Le parlement tchèque refuse la confiance au gouvernement minoritaire d'Andrej Babis
Le milliardaire populiste Andrej Babis a échoué mardi à obtenir la confiance du parlement tchèque pour son gouvernement minoritaire, mais devrait tenter à nouveau d'en former un, en dépit de soupçons de fraude pesant sur lui.
"La chambre basse n'a pas voté la confiance au gouvernement", a déclaré le président de la chambre basse, Radek Vondracek.
Sans surprise, seuls les 78 députés du mouvement ANO de M. Babis ont soutenu leur chef soupçonné de fraude, à qui le président Zeman a promis de confier à nouveau la formation du gouvernement. Au total, 117 députés ont voté contre lui, avec cinq abstentions.
Les députés des huit autres partis représentés au sein de cette chambre basse très fragmentée ont voté contre le cabinet de M. Babis, composé de membres d'ANO et de ministres sans étiquette. ANO détient 78 sièges sur 200, depuis les législatives des 20 et 21 octobre.
Outre des soupçons de fraude qui pèsent sur le Premier ministre, la raison du rejet invoquée par les autres partis est aussi le passé communiste du Premier ministre et son conflit d'intérêts présumé.
Magnat de l'industrie chimique et alimentaire, propriétaire de médias importants surnommé parfois "Trump" ou "Berlusconi" tchèque, il est la deuxième fortune du pays selon Forbes.
Le débat sur le vote de confiance devait être suivi de celui sur la levée de l'immunité de M. Babis et de celle d'un autre député concerné par cette affaire, le vice-président d'ANO Jaroslav Faltynek.
- Poursuites judiciaires -
M. Babis est poursuivi en justice pour avoir séparé temporairement en 2007 de son groupe Agrofert une de ses entreprises, la ferme ultra-moderne comprenant un complexe hôtelier "Nid de Cigogne", pour bénéficier de subventions européennes en principe destinées aux PME, d'un montant de 50 millions de couronnes (1,95 million d'euros).
M. Babis est actuellement couvert par l'immunité parlementaire. Il réclame lui-même sa levée, demandée également par la police.
"Nous voulons démontrer que cette affaire est montée de toutes pièces", a-t-il affirmé mardi matin, après avoir été entendu par les membres de la commission parlementaire chargée des mandats et de l'immunité.
L'affaire a fait aussi l'objet d'une enquête de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF).
La Constitution tchèque prévoit jusqu'à trois tentatives de former un gouvernement, les deux premières étant pilotées par le président et la troisième par le chef de la chambre basse, poste occupé actuellement par M. Vondracek, membre d'ANO.
Le président Zeman a précisé qu'il en chargerait une nouvelle fois M. Babis, mais qu'il lui demanderait de s'assurer d'abord le soutien d'au moins 101 des 200 députés.
- "101 voix garanties" -
"Au moment où il me dit qu'il dispose d'au moins 101 voix garanties, je le désignerai Premier ministre pour la deuxième fois", a affirmé le chef de l'Etat la semaine dernière.
Selon M. Babis, compte tenu de l'échec du vote de confiance, le gouvernement présentera sa démission mercredi, mais "continuera à travailler" jusqu'à la nomination d'une nouvelle équipe.
M. Zeman a aussi indiqué qu'il allait laisser au Premier ministre le temps nécessaire pour la formation de ce nouveau cabinet, "peut-être sur le modèle allemand", en faisant allusion aux laborieuses tractations post-électorales chez le grand voisin occidental.
La formation du gouvernement est compliquée par l'élection présidentielle au suffrage universel direct à deux tours, à laquelle M. Zeman est candidat.
Connu pour ses opinions pro-russes et hostiles à l'immigration musulmane, M. Zeman dont le mandat s'achève le 8 mars, est arrivé samedi en tête du premier tour du scrutin avec 38,56%.
Il a devancé l'ex-patron pro-européen de l'Académie des Sciences Jiri Drahos (26,60% des suffrages), mais ce dernier part légèrement favori pour le second tour, les 26 et 27 janvier, grâce aux reports de voix attendus.
"Jiri Drahos a dit très clairement qu'un homme poursuivi par la justice ne devrait pas être Premier ministre", a déclaré à l'AFP l'analyste Jiri Pehe. S'il est élu, la situation de M. Babis deviendrait encore plus compliquée.
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