Le métaverse de la "guerre en Ukraine" est-il un mythe ou la réalité ?
EDITO - La question mérite d’être posée. Pour quiconque veut garder un esprit apartisan face aux narratifs simplistes qui nous sont donnés sur ce conflit, il est évident que rien n’est tout blanc ou tout noir, qu’il s’agisse des circonstances qui ont conduit à cette guerre, du déroulé des évènements qui ont lieu actuellement en Ukraine, ou même de ce qui se produira par la suite.
À en croire la presse grand public, pour laquelle l’analyse situationnelle démarre à compter de l’instant où les forces armées russes ont pénétré le territoire ukrainien, Vladimir Poutine serait le super méchant, le « Thanos » de l’histoire, tandis que les dirigeants occidentaux seraient, à l’inverse, les super héros faisant cause commune pour l’empêcher de détruire le monde. Bref, l’union sacrée des gentils contre « the » méchant du film.
Et il ne s’agit que de la première partie du film. Dans « La guerre en Ukraine 2 », la suite que tous les médias ne manqueront pas de donner à cette superproduction, on peut s’attendre à ce que Xi Jinping, le président chinois, devienne le personnage autour duquel cette suite sera articulée au principal.
En réalité, cette esquisse de conflagration en Europe de l’Est ne constitue qu’une gigantesque pièce de théâtre dont les peuples seront in fine les grandes victimes d’un dénouement qui se veut systématiquement malheureux. Rappelons la fameuse citation de Paul Valéry en 1913 : « La guerre, c'est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent et ne se massacrent pas. » Pour les peuples, la guerre est toujours un choix perdant.
Quoi qu’il en soit, s’il nous faut analyser géopolitiquement le conflit russo-ukrainien sur un temps plus long, entre le 6 mars 1991, date de l’accord conclu entre dirigeants soviétiques et occidentaux, et la période qui précède l’opération militaire russe en Ukraine, les visées impérialistes américaines ne peuvent que difficilement conduire à une autre conclusion : le Super Méchant de l’histoire, c’est l’Otan.
Alors qu’en vertu de l’accord officiellement conclu à Bonn, l’Otan s’était engagée à ne jamais étendre son influence à l’Est, encore moins son territoire au-delà des frontières de l’Allemagne réunifiée, force est de constater que, depuis cette date du 6 mars 1991, l’Otan n’a eu de cesse de violer ouvertement ce pacte… que la Russie, elle, par contre, a strictement respecté. Hé oui !
Dès le lendemain de ces pourparlers, les Américains et ses vassaux principaux (France, Royaume-Uni, Allemagne) se sont employés à s’approprier l’espace géographique entre la frontière allemande et la frontière russe, physiquement ou politiquement, ce qui revient peu ou prou au même.
En effet, quand bien même un pays n’a pas officiellement intégré l’Otan, si son chef d’État applique la politique dictée par l’alliance transatlantique, les effets n’en demeurent pas moins les mêmes : l’Otan s’est rapprochée de la frontière russe.
Pour la Russie, la situation est géopolitiquement d’autant plus inacceptable que l’Ukraine partage sa frontière directement avec elle, de la même manière que la présence militaire des Russes à Cuba en 1962 était une situation géopolitique inacceptable pour les États-Unis.
Dans un cas comme dans l’autre, l’intégrité physique du territoire est menacée par une puissance militaire détentrice d’une force de destruction massive. C’est dans la compréhension de ce contexte qu’il faut rappeler le discours provocateur de Volodymyr Zelensky, le 19 février 2022 à Munich, soit cinq jours avant l’offensive russe. Celui-ci menace de déchirer le Mémorandum de Budapest (document garanti par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la Russie, par lequel l’Ukraine, comme la Biélorussie et le Kazakhstan, renonçait à tout armement nucléaire). Peut-on sincèrement imaginer que les Américains auraient pu ignorer la volonté manifeste de l’Ukraine de se renucléariser ? On ne peut pas vouloir, d’un côté, empêcher l’Iran d’accéder à la bombe atomique et, de l’autre, fermer les yeux quand il s’agit de l’Ukraine.
À cela, il faut ajouter la guerre économique, elle aussi, incessante que les États-Unis et ses alliés mènent à la Russie - sans que la Russie n’ait, à l’inverse, jamais cessé de leur livrer une grande partie de son énergie (pétrole et gaz), capitale pour la bonne marche de l’économie occidentale.
Si l’histoire donne donc tort au camp occidental, qui œuvre à imposer un narratif monolithique et sans nuances sur le conflit ukrainien, le côté russe n’est pas, pour autant, exempt de toute velléité de manipulation de l’opinion publique. Dans le cadre de leur propagande de guerre, l’équivalent du CSA en France a imposé aux médias la suppression des termes « invasion » ou « déclaration de guerre », interdisant aussi de faire référence aux pertes civiles liées à l’opération.
Comme les deux parties au litige ont une vision du monde diamétralement opposées sur les plans politique, culturel et économique, l’un et l’autre font usage, pour l’essentiel, dans leur propagande de ce que l’on appelle en français, un oxymore.
« Un jour, c’était la nuit. J’entrai par la porte de sortie. Soudain, assis sur une pierre en bois, j’ai vu l’ombre scintillante d’un nain géant, avancer vers moi à reculons. Bien, croyez-moi, ne me croyez pas : cet homme, c’était ma mère ! » un membre du collectif citoyen expert en communication individuelle.
La première victime d'une guerre, c'est toujours la vérité. Dans ce « métaverse », la vérité qui vous est affirmée n’est plus tributaire de la réalité. Elle est suzeraine au pouvoir. Aussi, comme pour la démocratie, Dieu et le père Noël : vous n’êtes pas obligés d’y croire.
*oxymore : Figure de style qui consiste à allier deux mots de sens contradictoires
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