Alarmisme : l'AP-HP au cœur de la peur

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FranceSoir
Publié le 03 avril 2021 - 00:25
Mis à jour le 02 avril 2021 - 17:49
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oiseaux de malheur
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Levez-vous vite, orages désirés...
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HUMEUR - Comme le printemps, le confinement ou un de ses nombreux variants est de retour sur toute la France. Une des désormais habituelles campagnes de peur l'a précédé, mais cette fois de nombreuses voix se sont élevées contre les oiseaux de malheur qui ont œuvré à cette campagne. En cause, leur lien avec l'AP-HP (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris).

« Monsieur le président, il faut nous confiner. » C’est Patrick Bouet, Président du Conseil national de l'ordre des médecins qui le demande dans une tribune publiée par Libération le 30 mars. Et il n’est pas seul à le penser puisque deux jours plus tôt le JDD a publié une tribune signée par 41 directeurs de crise (sic) de l'AP-HP déplorant « l’insuffisance » des « mesures actuelles » et prévenant qu’un « tri des patients afin de sauver le plus de vies possibles » était à venir. « Nous avons une quasi-certitude sur le nombre de lits de soins critiques qui seront nécessaires et nous savons d'ores et déjà que nos capacités de prise en charge seront dépassées (…) » Certitude ou quasi-certitude ? On frôle l’oxymore.

Fais-moi mal, Emmanuel ! Oh oui, fais-moi mal !

Reste que la prédiction vient s’ajouter à une interminable liste d'autres prédictions alarmantes, alarmistes ou simplement catastrophistes (au choix). On se souviendra avec plaisir (ou non) de celle du président de la République qui annonçait le 28 octobre : « Quoi que nous fassions, près de 9 000 patients seront en réanimation à la mi-novembre », et dans la même allocution que « 400 000 morts supplémentaires seraient à déplorer en quelques mois si rien n’était fait. »

Un peu à côté de la plaque, non ? Mais ce n'est pas grave, tout le monde a oublié cette prédiction qui pourtant a justifié le deuxième confinement... Et puis la prédiction hasardeuse, c'est une habitude dans le milieu de la virologie politique, le champion du monde toutes catégories restant le célèbre Neil Ferguson qui avec l'arrivée de la grippe aviaire (H5N1) en 2005 annoncait pas moins de 200 millions de morts. Finalement 455 personnes sont mortes dans le monde. Mais Ferguson est resté en poste à l'Imperial College de Londres et c'est encore lui qui avait annoncé 400 000 morts en France en mars 2020 "si rien n'était fait". Nostradamus n’a qu’à bien se tenir.

Le pire du pire, mais en pire 

Précurseur, avant-gardiste ou simple génie, Ferguson a lancé une véritable mode. Depuis un an, prédire le pire est en vogue. Pourquoi ? « Jouer sur le tri, jouer sur l’émotion, jouer sur le fait qu’il y a un avion qui s’écrase tous les jours, c’est de la dramatisation (…) Il y a une prime à être alarmiste : ça donne une position beaucoup plus forte (…) » a jugé le Dr Marcel Ichou sur LCI.

Certains empêcheurs d'alarmer en rond pointent le rôle de l'AP-HP dans ce petit jeu. Il est vrai que la tribune du JDD citée plus haut est signée par 41 directeurs de crise de l'AP-HP, il est vrai aussi que Gilles Pialoux, coutumier du fait et chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Tenon (AP-HP, donc) a affirmé dans Le Parisien du 30 mars : « On va dans le mur si on ne reconfine pas dès le 1er avril. » 

Il est vrai, encore, que Martin Hirsh, pour sa part directeur général de l'AP-HP compte parmi ses nombreuses spécialités celle du « cri d'alarme », réclamant selon son humeur « confinement plus strict », « nouvelles mesures », etc.

« Soit c'est confinement le week-end et il faut l’accompagner avec très grande vigilance pendant la semaine, en incitant chacun au télétravail, à se faire tester, à ne prendre aucun risque. Soit c'est un confinement plus large, et dans ce cas-là, il faut que ce soit respecté [et] plus strict. »

"Ce sont les fossoyeurs de l'hôpital qui tirent la sonnette d’alarme"

Christophe Prudhomme, syndicaliste urgentiste est de ceux qui ne s'en laissent pas conter. Voici ce qu'il a dit sur CNews le 30 mars: «  Il y a un affrontement entre l’establishment médical que représentent ces directeurs médicaux de crise, dont un certain nombre ne voient jamais de malades, et les médecins de terrain. Le directeur médical de crise de l’AP-HP (…) a refusé de maintenir des lits de réanimation ouverts en vantant les lits de réanimation éphémères et les TGV sanitaires. » Et d'en rajouter une couche dans un entretien au Figaro du lendemain : « Ce sont les fossoyeurs de l'hôpital qui tirent aujourd'hui la sonnette d’alarme. Ces mêmes personnes qui s'alarment aujourd'hui du manque de lits sont responsables de ce manque puisqu'ils ont accompagné toutes les restructurations, toutes les fermetures de lits de ces dernières années (…) Ce sont de vrais Ponce Pilate. »

Concernant la tribune du JDD, Patrick Pelloux, médiatique médecin urgentiste a lui dénoncé des « médecins alarmistes" et un « coup de com", invitant à prendre les chiffres des personnes en réanimation avec prudence : « Seules 25% sont en réanimation avec intubation et respirateurs. Tous les autres sont dans des unités de soin continu qui dépendent des réanimateurs mais ce ne sont pas des réanimations »

L’épidémiologiste Martin Blachier, qui donne l’heure deux fois par jour, a pour sa part estimé sur CNews qu’il y avait un « décalage entre l'AP-HP et le reste des réanimateurs. (…) Il y a autant de patients dans le privé que dans les établissements publics non AP-HP, pourtant, il n'y a que l'AP-HP qui crie comme ça. »

Enfin, la Fédération hospitalière française d'Île-de-France (FHF) qui réunit tous les hôpitaux franciliens en dehors de l'APHP a elle réagi à la tribune des directeurs de crise de l'AP-HP en ces termes : « Nos médecins et directeurs regrettent l'expression publique choisie, dont la véhémence est de nature à inquiéter les malades et leurs familles. »

À défaut d'autre chose, l'AP-HP va-t-elle réussir à faire l'unanimité contre elle ?

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