Zika : "le risque est très limité en métropole"
Bénin dans la grande majorité des cas, le virus Zika est également soupçonné de provoquer des malformations du fœtus, ou encore le syndrome de Guillain-Barré . Des soupçon très sérieux, explique à FranceSoir Marie-Claire Paty, coordinatrice de la surveillance des maladies vectorielles à l'InVS (Institut de veille sanitaire), mais difficiles à démontrer et à quantifier. Selon Elle, les craintes d'une épidémie en métropole sont à relativiser et le Zika ne devrait pas s'y développer plus que chikungunya et la dengue.
Où en sont les conaissances sur un lien entre le virus Zika et les cas de microcéphalie des fœtus ou de Guillain-Barré?
"Aujourd'hui les experts et l'OMS continuent à dire qu'on n'a pas de certitude totale. Ceci étant, les preuves s'accumulent. On passe de ce qu'on aurait pu qualifier il y a quelques mois de +liens possibles+ à une responsabilité très probable. Pour avoir la preuve formelle il faudrait par exemple provoquer (la contamination) en conditions expérimentales, ce qui n'est évidement pas envisageable. On est sur une très forte probabilité de responsabilité, notamment pour la microcéphalie. (Quelques heures après cet entretien, une équipe scientifique affirmait avoir établi le lien entre Zika et microcéphalie, NDLR).
"Avant de conclure à un lien de certitude, la communauté scientifique agit avec prudence. Mais là, les preuves sont très fortes".
Peut-on chiffrer les risques de malformation du fœtus pour une femme enceinte qui se ferait piquer par un moustique porteur du virus?
"Aujourd'hui on ne peut pas s'avancer à donner des chiffres certains car c'est un phénomène récent. Il y a toujours des études en cours pour essayer de définir si il existe une période de grossesse plus à risque. Ce n'est très vraisemblablement pas 100% des grossesses avec infection qui vont mener à des atteintes du fœtus".
"Il y a les cas de microcéphalie qu'on voit mais ce n'est peut-être que la partie émergée de l'iceberg. En Polynésie, ce sont probablement entre 0,5% et 1% des grossesses qui ont mené aux anomalies avec a priori 60% à 70 % de la population infectée, mais on a peu de recul".
L'Organisation mondiale de la santé a décrété une "urgence de santé publique de portée mondiale" et s'inquiète d'une "propagation explosive". Pourtant les symptômes sont le plus souvent bénins. La situation est-elle si inquiétante?
"Certains des experts qui ont contribué à prendre cette décision d'alerte internationale ont expliqué l'avoir fait en raison de la gravité en termes de santé de ces cas de microcéphalie, l'épidémie diffusée de façon importante en Amérique latine et dans les Caraïbes. Mais aussi en raison de toutes les incertitudes, les inconnues à propos de ce virus, qui justifiaient un investissement de la communauté scientifique et médicale".
Faut-il craindre une épidémie en métropole lors du retour du beau temps et du moustique tigre?
"Le moustique tigre (aedes albopictus) est un cousin d'aedes aegypti (principal responsable de la transmission du virus en Amérique du sud et dans les caraïbes, NDLR). Il est présent en France depuis 2004, d'abord uniquement dans les Alpes-Maritimes, et en 2016 dans 30 départements, de mai à novembre. Ce moustique pourrait a priori transmettre le Zika (en piquant une personne infectée suite à un séjour dans un pays à risque). Il faut préciser que le virus ne reste que trois à six jours dans le sang.
"Ce risque est pris en compte, c'est le même que pour le chikungunya et la dengue, transmises aussi par le moustique tigre. Il y a plan de surveillance et de prévention pour ces deux maladies qui va être élargi cette année au Zika.
"On a pu documenter depuis 2006 des petits épisodes de personnes infectées par la dengue ou le chikungunya sans avoir voyagé. En métropole le risque existe mais on n'a jamais eu de grosse épidémie très certainement grâce à ce plan.
"Pour le Zika, il y a des inconnues puisqu'on n'a jamais vu d'épidémie transmise par aedes albopictus. Mais on pourrait voir ce qu'on a déjà vu avec la dengue ou le chikungunya: un ou deux cas ou des petits foyers, mais a priori, le risque est très limité en métropole".
En quoi consiste ce plan de surveillance?
"Il comporte deux volets, humain et moustique. L'InVS, la Direction générale de la santé (DGS) et les Agences régionales de santé (ARS) mettent en place une surveillance. On demande aux médecins et aux laboratoires de nous signaler les cas. Il y a immédiatement une enquête entomologique et une démoustication là ou ces personnes résident et se sont déplacées.
"A côté, il y a aussi les mesure de lutte contre les gites larvaires à appliquer dès que le moustique tigre est présent, même si aucun cas n'a été détecté".
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