Une ferme géante de micro-algues de 32 ha en construction en Bretagne
Ce sera, selon le porteur de projet, la plus grande ferme de micro-algues d'Europe: "un projet global et vertueux" de 32 hectares est en cours de construction à Plouguenast (Côtes-d'Armor), une petite commune de près de 2.000 habitants en centre-Bretagne.
LDC Algae envisage d'y produire par an près de 7.800 tonnes de micro-algues, de la chlorelle de quatre à six microns, à destination des industries cosmétique, pharmaceutique et alimentaire.
Ce projet à 30 millions d'euros est né dans la tête de René-Jean Guillard, porteur du projet LDC Algae. Ce Nantais d'origine est responsable en recherche et développement (R&D) depuis 2004 pour Skyworld China, possédant, entre autre, un centre de R&D en cosmétique instrumentale.
"En 2010, L'Oréal nous a demandé de trouver une solution pour réduire l'huile de palme de la cosmétique. Les micro-algues étaient la candidate idéale", se souvient-il. Mais cette solution n'était à l'époque pas concurrentielle par rapport à l'huile de palme.
En 2012, l'idée d'une grande ferme de micro-algues prend alors forme. Skyworld China et Expanoleo Mexico, les deux porteurs de projet, décident de l'installer en Bretagne car la région dispose d'une ressource indispensable au développement du projet: les effluents d'élevages. "Une cinquantaine d'éleveurs sont prêts à travailler avec nous dans un rayon de 15 km à la ronde", assure René-Jean Guillard.
De ces effluents d'élevages (du lisier), LDC Algae veut "tout valoriser". La méthanisation va produire électricité et chaleur qui vont permettre le développement dans des tubes (des photobioréacteurs) des micro-algues. Elle seront alimentées par des nutriments obtenus grâce à une fraction liquide filtrée et "hygiénisée" de digestat issu de la méthanisation, et de CO2, capté à la sortie des co-générateurs.
La chlorelle grandit alors entre 12 et 18H00. "On récolte tous les jours. On sépare les micro-algues de l'eau pour faire un concentré. L'eau repart ensuite dans les tubes", explique le concepteur.
Les micro-algues sont ensuite destinées en majorité à la nutrition animale. Injecté par exemple dans l'eau des poules, le concentré renforce leur système immunitaire et favorise la ponte, selon LDC Algae.
- Zéro déchet -
Pour parvenir au zéro déchet, le résidu solide du digestat issu de la méthanisation va servir de base à la fabrication d'un lombricompost. Devenu un fertilisant grâce au travail des vers de terre, le produit final est utilisé dans l'agriculture biologique. A partir de la lombriculture, LDC Algae produit également un liquide concentré, le percolat, reconnu comme insecticide.
Si la production n'a pas encore commencé à Plouguenast, LDC Algae a mis en place dès 2014 un pilote industriel à Trévé, une commune voisine.
A plein régime, la ferme de Plouguenast devrait embaucher 40 personnes. "C'est un minimum", souligne René-Jean Guillard, "c'est sans compter tous les produits annexes liés à l'activité".
LDC Algae va en effet commercialiser une boisson vitaminée à base des micro-algues (sous la marque Green Bloom), une gamme de cosmétiques et des meubles citadins fabriqués en lombricompost pour cultiver des plantes ou aromates chez soi.
Mais le projet de Plouguenast a déjà cumulé presque deux ans de retard. Prévues fin 2016, les premières livraisons de lisier arriveront finalement entre août et septembre 2018, et la production devrait commencer d'ici la fin de l'année.
A l'origine de ce retard, l'attente pour obtenir les autorisations mais aussi "des opposants de la première heure". Dont l'association Eau et rivières de Bretagne qui affirme que la ferme a été construite sur 12 hectares de zones humides, des espaces sensibles avec une riche biodiversité. Dans son étude d'impact, LDC Algae avait comptabilisé 1,2 hectares de zones humides.
"Le commissaire enquêteur avait souhaité une contre-expertise pour avoir un troisième avis avec des compléments d'études réalisés sur le terrain", précise Eau et rivières. Mais les travaux de terrassement ayant déjà commencé, "aujourd'hui ce n'est plus possible de savoir combien il y a de zones humides. C'est parole contre parole", regrette l'association qui avait porté plainte en 2015 pour faire annuler l'autorisation d'exploiter.
De son côté, René-Jean Guillard assure que seuls "1.300 m2 de zones humides ont été détruites" mais qu'elles seront compensées par la création de 7.000 m2 de zones humides sur le même bassin versant.
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