un étudiant belge sont décédés, tandis que dix Français, deux Britanniques et trois Américains ont été blessés, selon des données encore provisoires.
Alors que débutaient trois jours de deuil national, le couple royal, Philippe et Mathilde, ont marqué la minute de silence aux côtés du Premier ministre Charles Michel au cœur du quartier européen, sous les applaudissements. Son homologue français, Manuel Valls, a lui déposé une gerbe à la station Maelbeek.
La Pologne en revanche a invoqué ces attentats pour annoncer son refus d'accueillir le moindre migrant.
Le secrétaire d'Etat américain John Kerry sera vendredi à Bruxelles pour "exprimer formellement les condoléances" de son pays. Il s'est efforcé d'apaiser une polémique naissante sur l'efficacité des enquêteurs belges, assurant "n'avoir jamais ressenti la moindre naïveté et le moindre angélisme de nos amis belges".
L'aéroport de la capitale devait rester fermé encore au moins jeudi. Onze stations de métro -sur une soixantaine- ont rouvert ce mercredi matin sous la surveillance de soldats mais étaient beaucoup moins fréquentées que d'habitude. "Je prends le métro (...) je ne vais pas abandonner mon mode de vie pour un connard qui se fait exploser", déclarait un jeune employé prénommé Vasco, arrivé en train depuis Enghien à 30 kilomètres de Bruxelles. "Dans le train, il y avait des gens qui blaguaient sur ce qui s'est passé hier. C'est le surréalisme belge, ça ne mourra pas", sourit-il.
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