La traite des retraites
EDITO - La taille, la gabelle et maintenant la traite des retraites (1).
Allons-nous assister à un braquage en plein jour ?
Olivier Dussopt, notre ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion, a annoncé ce week-end que “le gouvernement envisage de prélever de 1 à 3 milliards dans les excédents du régime des retraites complémentaires Agirc-Arrco du privé” (2).
La dégradation économique du pays est déjà plus qu’“en marche”...
Nécessaire pour financer le quoi qu'il en coûte ou l'aide à l'Ukraine, la taille (3) version Emmanuel 1er, dont les sommes astronomiques atterrissent on ne sait où, constitue ainsi un transfert de richesse, par des dépenses non contrôlées (laxisme budgétaire que l’on constate dans tous les domaines : combien nous coûtent réellement nos efforts en faveur de l’Ukraine ?). A cela, s’ajoute l'augmentation du salaire des membres du gouvernement financée par la gabelle (4), impôt sur à peu près tout qui, dans sa version moderne, est en croissance constante.
La France s'étant endettée à hauteur de centaines de milliards, il faut bien trouver de l'argent pour rembourser ne serait-ce que le montant en expansion constante des intérêts des emprunts.
Merci à la loi du 1er janvier 1973
Des prêts accordés par qui ?
Par les gentils banquiers privés et les créanciers internationaux (comme la Chine et certains fonds d’investissement) sans lesquels la France serait déjà en faillite. Gentils parce qu'ils nous prêtent généreusement à 2,5% d'intérêts par an seulement un argent qu'ils ont emprunté eux à un taux d'intérêt de 0,5% auprès de la Banque centrale européenne. Une BCE qui elle-même est financée par quoi ? Par l'argent du contribuable ! Cela revient à nous revendre cinq fois le prix ce que l’on a consenti à vendre !
Merci à la loi du 1er janvier 1973 imposée par un ancien Premier ministre, Georges Pompidou, qui fut directeur général de la banque Rothschild sous la présidence du général de Gaulle. Si la France s'autofinançait, comme cela lui était permis avant la loi du 1er janvier 1973, elle pourrait se prêter à elle-même l'argent du contribuable sans devoir en payer les intérêts.
Les intérêts de notre dette abyssale (plus de 3 000 milliards) sont désormais de l’ordre de 60 milliards par an et nous devons donc, vous l’avez compris, rembourser à des banques privées notre propre argent. C’est génial !
Et tout cela résulte de décisions qui ont été prises “au nom du peuple français” par les représentants élus au parlement et par le gouvernement. Interdit donc de vous plaindre !
Au début du scénario, il y a un magot
Mais revenons à notre braquage en cours.
Au début du scénario, il y a un magot. Ce magot s'élève à plusieurs dizaines de milliards d’euros. C'est l'argent des caisses de retraite complémentaire des salariés du privé. Piloté par le patronat et les syndicats, le régime Agirc-Arrco distribue des pensions à 13 millions de retraités, financées par 26 millions de cotisants.
A l'inverse du régime de base de la Sécurité sociale déficitaire structurellement, le régime complémentaire bien géré est bénéficiaire. L'année dernière, il a dégagé cinq milliards d’euros d'excédents. En outre, il est assis sur de plantureuses réserves qui atteignaient 68 milliards d’euros au 31 décembre 2022, soit l'équivalent de neuf à dix mois de prestations.
Et surtout, avec la réforme des retraites entrée en vigueur le 1er septembre 2023, l'Agirc-Arrco va toucher le jackpot : 22 milliards de recettes supplémentaires lors des quinze prochaines années.
Il est tout à fait logique que ce gouvernement veuille s'approprier ce magot.
Quand le gouvernement nous dit: “Quoi qu'il en coûte”, ce n'est pas “quoi qu'il en coûte aux politiciens en général et à la Macronie en particulier” qu'il faut comprendre, c'est “quoi qu'il en coûte aux Français”. Au contribuable. A vous et moi.
Voilà pourquoi l'économiste Philippe Herlin a publié hier un tweet assez virulent :
Retraites : l'État veut puiser dans les caisses de l'Agirc-Arrco
— Philippe Herlin (@philippeherlin) October 1, 2023
➡️Un gouvernement d’escrocs, des mafieux, il faut se débarrasser de cette engeance.https://t.co/aGcp6RRQLB
L’excuse de provocation
A-t-il écrit cela sous le coup de la colère ? Ou, plus précisément, sur ce qu'on appelle en droit français “l'excuse de provocation” ? Toute personne qui s'estime insultée, blessée, lésée par une autre personne peut en effet tenir publiquement à l'encontre de cette autre personne des propos qui sinon engageraient de fait sa responsabilité pénale sur la base du délit d'injure ou d'outrage. Ceci toutefois dans la limite suivante : à l'instar de la légitime défense du droit pénal, les propos injurieux ou outrageants prononcés ne doivent pas dépasser,"en nature et dans leur portée”, le préjudice avancé par l'auteur de ces propos comme lui ayant été causé par les faits qu'il commente à cette occasion.
Traduction : si une personne fait ou dit quelque chose à votre sujet qui selon vous constitue un crime, l'excuse de provocation permet de tenir à l'encontre de cette personne des propos qui sont constitutifs du délit d'injure ou du délit d'outrage public envers une “personne dépositaire de l'autorité publique” comme l'est un ministre ainsi pris à partie dans l'exercice de ses fonctions.
Or, si le gouvernement procède à ce braquage, alors tous les citoyens français en seront les victimes. Et un tel acte est considéré par la loi pénale comme un crime. Tout citoyen fustigeant les auteurs de ce crime annoncé en des propos injurieux ou outrageants bénéficiera dès lors de l'excuse de provocation.
Et ceci malgré le fait qu'en l'état, le braquage annoncé de l'Agirc-Arrco en est uniquement au stade de la tentative. Pourquoi ? Parce qu'en droit pénal français, quand il s'agit de faits qui sont constitutifs d'un crime, la simple tentative est punissable. Pas besoin donc que ce crime ait été effectivement commis pour que l'excuse de provocation soit recevable.
Néanmoins, je laisse à Philippe Herlin la responsabilité de ses propos. Et puis, qui suis-je pour le juger ?
(1) Cet édito aurait pu être intitulé « Le casse du siècle », mais cela a déjà été fait, concernant le passage à l'euro ! Cet euro que l’on nous a vendu 6,5596 francs, à savoir approximativement deux fois le prix de sa véritable valeur. Mathématique : les prix ont doublé dès la mise en place de l'euro. Oui, le passage à l'euro constitue un impôt déguisé, d'un montant de l’ordre de 50% sur tout ce que l’on possédait et que l’on allait acquérir, qui a été payé par tous les citoyens de la zone euro. Un impôt qui départit chacun de 50% de ses biens, n'affecte que modérément les riches (car avec seulement 50% d'une très grosse somme, on peut encore vivre aisément), mais affecte significativement les moins aisés (car déjà qu'avec peu, il est difficile de vivre décemment, avec la moitié de peu, c'est survivre qui devient carrément problématique).
Le passage à l'euro également appelé par les observateurs accomplis : “Impôt sur l'infortune”.
(2) L'Agirc-Arrco est la retraite complémentaire des salariés de l’agriculture, du commerce, de l’industrie et des services. Elle complète la retraite obligatoire de base de ces salariés qui est versée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse pour le régime général ou par la mutualité sociale agricole pour les salariés agricoles.
(3) Instituée au Moyen-Âge, la taille est un impôt direct qui est devenu annuel et permanent en 1439. Cet impôt avait pour but de financer l'effort de guerre et il était très impopulaire. Pourquoi ? Parce que les bourgeois des grandes villes, le clergé et la noblesse en étaient affranchis. Oui, exactement comme de nos jours, au sein de la République “des privilégiés et des nantis”.
Ceux qui demandent tout le temps aux Français de se serrer davantage la ceinture et qui s'affranchissent d'avoir à participer à cet effort de guerre. Un effort de guerre et de paix permanent.
Comme quoi, rien n'a véritablement changé semble-t-il. La Révolution de 1789 s’est substituée à la monarchie et la République qui en est issue prend des allures de « révolution » consistant à faire un tour complet sur soi-même, c'est-à-dire à se retrouver au final exactement à la même place ou dans la même situation.
(4) La gabelle désignait à l'origine un impôt indirect prélevé sur divers articles de la production industrielle ou agricole en France, durant le Moyen Âge et sous l'Ancien Régime : gabelle des vins, des draps, du blé, etc. À partir de1342, le terme désigna uniquement l’impôt sur le sel.
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