Mort de Chaolin Zhang : la communauté chinoise manifeste contre l'insécurité
Des milliers de manifestants vêtus de T-shirts blancs, une marée de drapeaux bleu-blanc-rouge et une revendication, la "sécurité" : la communauté chinoise, jeunesse en tête, s'est mobilisée en masse dimanche 4 à Paris, excédée après l'agression mortelle d'un père de famille. Avant de quitter la place de la République, le cortège - 13.500 à 14.000 personnes selon la police, 100.000 selon les organisateurs - a observé une minute de silence en mémoire de Zang Chaolin, un couturier de 49 ans décédé en août après avoir été agressé à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Trois jeunes, soupçonnés d'avoir voulu voler le sac de son ami, ont été incarcérés mercredi.
"Il était venu en France chercher une vie meilleure, la liberté, l'égalité, la fraternité. Il a trouvé la violence et l'insécurité. Ces voyous ont détruit notre confiance en la France : faisons entendre notre voix, notre Marseillaise", a lancé en mandarin à la tribune Chi Wan Sheng, président de l'association des Chinois résidents en France. Des membres de la communauté chinoise manifestent pour réclamer "la sécurité pour tous" et dénoncer le "racisme anti-asiatique", le 4 septembre 2016 à Paris Sur Twitter, le Premier ministre Manuel Valls a assuré "nos compatriotes d'origine asiatique" de son "soutien total", jugeant "insupportables" les violences qui les visent. Parmi la foule figuraient des élus dont Bruno Julliard, premier adjoint à la maire de Paris, Stéphane Troussel, président PS du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, ou encore la présidente LR du conseil régional d'Ile-de-France Valérie Pécresse.
Déplorant "les préjugés racistes" selon lesquels "les Chinois seraient plus riches", la présidente de la Région a promis des "preuves d'amour" à cette communauté victime de nombreuses agressions en Ile-de-France. Elle s'est notamment engagée à développer la vidéoprotection, et annoncé une convention État-Région qui sera dévoilée la semaine prochaine par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. Des membres de la communauté chinoise manifestent pour réclamer "la sécurité pour tous" et dénoncer le "racisme anti-asiatique", le 4 septembre 2016 à Paris
Après la diffusion sur un écran géant d'un clip où l'actrice Josiane Balasko dénonce "les préjugés qui tuent", les manifestants ont pris la direction de la place de la Bastille, dans un cortège organisé au cordeau : T-shirts frappés du slogan du collectif à l'origine de la mobilisation - "Sécurité pour tous"- distribués par milliers, imposant service d'ordre, défilé mené par des groupes de jeunes juchés sur des camions. "Sécurité pour tous" avait déjà rassemblé plusieurs milliers de personnes en 2010 et 2011 dans le quartier parisien de Belleville. La mobilisation, déclenchée par une agression lors d'un banquet de mariage, avait été marquée par des échauffourées.
Une mobilisation inédite dans cette communauté de quelques 300.000 personnes, arrivées en immense majorité dans les années 1980, selon le sociologue spécialiste de la Chine, Richard Beraha. Suna Chen et son compagnon, Le Xu, tous deux âgés de 38 ans, se sont déplacés dimanche pour dire "aux politiciens" leur "colère". Arrivé en France voilà trente ans, le couple décrit "une insécurité grandissante depuis quelques années". "Dans la communauté asiatique, on est ciblés car on est des proies faciles : on a des petites carrures et puis on est discrets, on ne porte souvent pas plainte, alors il n'y a pas de retombées", analyse Le Xu. Dans le ciel, d'énormes ballons blancs interrogent "Doit-on se faire justice soi-même?" et mettent en cause une "justice laxiste".
"Ils ont réussi à fédérer toute l'Ile-de-France, cela démontre bien l'ampleur d'un phénomène d'insécurité : depuis fin 2015, à Aubervilliers, on a entre 5 et 10 vols avec agression par semaine", estime François Ormillien, avocat de l'association d'amitié franco-chinoise d'Aubervilliers, première plateforme d'import-export de textile d'Europe. Le collectif pointe le climat de peur et d'insécurité qui règne, à Aubervilliers mais aussi dans la commune voisine de la Courneuve et dans certains quartiers de Paris. Il met en cause les "autorités" qui "ont préféré fermer les yeux" parce que les "Asiatiques constituent la cible principale de ces agresseurs". Ses revendications: des effectifs policiers supplémentaires, des caméras de surveillance et la reconnaissance du racisme anti-asiatique. Venu de Seine-Saint-Denis, Alexandre, 26 ans, raconte que, ces dernières années, beaucoup de membres de sa famille ont été victimes d'agressions, à Bobigny ou Aubervilliers. "ll y a une montée en tension mais, dans la culture asiatique, on ne fait pas de vagues", dit-il. "Alors c'est bien de voir que les gens peuvent se mobiliser autant".
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