Macron "tourne le dos à l'héritage du général de Gaulle"

Auteur(s)
Alain Tranchant pour France-Soir
Publié le 13 juin 2024 - 11:00
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De Sakutin / AFP
Macron "tourne le dos à l'héritage du général de Gaulle"
De Sakutin / AFP

Dans sa conférence de presse du 12 juin, où il s'est à l'évidence comporté en chef de parti lançant la campagne des élections législatives pour son propre camp, et non en chef d'Etat, M. Macron a estimé que "tous ceux qui ont suivi Éric Ciotti tournent le dos à l'héritage du général de Gaulle". 

Puisqu'il a cru devoir appeler à sa cause l'illustre homme d'Etat, je voudrais lui rappeler que "le président de la République ne saurait être confondu avec aucune fraction. Il doit être l'homme de la nation toute entière, exprimer et servir le seul intérêt national". Qui s'aventurerait à dire que par son attitude, M. Macron s'est inscrit dans la définition de la fonction présidentielle énoncée par De Gaulle le 30 novembre 1965 dans une allocution radiodiffusée et télévisée ? 

Il est tout aussi clair que jamais le général de Gaulle n'aurait annoncé son intention de se maintenir au pouvoir après une défaite de ses partisans lors d'élections législatives consécutives à une dissolution de l'Assemblée nationale, comme M. Macron l'a réaffirmé - sans hésitation et sans scrupule - devant les journalistes. 

C'est à Bayeux - tiens donc, Emmanuel Macron en revient, mais le voyage ne lui a rien appris ! - que le général de Gaulle affirmait en 1946, dans le discours fondateur de la future "Constitution de Bayeux", celle de 1958, que "les pouvoirs publics ne valent, en fait et en droit, que s'ils s'accordent avec l'intérêt supérieur du pays, s'ils reposent sur l'adhésion confiante des citoyens". On chercherait en vain "l'adhésion confiante des citoyens", quand les représentants du pouvoir recueillent le modique chiffre de 14,6 % des suffrages exprimés à l'occasion du scrutin européen du 9 juin. 

D'une manière autrement exemplaire, dans la perspective du référendum du 27 avril 1969, et partant du principe que "quand il s'agit du destin national, la confiance que se portent mutuellement le pays et le chef de l'Etat est à la base de nos institutions" (entretien du Général avec Michel Droit le 10 avril 1969), le général de Gaulle avait fait savoir à l'issue du Conseil des ministres du 19 mars 1969, qu'il avait annoncé aux membres du gouvernement qu'avant ce scrutin sur la régionalisation et la réforme du Sénat "il fera connaître publiquement ce qui peut le concerner  et expliquera en particulier l'importance de la question de confiance qui est ainsi posée aux Français". 

Le 27 avril au soir, le "oui" au référendum recueillait non pas 14,6 % des suffrages exprimés, mais 47,6 %. Le "non" l'ayant emporté, dans les heures qui ont suivi la proclamation officielle des résultats, De Gaulle faisait savoir qu'il cessait immédiatement d'exercer ses fonctions, démontrant une ultime fois qu'il avait "choisi la démocratie et la République" et que "le suffrage universel est la base de la République", comme il l'avait solennellement affirmé dans une conférence de presse le 22 juin 1951. 

Lors de l'annonce de la création du Rassemblement du Peuple Français (RPF), à Strasbourg en 1947, De Gaulle avait affirmé, à propos de la IVème République, que "les hommes ne sont pas en cause, ce sont les institutions". En ce mois de juin 2024, ce ne sont pas les institutions qui sont en cause, ce sont les hommes. Mais les institutions ne sont pas à l'abri d'une crise de régime. 

A la lecture de ces quelques citations, et pour parler comme lui, il apparaît très clairement que M. Macron "tourne le dos à l'héritage du général de Gaulle". Son "j'y suis, j'y reste", au lendemain d'un second revers électoral en quelques semaines, ne serait certainement pas la marque d'un grand démocrate. 

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