La Turquie postule officiellement à une adhésion aux BRICS
Ankara passe à l’acte. Des années après avoir moult fois exprimé son intérêt pour une adhésion aux BRICS, la Turquie a officiellement soumis sa demande au bloc des pays émergeants, menés par la Russie, la Chine, le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud. L’annonce a été faite par le porte-parole du parti au pouvoir en Turquie, membre de l’OTAN et toujours candidat à une entrée dans l’Union européenne.
Présent lors du sommet des BRICS à Johannesburg en Afrique du Sud en 2018, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait exprimé son intérêt pour une adhésion à ce bloc. La priorité de celui-ci ce moment-là était de contrer le protectionnisme de Donald Trump, alors président des États-Unis, dont les relations avec Ankara étaient justement tendues. La Turquie traversait une crise économique marquée par une dépréciation de sa monnaie, voyant dans les BRICS une opportunité de développer de nouvelles coopérations économiques tout en réduisant sa dépendance vis-à-vis des économies occidentales.
La Turquie dépose officiellement sa candidature
L’intérêt du président turc revêtait aussi un caractère géopolitique, désirant positionner Ankara comme un acteur majeur du “Sud global” et contre-carrer un système international qui ne “satisfait qu’une minorité privilégiée”. Mais cette année-là, les BRICS n’envisageaient pas officiellement d’accueillir de nouveaux membres. Les discussions sur de nouvelles adhésions n’eurent lieu qu’à partir de 2020 et le bloc annonçait, fin 2023, son intention de doubler son nombre. Six pays ont été invités à le rejoindre, à savoir l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran, l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis. Leur adhésion a été effective dès janvier 2024, sans Buenos Aires.
Des frictions avec les membres de l’OTAN, une guerre en Ukraine, une candidature à une entrée dans l’UE au point mort ainsi qu’une guerre à Gaza ont consolidé l’intérêt de la Turquie pour les BRICS. "Nous ne considérons pas les Brics comme une solution alternative face à toute autre structure", avait affirmé en juillet dernier le président Erdogan. "La Turquie peut devenir un pays fort, prospère et respecté si elle développe simultanément ses relations avec l'Est et l'Ouest", a-t-il ajouté.
Il est ainsi question, confirme Ömer Çelik, porte-parole du Parti de la justice et du développement du président Erdogan, de “prendre part à toutes les plateformes importantes, dont les BRICS”.
Le même responsable a annoncé mardi 03 septembre qu’Ankara a officiellement postulé pour une adhésion à ce bloc. “Notre président a plusieurs fois affirmé que nous voulions devenir membre des Brics (...) Le processus est en cours", a-t-il ajouté. "S'il y a des développements concrets concernant notre adhésion, une décision ou une évaluation des Brics, nous les partagerons avec vous", a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse.
La nouvelle n’a pas été commentée par la présidence ou le ministère turc des Affaires étrangères.
Le prochain sommet des BRICS+ à Kazan
Si l'acronyme "BRIC" (pour Brésil, Russie, Inde et Chine) est apparu en 2001, cette alliance politique et économique ne s’est formée qu'en 2009, au lendemain de la crise financière. L’Afrique du Sud, l’hôte du dernier sommet en août, n’a rejoint le bloc qu’en 2011, alors renommé Brics. Cette alliance entend constituer une alternative à l’hégémonie occidentale sur le plan géopolitique, économique et même financier en prônant une monnaie commune.
Lors du dernier sommet de Johannesburg, durant lequel plusieurs sujets comme la dédollarisation et le multilatéralisme ont été abordés, les Brics se sont mis d’accord pour intégrer de nouveaux pays dans l’alliance. La Chine et la Russie avaient ouvertement plaidé pour cette expansion dans le but de favoriser un "ordre mondial multipolaire" et "multilatéral".
L’Argentine, qui soutenait l’adhésion à cette alliance sous son ex-président, Alberto Fernandez, a fait marche arrière après ’élection en décembre de Javier Milei, qui se décrit comme anarcho-capitaliste et qui a critiqué les pays gouvernés "par le communisme” comme la Chine et la Russie.
L’adhésion de pays comme l’Iran, l’Arabie Saoudite et les Emirats, qui apportent leurs ressources en pétrole et leurs fonds souverains, fait que les “Brics+” représentent près de la moitié de la population de la Terre, contrôlent près de la moitié de la production mondiale de pétrole (soit 43,34 %) et représentent 35 % du PIB mondial.
Le 1 septembre, l’Algérie, candidate non retenue fin 2023, a annoncé son adhésion à la Nouvelle banque de développement (NBD) des Brics. Une participation approuvée par le Conseil des gouverneurs de la NBD, présidé par l'ancienne cheffe d'État brésilienne Dilma Rousseff.
Le prochain sommet des BRICS aura lieu du 22 au 24 octobre 2024 à Kazan, en Russie. Le bloc n’a pour le moment pas communiqué sur de nouvelles adhésions.
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