Un mois après la disparition de Steve à Nantes, enquêtes et zones d'ombre

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Par Fanny LATTACH - Nantes (AFP)
Publié le 18 juillet 2019 - 11:47
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Affiches et graffitis liés à la disparition de Steve Canico photographiés à Nantes le 15 juillet 2019
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© LOIC VENANCE / AFP
Affiches et graffitis liés à la disparition de Steve Canico photographiés à Nantes le 15 juillet 2019
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"Où est Steve ?" Un mois après la disparition de Steve Maia Caniço lors de la Fête de la musique, l'inquiétude s'affiche toujours dans les rues de Nantes. Plusieurs enquêtes sont en cours pour éclaircir les événements de la nuit du 21 au 22 juin et l'opération controversée de la police.

"C'est vrai qu'il a fallu attendre un mois pour que ça commence à faire du bruit, pour qu'on commence à en parler, que certains commencent à s'indigner et que les procédures judiciaires puissent avancer", estime Marianne Rostan, avocate au barreau de Paris.

Elle a déposé le 3 juillet une plainte collective de 89 participants pour "mise en danger de la vie d'autrui et violences volontaires par personnes dépositaires de l'autorité publique", confiée mardi à l'IGPN (l'Inspection générale de la police nationale).

Dans la nuit du 21 au 22 juin, la Fête de la musique s'était terminée dans la confusion : des échauffourées avaient éclaté vers 04h30 entre participants et policiers venus exiger l'arrêt de la musique sur le quai Wilson, un endroit sans parapet de l'île de Nantes, sur la Loire.

Il n'y a eu "aucune charge" des forces de l'ordre, visées par des projectiles, selon la police. De nombreux participants ont cependant relaté avoir été aveuglés par un nuage de gaz lacrymogène: paniqués, ils ont chuté dans le fleuve. Quatorze personnes ont ainsi été repêchées par les secours durant la nuit.

Steve Maia Caniço, animateur périscolaire de 24 ans, n'a plus donné signe de vie depuis cette nuit-là, peut-être tombé dans la Loire lui aussi. Il ne sait pas nager, selon ses proches.

"Où est Steve ?" La question a surgi sur les réseaux sociaux, dans les rangs de "gilets jaunes" à Toulouse, Lille, Paris. L'attente, mais pas l'oubli: elle a été placardée sur quelques-unes des 550 statues de l'artiste Stéphane Vigny, installées place Royale à Nantes pour l'été.

- "Vérité pour Steve" -

"Ça prend...Mais on a l'impression que ça reste cantonné, qu'il y a une sorte de plafond de verre, surtout au niveau politique où il y a très peu de réactions", constate Samuel Raymond, coordinateur de Freeform, une structure nationale qui accompagne l'organisation de rassemblements festifs.

Peu de caciques de la majorité comme de l'opposition se sont risqués à parler de cette disparition. "La hiérarchie policière et le pouvoir auraient préféré (l')étouffer", a estimé le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon, rappelant qu'un syndicat de police avait critiqué l'opération.

"Ce qui peut paraître assez surprenant au départ c'est l'absence de réaction judiciaire et politique juste après l'intervention", estime Me Rostan.

Le rythme judiciaire s'est récemment accéléré: cinq procédures sont menées en parallèle, dont une enquête administrative conduite par l'IGPN et une enquête de la police judiciaire à la suite de "dix plaintes de policiers qui ont été blessés lors des événements de la Fête de la musique", a déclaré à l'AFP Pierre Sennès, procureur de la République à Nantes.

Le Défenseur des droits Jacques Toubon s'est également auto-saisi pour enquêter sur cette soirée mouvementée. L'annonce n'a fait "ni chaud ni froid" au préfet Claude d'Harcourt qui avait déclaré sur France Bleu Loire Océan, deux jours après les faits, que les forces de l'ordre intervenaient "toujours de manière proportionnée".

La disparition de Steve Maia Caniço fait quant à elle l'objet d'une information judiciaire, pilotée par un juge d'instruction. Une trentaine d'auditions ont été réalisées à Nantes mais c'est désormais la police judiciaire de Rennes qui a repris la main, selon une source proche du dossier.

Sa famille s'est constituée partie civile. "Ce sont d'abord des gens qui souffrent terriblement parce que leur fils est tombé dans la Loire et ils n'ont pas le corps", confie Cécile de Oliveira, leur avocate.

Quai Wilson, les tags donnent le ton : "noyade autorisée par la préfecture", "bavures policières il faut que ça cesse", "nous voulons la vérité pour Steve". Par petits groupes, des proches viennent régulièrement scruter le fleuve.

Un rassemblement y est organisé samedi à 15H30 pour demander "où est Steve?", a annoncé l'association Média'son sur sa page Facebook.

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