Mai 68, mouvement précurseur de l'émancipation des femmes

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Par Pascale JUILLIARD, Jessica LOPEZ - Paris (AFP)
Publié le 05 avril 2018 - 11:30
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Des jeunes femmes manifestent le 1er mai 1968 à Paris
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© JACQUES MARIE / AFP/Archives
Des jeunes femmes manifestent le 1er mai 1968 à Paris
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Les événements de mai 68 ont donné une impulsion décisive à la lutte pour l'émancipation féminine, ouvrant "une nouvelle ère" dans les relations hommes-femmes, selon des militantes de la première heure.

"Avant mai 1968, on n'avait pas conscience de la domination masculine. Ce mouvement a rendu possible tout ce qui s'est passé après, notamment la création du MLF", le Mouvement de libération des femmes, observe auprès de l'AFP Françoise Picq, historienne du féminisme.

Pour une autre ancienne du MLF, Michèle Idels, la "révolte contre l'autoritarisme" en mai 68 a été "un souffle de libération de la pensée, la sortie des carcans", dans une société "codifiée" où "le moule social était extrêmement fort".

C'est seulement en 1965 que les femmes mariées avaient été autorisées par la loi à ouvrir un compte en banque en leur nom propre, et à travailler sans l'aval de leur époux. Deux ans plus tard, la loi Neuwirth avait légalisé la contraception, mais il faudra attendre 1969 pour que les premiers décrets soient publiés, et 1974 pour que la pilule soit remboursée par la sécurité sociale.

En 1967, il n'y avait que 2,2% de femmes à l'Assemblée nationale, soit 11 femmes sur 487 députés. La société était très patriarcale, et le mouvement de mai 68 n'était pas féministe, selon l'historienne Michelle Perrot.

"Il fallait d'abord faire la révolution, et on s'occuperait ensuite des femmes, nous disait-on", observait-elle dans un récent entretien à l'Obs. "En 1968, les femmes restent largement subordonnées. Mais elles profitent de la brèche pour s'y engouffrer".

Le 6 juin 1968, un petit groupe baptisé "Féminin-masculin-avenir" organise le premier meeting sur les femmes dans la Sorbonne occupée. Les initiatrices, parmi lesquelles Anne Zélensky et Christine Delphy, l'avaient annoncé dans les couloirs par une affiche appelant les étudiants en grève à "combattre aussi la domination des hommes sur les femmes", se souvient Françoise Picq, à l'époque étudiante en sociologie.

- Femme du soldat inconnu -

Quelques mois plus tard, le 1er octobre 1968, "en réaction contre le virilisme du mouvement étudiant", Antoinette Fouque, Josiane Chanel et Monique Wittig organisent la première réunion de ce qui s'appellera le MLF, avec un impératif, la non-mixité.

Dans son livre "Il y a deux sexes", Antoinette Fouque décrivait "ces graffitis de pénis en érection qui couvraient joyeusement les murs" des universités parisiennes, et les affiches "le pouvoir est au bout du phallus", détournant le slogan "le pouvoir est au bout du fusil".

"Si Mai 68 a été la révolte des fils contre les pères, les filles étant au service des fils, il s'agit de programmer la résistance des femmes à la domination des frères et des fils", selon le 1er volume "MLF, psychanalyse et politique, 1968-2018", publié récemment aux Editions des femmes codirigées par Mme Idels.

Certaines féministes situent plutôt la naissance symbolique du MLF à 1970, avec le dépôt d'une gerbe à la femme du soldat inconnu, à l'Arc de Triomphe, le 26 août. Car "Il y a plus inconnu que le soldat inconnu: sa femme", dirent les militantes à la presse.

Libération sexuelle, début des unions libres, bataille pour que les filles puissent recevoir des garçons en résidence universitaire, port du jean au lycée ... "Les femmes ont commencé à se préoccuper de leur propre sexualité et de leur propre désir", souligne Mme Idels.

Le droit à l'avortement a été l'une des premières revendications du mouvement, avec notamment le manifeste des 343 femmes déclarant avoir avorté, publié le 5 avril 1971 et signé par des célébrités comme Simone de Beauvoir, Marguerite Duras et Catherine Deneuve.

La loi Veil légalisera l'interruption volontaire de grossesse le 17 janvier 1975.

"On a été à pas de géantes depuis 1968, ça a ouvert une nouvelle ère où les femmes existent", même si la route est encore longue vers l'égalité femmes-hommes, souligne Michèle Idels.

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