Sans touristes ni télésièges, les moniteurs de ski désoeuvrés

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Par Lea DAUPLE - Paris (AFP)
Publié le 26 décembre 2020 - 09:00
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Télésiège à la station de Super Bagnères (Haute-Garonne) le 4 décembre 2020
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© GEORGES GOBET / AFP/Archives
Un télésiège fermé à Super Bagnères, près de Bagnères-de-Luchon, le 4 décembre 2020
© GEORGES GOBET / AFP/Archives

Avec des remontées mécaniques à l'arrêt, les touristes se font rares en montagne et, même si les écoles diversifient leurs offres, nombre de moniteurs ont dû laisser les skis au placard pendant les vacances de Noël.

"D'habitude le sujet de conversation en début de saison, c'est de savoir si on aura de la neige ou pas. Cette année, on se demande si on va pouvoir ouvrir", soupire Marc Bourreau, directeur de l'École du Ski Français (ESF) de Méribel (Savoie).

"Normalement", à cette période, son école voit défiler jusqu'à "1.200 clients par jour". Mais en cet hiver marqué par la pandémie de Covid-19, rien n'est normal. La station est vide, et M. Bourreau a dû se contenter d'un pic de fréquentation "très faible", à 200 personnes.

Alors forcément, "il n'y a pas de travail pour tout le monde", regrette-t-il. Dans son école, une vingtaine de moniteurs enseignent cette semaine, alors qu'ils devraient être 350.

Au niveau national aussi "beaucoup restent à quai", confirme Éric Brèche, président du Syndicat National des Moniteurs de Ski Français (SNMSF), dont dépend l'ESF.

Le syndicat, auquel 17.000 des quelque 20.000 moniteurs français sont affiliés, constate une baisse drastique du nombre de cours, jusqu'à -80% dans certaines grandes stations des Alpes.

- 1.500 euros de compensation -

Les moniteurs de ski, qui ont un statut d'indépendant, peuvent recevoir via le fonds de solidarité une compensation de perte de leur chiffre d'affaires allant jusqu'à 10.000 euros ou 20% de leur chiffre d'affaires réalisé sur la même période en 2019.

Mais dans les faits, la majorité d'entre eux ne touchera pas plus de 1.500 euros, évalue M. Bourreau.

"Pour l'instant, les mesures d'accompagnement nous permettent de tenir hors de l'eau", explique M. Brèche, qui s'inquiète toutefois des effets d'une situation "anxiogène" sur le moral des moniteurs.

"J'enseigne depuis 1977 et je n'ai jamais vu un début de saison comme ça", affirme Patrice Pujda, moniteur ESF à Méribel.

Ces dernières semaines, il a vu se multiplier les annulations de sa clientèle internationale, venue de Russie ou du Royaume-Uni.

Habitué à travailler plus de cinquante heures par semaine pendant cette période qui représente près d'un quart de ses revenus annuels, il doit se contenter d'une douzaine d'heures hebdomadaires. "Rien, quoi", dit-il.

- Autres activités pas suffisantes -

Grâce à son ancienneté, M. Pujda est pourtant "en haut du tableau", ce qui signifie que les cours lui sont attribués en priorité par rapport aux plus jeunes.

Pour ces derniers, c'est encore plus compliqué. Margot Tresal-Mauroz, 22 ans, monitrice stagiaire à l'ESF de l'Alpe d'Huez (Isère), se considère déjà "chanceuse" d'encadrer quelques cours, même si elle travaille trois fois moins que l'année dernière.

Mais comme elle n'a pas encore validé toutes les épreuves de son brevet d'État, les activités de ski hors piste ou de raquettes ne peuvent lui être confiées. Or "c'est un gros bloc de ce qu'on vend en ce moment", note-t-elle.

Car pour faire face, les écoles misent sur d'autres activités comme la luge, le ski nordique ou de randonnée, et certaines connaissent un joli succès, notamment dans les petites stations. Mais impossible de compenser la perte du ski alpin.

"L'activité est nulle", déplore Fabrice Branche, moniteur indépendant aux Arcs (Savoie), spécialisé dans le ski de randonnée.

Sans remontées mécaniques, les lieux sur lesquels il emmène habituellement ses clients sont beaucoup moins accessibles.

Il faut au moins deux heures de marche pour les atteindre, contre une trentaine de minutes en temps normal, en faisant une partie du chemin en télésiège. "Faire des grosses sorties de ski de randonnée, ce n'est pas une activité anodine, il faut des gens qui ont un bon niveau", souligne-t-il.

Résultat, "un taux de réservation pratiquement inexistant", alors qu'il n'a "quasiment pas travaillé" depuis le premier confinement. "Notre saison est foutue".

Plus optimiste, Éric Brèche dit avoir les "yeux rivés sur le reste de l'hiver" et surtout sur les vacances de février, qui peuvent représenter jusqu'à la moitié des revenus annuels d'un moniteur de ski.

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