Enfants placés : le Parlement s'apprête à voter une meilleure protection
Graver la fin des sorties sèches de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) à 18 ans, interdire l'accueil des mineurs à l'hôtel, mieux rémunérer les familles d'accueil: le Parlement est sur le point d'adopter mardi un projet de loi consensuel sur la protection des enfants.
L'Assemblée nationale votera en fin de journée une dernière fois, ce qui vaudra validation par le Parlement.
Le Sénat à majorité de droite avait donné jeudi son feu vert, à main levée. La gauche s'était toutefois abstenue.
Le secrétaire d'Etat à l'Enfance et aux Familles Adrien Taquet, qui porte le projet de loi depuis l'été dernier devant les parlementaires, s'est dit "convaincu" qu'il "permettra aux enfants protégés par l'ASE de préparer leur avenir, d'envisager plus sereinement leur autonomie et de lutter contre ces inégalités de destin".
De la formation lacunaire des personnels jusqu'aux violences, des défaillances sont régulièrement pointées dans le suivi de ces quelque 300.000 mineurs. Plus de la moitié sont des "enfants placés", en institution ou en familles d'accueil, les autres bénéficiant d'actions éducatives.
La corapporteure LREM au Palais Bourbon Bénédicte Pételle vante un projet de loi "utile", "dans la lignée des lois de 2007 et de 2016".
Pour accompagner les jeunes de 18 à 21 ans passés par l'ASE, la garantie jeunes leur sera "systématiquement proposée", puis le contrat d'engagement jeune en mars, pour une insertion de ceux sans emploi ni formation.
Et ils bénéficieront d'un "droit au retour" à l'ASE en cas de besoin. Des "avancées" saluées par le collectif d'associations de protection de l'enfance Cause Majeur!.
Un quart des personnes sans domicile nées en France sont d'anciens enfants placés.
Les jeunes sortants de l’ASE seront prioritaires pour un logement social.
M. Taquet s'est engagé dans un premier temps "à ce que l'Etat accompagne les départements", qui ont compétence sur la protection de l'enfance, "à hauteur de 50 millions d'euros".
- "Responsabilité" de l'Etat -
Mais selon Stéphane Troussel, président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, l'Etat, "dans l'incantation", oblige les départements à "trouver eux-mêmes les moyens financiers".
Début janvier, Emmanuel Macron a plaidé pour une future "clarification institutionnelle": "cette responsabilité (de l'ASE) doit incomber à l’Etat".
Autre volet phare du texte: il sera interdit dans deux ans d'héberger des mineurs protégés dans des hôtels.
"Entre 7.500 et 10.000 mineurs protégés y sont hébergés aujourd'hui", des mineurs isolés étrangers pour la plupart, souligne le rapporteur du texte au Sénat Bernard Bonne (LR).
D'ici l'interdiction, les mineurs ne pourront pas être accueillis à l'hôtel pendant plus de deux mois.
Le projet de loi introduit par ailleurs des "contrôles stricts" des antécédents judiciaires des adultes au contact des enfants, notamment en matière d'infractions sexuelles. Les établissements devront avoir une politique de prévention et de lutte contre la maltraitance.
Les assistants familiaux, qui accueillent chez eux des enfants placés, bénéficieront d'une rémunération au moins égale au Smic dès le premier enfant accueilli.
De plus, la possibilité de confier l'enfant à un membre de sa famille ou à un "tiers digne de confiance" sera systématiquement recherchée. Les fratries seront par principe prises en charge dans un même lieu d'accueil.
Il sera proposé en outre à chaque enfant un parrainage par des bénévoles, et le suivi par un "mentor" au moment de l'entrée au collège.
Sur demande du juge, l'enfant pourra être assisté par un avocat "lorsque son intérêt l’exige".
Le juge des enfants pourra autoriser la personne à qui est confié l'enfant à exercer des actes de l’autorité parentale (comme participer à un voyage scolaire), sans autorisation au cas par cas.
Bien que favorables, les oppositions restent sur leur faim. La gauche critique en outre une mesure concernant les mineurs étrangers isolés: le recours au fichier national AEM ("appui à l'évaluation de la minorité") sera obligatoire, afin de mieux repérer les jeunes ayant déposé des demandes de protection dans plusieurs départements.
Pour la sénatrice socialiste Michelle Meunier, qu'une loi sur la protection de l'enfant intègre des dispositions de "gestion des flux migratoires n'est pas tolérable".
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