Macron et l’Éducation nationale : abracadabra !
ÉDITO - Ça y est. Au perpétuel jeu de bonneteau des promesses, c’est leur tour. Il faut “mieux reconnaître et mieux payer les professeurs”, a annoncé Emmanuel Macron le 20 avril 2023, lors d’un déplacement dans un collège de l’Hérault. Le président lance sa réforme pour “sauver” l’éducation nationale.
Autant dire qu’elle est en danger de mort.
Souvenez-vous, il fallait aussi sauver le système de santé français... Il fallait aussi “mieux reconnaître et mieux payer” les soignants... Depuis, on a vu le résultat !
Le gouvernement traîne toujours pour réintégrer les soignants suspendus à cause de leur refus d’être contraints à une injection expérimentale. Les déserts médicaux s’étendent : trouver un rendez-vous auprès d’un généraliste relève du parcours du combattant. La fermeture des lits d’hôpitaux s’est accélérée depuis 2020 alors que l’exécutif serinait que nous étions “en guerre”.
De façon plus subreptice, les données de santé des Français ont été livrées en pâture au “Health data hub”, une plateforme numérique créée dans l’urgence, sans appel d’offres véritable, pour le plus grand profit de Microsoft. La loi Rist décourage les plus téméraires des médecins spécialistes à accepter les gardes d’astreintes, sans un légitime débat de fond quant aux rémunérations.
Et n'oublions pas au sein de cette liste non exhaustive les gargantuesques montants dépensés pour des vaccins anti-Covid qui vampirisent les budgets de la santé alors que l’on cherche toujours l’efficacité réelle de ces produits aux contrats aussi opaques que dispendieux...
Alors, à qui le tour d’être sauvé ?
S’il ne faut pas oublier le sort qui a été réservé à quelques personnels soignants exerçant au sein de l’Éducation nationale, les professeurs n’ont pas été soumis à l’obligation vaccinale. Pour autant, voilà qui ne leur a pas donné pour autant l’envie de rester en poste.
En dix ans, les démissions ont été multipliées par quatre. Les professeurs manquent donc à l’appel au point que la Cour des comptes appelle à une refonte totale du recrutement. On parle de manque d’attractivité des salaires, d’inégalités territoriales... Cela ne vous rappelle rien ?
La question n’est plus une histoire de vocation. Le personnel administratif non productif d’enseignement prolifère (+44% entre 2015 et 2021) alors que le corps enseignant n’augmente que de 1,6% pendant la même période. Cela ne vous rappelle toujours rien ? Oui, comme à l’hôpital.
Emmanuel Macron, qui appelle donc à une réforme afin de sortir l’Éducation nationale de l’impasse, souhaite tout d’abord augmenter les salaires à raison de “cent ou deux cent trente euros par mois”.
Au terme de six années de mandat, le seul constat sur la situation et la torpeur des professeurs se résume-t-il uniquement à un problème pécunier ? Macron a déjà fait des promesses en ce sens, dans une lettre adressée aux enseignants en septembre 2022. Au vu de l’inflation galopante, ces quelques miettes semblent dérisoires.
De plus, en Europe, les enseignants français du secondaire sont structurellement mal payés. En début de carrière, ils émargent à moins de 30 000 euros brut annuel. En Allemagne, c’est plus de 60 000 euros, au Danemark, plus de 55 000 et plus de 40 000 aux Pays-Bas. Une enveloppe de 935 millions d’euros est dédiée à la revalorisation salariale de la profession, dans le cadre du projet de loi finances 2023.
Mais cette somme est déjà conditionnée à l’acceptation de “missions supplémentaire”, dixit Macron. S’agit-il donc d’une revalorisation ou d’une manière de dire que les professeurs mal payés n’en font pas assez ? L'enseignement premier qu'il y a lieu de tirer de l'exercice du pouvoir par Emmanuel Macron, c'est qu’il y a toujours une réelle différence entre la promesse initiale et ce qui est obtenu véritablement...
Ce fameux "en même temps", qui n’est que trop souvent au préjudice des populations les plus défavorisées ou les plus exposées aux mutations socio-économiques de notre temps, ne s’illustre jamais aussi bien que dans les réformes macroniennes : toujours dans le même sens, entre moqueries faites au peuple et passages en force sans concertation.
Voilà qui n’empêche pas l'habituel “bon mot” d’autocongratulation dont s'est fendu le Président au moment de la présentation de son projet. Ce dernier représenterait pour les intéressés “un changement de vie”, “une révolution copernicienne”. Ah, Emmanuel Macron, ce soleil autour duquel tout doit sempiternellement tourner dans le système lunaire de la scène politique française...
Ces annonces ont été froidement accueillies par les syndicats, qui ont compris qu'ils ne sont considérés que comme les satellites du jupitérien Emmanuel Macron. “C'est un marché de dupes” résume Stéphane Crochet, secrétaire générale du SE-Unsa. Il n’y a point de “choc d’attractivité”, selon Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU. Quant “au pacte” lié à la volonté de récompenser les enseignants qui accepteraient plus de tâches, il est critiqué durement : “une provocation”, résume Crochet.
N’en jetez plus ! N’est-on pas un peu trop injuste avec notre cher, très cher, président de la République ? Car il y a au moins une enseignante qui ne connaît pas la crise. Elle voit son pouvoir d’achat exploser. Il s’agit d’un professeur de Lettres, qui fait des ateliers de théâtre. Un professeur qui coûte quelque 300 000 euros chaque année au contribuable français. Son nom est Brigitte Macron.
Voilà enfin qui permet de relever la moyenne des revenus des personnels de l’Éducation nationale !
Toutefois, comme tout le monde n’a pas la chance d’être première dame et de bénéficier en conséquence de ce statut (l’une des premières mesures souhaitées par notre président réformateur), il reste encore à trouver une solution pour les 859 000 autres professeurs dont la situation pécuniaire et les conditions de travail ne cessent de se dégrader depuis 2017.
Brigitte est peut-être déjà venue en aide à Emmanuel en lui soufflant en guise de conseil cette petite phrase: “Les professeurs n’ont pas de bons salaires ? Qu’on leur donne des tâches supplémentaires !”
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