Attentat du Drugstore Publicis : perpétuité requise contre Carlos
La réclusion criminelle à perpétuité a été requise lundi devant la cour d'assises spéciale de Paris à l'encontre d'Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, pour l'attentat du Drugstore Publicis qui avait fait deux morts et 34 blessés à Paris en 1974.
"Tous les éléments accumulés dans cette enquête convergent vers lui", a expliqué l'avocat général Rémi Crosson du Cormier. "Je n'ai pas d'ADN, d'empreintes digitales ou de vidéosurveillance. Mais la raison permet de dépasser le doute raisonnable. J'ai la conviction qu'Ilich Ramirez Sanchez est bien l'auteur de cet attentat criminel."
"Si vous le condamnez, il gagne, si vous l'acquittez, il perd", a fait valoir l'un des avocats de Carlos, Me Francis Vuillemin, pour qui son client, déjà condamné deux fois à perpétuité et dont une troisième condamnation "ne changera rien au destin carcéral", a tout fait lors du procès "en provoquant la cour" pour prendre le maximum. "Alors, acquittez Carlos et il passera ses nerfs sur ses avocats", a-t-il lancé.
Auparavant, sa consoeur, Isabelle Coutant-Peyre, avait proposé d'offrir une bouteille de champagne à la cour si elle perdait son pari et que son client était condamné.
Le verdict est attendu mardi.
Interrogé lors du procès sur son implication, le Vénézuélien, 67 ans, avait éludé, arguant qu'on lui demandait de "devenir un informateur contre (lui)-même" et qu'un "cadre de la résistance palestinienne" comme lui ne pouvait, sous peine de mort, fournir des informations sur une opération, encore moins lors d'un procès.
Poussé dans ses retranchements par le président, il avait finalement lâché: "Peut-être que c'est Carlos, peut-être que c'est moi, mais il n'y a aucune preuve de cela."
Incarcéré en France depuis 1994, Carlos a déjà été condamné à deux reprises à la peine maximale pour le meurtre de trois hommes, dont deux policiers en 1975 à Paris, et pour quatre attentats à l'explosif qui avaient fait onze morts et près de 150 blessés en 1982 et 1983, dans la capitale, à Marseille et dans deux trains.
- "Trop long délai" -
Dans son réquisitoire, l'avocat général a tenté de répondre aux critiques sur les délais de cette procédure jugée 43 ans après les faits.
"On nous accuse d'acharnement judiciaire, de négliger le droit à l'oubli. Mais, au nom de la vérité, du respect des victimes (...) il est un devoir de juger même après ce trop long délai", a-t-il fait valoir. La défense a elle dénoncé un "procès politique jugé d'avance" relevant de la "paléontologie judiciaire".
Parmi les éléments à charge, le représentant du ministère public a cité le travail des enquêteurs sur la grenade utilisée au Drugstore et qui, a-t-il affirmé, "est bien du même lot" que celle retrouvée chez une maîtresse de l'accusé et celles utilisées lors d'une prise d'otage à La Haye par un commando de l'armée rouge japonaise, proche du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) auquel appartenait également Carlos.
"En réalité, on ne sait pas quel type de grenade a été utilisé au Drugstore", a contesté Me Vuillemin rappelant que 24 grenades de ce lot volées en Allemagne n'ont jamais été retrouvées et que le système d'allumage découvert après l'explosion peut correspondre à un autre type de grenade américaine.
Le magistrat s'est également appuyé sur les témoignages de proches et compagnons d'armes de Carlos qui ont affirmé avoir reçu les confidences du Vénézuélien dans lesquelles il aurait reconnu être l'auteur de l'attentat du Drugstore.
Autant de déclarations sujettes à caution pour la défense qui en a pointé les contradictions.
L'avocat général a enfin jugé que l'interview de l'accusé au journal "Al Watan Al Arabi" dans lequel il revendiquait cet attentat était "un récit circonstancié où Carlos développe des explications que le journaliste ne pouvait connaître". "L'interview contient des erreurs factuelles. Et ce n'est pas un problème de traduction mais de manipulation", a défendu Me Vuillemin.
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