Guerre d’Algérie : du commencement à la fracture (1954-1958)

Auteur(s)
Maxime Macé
Publié le 01 novembre 2014 - 11:08
Mis à jour le 06 novembre 2014 - 17:32
Il y a 60 ans, le 1er novembre 1954, la "Toussaint rouge" marquait le début de la guerre d’Algérie. Longtemps qualifiée "d’opération de maintien de l’ordre", ce fut en réalité l’un des conflits les plus âpres et meurtriers de la décolonisation. Première partie de l'historique de ce conflit, de 1954 à 1958.

La France considère l’Algérie, département français depuis 1848, comme faisant partie intégrante de son territoire, elle jouit d’un statut particulier au sein de l’empire colonial car il s’agit de la seule colonie de peuplement.

Pourtant la population musulmane a de plus en plus de mal à supporter l’inégalité de la société algérienne, dans laquelle elle se retrouve sous-représentée politiquement et opprimée par un système économique qui profite surtout aux colons.

Au sortir de la Seconde guerre mondiale, on assiste à une forte montée des nationalismes dans les colonies françaises d’Afrique et d’Asie. Ceci est particulièrement vrai en Algérie où, devant l'impossibilité d'obtenir davantage de droits, une partie de la population se radicalise.

La première rupture entre les autorités françaises et les indépendantistes algériens s’opère lors des massacres de Sétif et Guelma en 1945, sanglantes répressions d’un soulèvement des populations musulmanes contre les Européens qui se terminent par des dizaines de milliers de morts.

Des nationalistes algériens, regroupés dans le Front de Libération Nationale (FLN), passent à l’offensive à l’automne 1954. Au cours de la "Toussaint Rouge", dans la nuit 31 octobre au 1er novembre, plusieurs attentats sont perpétrés dans une trentaine de points du pays. Ces attentats marquent le début de ce que les autorités françaises et les médias appellent alors les "évènements" d’Algérie. C’est en fait la guerre d’Algérie qui commence.

Le soulèvement du Constantinois

En août 1955, la région du Constantinois (est de l’Algérie) s’embrasse. La faction armée du FLN, l’Armée de libération nationale, déclenche une vague de violences contre les civils européens et les Algériens modérés ainsi que les représentants de l’autorité comme les gendarmeries et postes de police. L’historienne Claire Mauss-Copeaux dénombre près d’une centaine de victimes chez les civils et 26 militaires français.

Ces actes vont entraîner une radicalisation des autorités et notamment de Jacques Soustelle, gouverneur général de l’Algérie réputé favorable aux réformes, qui va basculer dans une défense farouche de l’Algérie française. La répression organisée contre le FLN par les autorités sera particulièrement féroce. Une partie des colons s’organise en milices qui vont appuyer les opérations de militaires français avec une grande brutalité. Le nombre de victimes de ces représailles disproportionnées est estimé entre 12.000 et 20.000. Désormais, les deux communautés sont ennemies et le processus de guerre est irréversible.

Après le départ de Jacques Soustelle en février 1956, Robert Lacoste est nommé ministre résident en Algérie et réclame des "pouvoirs spéciaux", qui lui sont accordés le 12 mars 1956 par l'Assemblée nationale.

Les 200.000 jeunes hommes du contingent sont rappelés sous les drapeaux, portant les effectifs de l’armée à 400.000 hommes, chiffre qui restera maintenu jusqu'à la fin du conflit. L'armée transforme l'Algérie en une province militaire et ferme les frontières avec le Maroc et la Tunisie (respectivement indépendant depuis le 18 novembre et le 20 mars 1956), par où transitent les hommes et les armes à destination du FLN.

Parallèlement, elle met en place une série d'actions psychologiques (attributions de terres, construction de logements, scolarisation) pour tenter de gagner l'adhésion de la population civile. Les attentats se multiplient et le FLN remporte également des succès politiques, notamment en réunissant, le 20 août 1956, un important congrès dit "de la Soummam" où l’organisation indépendantiste définit l’objet de sa lutte: la création d’une république algérienne, unitaire, sociale et démocratique.

De janvier à octobre 1957, se déroule la terrible bataille d’Alger. Terrible par le nombre de victimes innocentes qui tomberont sous les rafales des parachutistes français dirigés par le général Massu et sous les bombes posées par le FLN. Terrible par les moyens utilisés par l’armée pour faire taire les explosions qui ravageaient la Ville Blanche. La torture est une réalité de cette bataille, l'une de ses armes les plus sinistres, son utilisation a conduit à une radicalisation communautaire et provoque l'hostilité des Algériens modérés qui se rallient à la cause du FLN.

La crise du 13 mai 1958

En France, l’instabilité chronique de la IVe République ne permet pas d’établir une politique durable pour résoudre la crise algérienne. L’investiture de Pierre Pflimlin, favorable à des négociations avec le FLN, et désigné par le président du Conseil, donne lieu à une manifestation à Alger, le 13 mai 1958; elle débouchera sur un putsch et l'instauration d'un pouvoir insurrectionnel.

Les activistes de l’Algérie française, soutenus par une partie de l’armée (notamment les parachutistes) prennent d’assaut le siège du gouvernement général d’Alger et proclament la constitution d'un comité de salut public à la tête duquel est placé le général Salan. L'armée gouverne donc l'Algérie. Le 15 mai, poussé par le général Massu, le général Salan (qui commande l’armée de terre en Algérie) fait appel au général de Gaulle.

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