Conflits d'intérêts en santé : les obligations de transparence "renforcées"
Les professionnels de santé devront rendre publiques davantage d'informations concernant leurs liens avec les entreprises de produits de santé, selon un décret paru ce vendredi 30, qui "renforce" les dispositions prises en 2014 pour prévenir les conflits d'intérêts, après le scandale du Mediator.
"Les montants des conventions signées entre les acteurs du système de santé et les industriels devront être publiés" sur le portail , à partir d'un seuil de 10 euros, et une "rubrique dédiée" permettra d'accéder plus facilement aux rémunérations perçues dans le cadre de ces conventions", à partir du 1er avril, informe le ministère de la Santé dans un communiqué.
Ce site a été mis en place en juin 2014 pour recenser les liens d'intérêts entre les acteurs du système de santé - professionnels de santé, mais aussi associations d'usagers, établissements hospitaliers, organismes de conseil et médias - et les entreprises qui fabriquent ou commercialisent des produits de santé (laboratoires pharmaceutiques, fabricants de dispositifs médicaux, entreprises de cosmétiques, etc.).
Cette décision avait été prise après le scandale sanitaire du Mediator, qui avait mis en lumière les conflits d'intérêts entre des membres des autorités de santé et l'industrie pharmaceutique. Le site internet prenait jusqu'ici en compte les "avantages consentis", mais pas les conventions (par exemple des conventions de recherche pour un projet particulier).
Cet ajout n'est toutefois pas suffisant, estime le Dr Jérôme Marty, président de l'association Union française pour une médecine libre (UFML), qui regrette que les liens relevant d'un contrat de travail ne soient toujours pas pris en compte. "Ce qui fait les liens d'intérêt, notamment chez les politiques, chez tous les gens qui travaillent en relation avec les laboratoires, les mises sur le marché de médicaments, etc, en général c'est contractuel. C'est ça qu'on voudrait voir: qui a des contrats avec qui", a-t-il expliqué à l'AFP.
L'UFML avait déjà relevé ce manque lors de la première mouture du site internet, soulignant qu'il ne permettrait pas de repérer des conflits d'intérêts comme ceux de Jérôme Cahuzac, consultant pour l'industrie pharmaceutique juste après son départ du cabinet du ministre de la Santé.
Pendant ce temps, on oblige les médecins à déclarer si un laboratoire leur offre un stylo ou un repas, déplore le Dr Marty. Le décret paru vendredi stipule aussi que le montant des rémunérations et participations financières des personnes soumises à l'obligation de remplir une déclaration publique d'intérêts pourra désormais être rendu public.
Jusqu'à présent, ces informations étaient transmises aux autorités de tutelle, mais ne pouvaient pas être publiées. Les "fonctions et mandats électifs" et les sommes perçues à ce titre devront figurer dans les déclarations publiques d'intérêts, précise le décret. Ces déclarations devront être actualisées "chaque fois qu'une modification intervient" dans la situation du déclarant et, dans tous les cas, vérifiées chaque années, ajoute le texte.
L'ensemble de ces nouvelles dispositions, prévues par la loi santé du 26 janvier 2016, entreront en vigueur au plus tard le 1er juillet. "S'il faut distinguer liens d'intérêts et conflits d'intérêts, il revient à chaque internaute, chaque citoyen, de connaître en toute objectivité la nature des relations qui lient les industries de santé aux autres parties prenantes du secteur", a commenté Marisol Touraine dans le communiqué.
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