Avec une inflation de 1.000.000%, où va le Venezuela ?

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Par Esteban ROJAS, Alexander MARTINEZ - Caracas (AFP)
Publié le 26 juillet 2018 - 08:45
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Un homme compte des billets de 1000 bolivars au marché municipal de Coche, près de Caracas, le 20 juin 2018 au Venezuela
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© Federico PARRA / AFP/Archives
Un homme compte des billets de 1000 bolivars au marché municipal de Coche, près de Caracas, le 20 juin 2018 au Venezuela
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Explosion sociale? Le gouvernement sera-t-il forcé de libérer l'économie? Avec une inflation désormais projetée à 1.000.000% d'ici à fin décembre par le FMI, tous les scénarios sont possibles dans ce pays où les conditions de vie de détériorent rapidement.

Pour faire face à cette hyperinflation, le président Nicolas Maduro a annoncé mercredi que le Venezuela allait bientôt supprimer cinq zéros de sa monnaie, le bolivar. "Le 20 août démarre (...) le plan de redressement économique avec la reconversion monétaire, cinq zéros en moins", a-t-il déclaré.

A l'heure actuelle, le salaire minimum d'un Vénézuélien -1,5 dollars au taux du marché noir, la référence de facto- lui permet à peine d'acheter un kilo de poulet.

Les finances publiques, elles, sont exsangues. Le Venezuela tire 96% de ses revenus du brut. Or sa production de pétrole s'est effondrée d'au moins la moitié en un an et demi faute de liquidités pour moderniser les champs pétroliers. Selon l'OPEP, la production de brut a chuté de 3,2 millions de barils par jour (mbj) en 2008 à 1,5 millions en juin.

Le panorama économique lugubre du FMI, pour lequel tous les voyants sont au rouge -avec une contraction du PIB attendue à 18% en 2018- n'étonne pas outre mesure ceux qui vivent ces problèmes au quotidien.

"Plus rien ne me surprend. Jour après jour, les prix augmentent. Ce n'est pas graduel, c'est exponentiel", confie à l'AFP Marcos Salazar, qui mange un hamburger dans la rue pour le prix d'un salaire minimum.

Ce professeur de 31 ans survit grâce à ses trois emplois et l'envoi d'argent de proches résidant à l'étranger.

On estime que 1,6 million de Vénézuéliens ont émigré depuis 2016 à cause de la débâcle économique qui a fait basculer 87% de la population dans la pauvreté, selon une étude des principales université du pays.

Le Fonds monétaire international anticipe une hausse des départs, affectant de plus en plus les pays voisins. La pénurie est généralisée au Venezuela, où les services publics, des soins à l'électricité, en passant par l'eau ou les transports, se sont fortement dégradés.

- Réformer en profondeur -

"La seule façon pour sortir de l'hyperinflation, c'est avec des réformes économiques profondes. C'est de cette manière qu'on y a mis un terme dans tous les autres cas", déclare à l'AFP Henkel Garcia, directeur du cabinet Econometrica, qui rappelle que ces phénomènes ne durent pas éternellement en donnant l'exemple du Zimbabwe.

Le FMI pointe par ailleurs du doigt la mise en circulation d'un nombre toujours plus grand de billets, ce qui alimente l'hyperinflation.

Pour Henkel Garcia il faut aussi sauver l'industrie vénézuélienne, qui fonctionne actuellement à 30% de sa capacité, mettre un terme au contrôle des changes et des prix, qui donne à l'Etat le monopole des devises.

Trouver d'autres sources de financement sera aussi nécessaire, étant donné les sanctions financière américaines qui visent le Venezuela et l'entreprise pétrolière publique PDVSA.

En novembre 2017, le Venezuela et PDVSA ont été déclarés en défaut partiel par plusieurs agences de notation.

Pour redresser la situation, Econometrica estime qu'il faudrait injecter entre 20 et 30 milliards de dollars par an durant deux ou trois ans.

Pourtant, "l'exécutif n'a aucun intérêt à modifier la politique économique", juge un autre cabinet, Ecoanalitica, dans un récent rapport.

Face à une telle situation, le président socialiste Maduro, dont la réélection en mai jusqu'en 2025 n'est pas reconnue par une grande partie de la communauté internationale, devra joueur les équilibristes pour éviter de perdre le contrôle.

Travailleurs de la santé, du secteur électrique, retraités, professeurs: les conflits sociaux se multiplient ces dernières semaines pour demander des hausses de salaire et une amélioration des conditions de travail.

Ces initiatives sont pour l'heure isolées et l'opposition, dont nombre de ses dirigeants sont à l'étranger ou en prison, apparaît dépourvue de leadership.

Mais "la grogne sociale va continuer à prendre de l'ampleur", déclare à l'AFP l'analyste politique Michael Penfold.

"Il est probable que seule l'aggravation de la crise entraîne les pressions nécessaires pour déséquilibrer" la coalition actuellement au pouvoir, voire même "la remplacer", prévient Ecoanalitica, qui prévoit des changements structurels en 2019.

Récemment, des dirigeants du chavisme, le mouvement au pouvoir, ont haussé le ton pour réclamer un virage économique.

"Voilà 19 ans que la révolution a eu lieu, nous sommes désormais responsables des bonnes et des mauvaises choses", a lâché Freddy Bernal, collaborateur influent du président.

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