Chronique N°69 - « En toute inconscience, la troisième dose est totalement hors AMM ! »
Cela ne semble gêner personne…
Je vais commencer cette chronique par vous faire une piqûre de rappel. C’est le cas de le dire…
Le 7 juillet sur France Info, le « billet sciences » d’Anne-Laure Barral, était consacré à l’immunité des personnes âgées et s’appuyait pour une fois sur une étude fort intéressante. Il était grand temps !
Journaliste, animatrice de la tranche horaire, après l’audition d’un court jingle : « Le Billet sciences. On évoquait il y a cinq minutes l’idée d’une vaccination obligatoire pour les soignants. Mais, au-delà des soignants, Anne-Laure Barral, une nouvelle étude montre pourquoi la vaccination du plus grand nombre est utile pour protéger les plus âgés » [1].
[1] Dommage, l’animatrice a manqué une belle occasion de se taire. Ce n’est pas vraiment ce qu’a montré cette étude, comme nous allons le voir…
Anne-Laure Barral : « Aujourd’hui, la moitié des personnels en Ehpad et 64% de ceux des hôpitaux ont reçu une première injection selon Santé Publique France. Mais, c’est aussi un peu plus de la moitié des 50-64 ans, ou encore 30% des 30-49 ans, selon COVIDTRACKER. Pourtant, tous peuvent croiser aujourd’hui une personne âgée [2] et donc, l’infecter avec un variant, comme le variant delta, beaucoup plus contagieux que la souche d’origine [3] ou même que la souche anglaise à l’origine de la troisième vague de covid de ce printemps ».
[2] En partie faux. De nombreux hôpitaux et Ehpad ont, ces derniers temps (notamment pendant la quatrième vague), interdit les visites, sauf pour les fins de vie…
[3] Plus contagieux certes, mais beaucoup moins létal… Mieux vaut un rhume très contagieux qu’une peste peu contagieuse !
L’animatrice : « Mais si cette personne âgée est vaccinée, Anne-Laure, elle est protégée ? » A-LB : « Oui, mais moins qu’une personne plus jeune. » [4]
[4] Merci de le reconnaître enfin. Je m’étais arrêté le 8 janvier 2021 dans ma chronique N°46 (ici) sur la perte d’efficacité de près de dix points pour le vaccin Moderna chez les plus de 65 ans, qui en réalité avaient un âge médian de 70,6 années, par rapport au 18-64 ans. Et j’alertais alors sur l’urgence à connaïtre la baisse d’efficacité vaccinale observée tous les cinq ans (à 75 ans, à 80 ans, à 85 ans, à 90 ans, à 95 ans, …). L’étude anglaise publiée en ligne dans Nature, le 30 juin 2021, allait m’apporter un bon début de réponse…
Vaccin Moderna - Baisse d'efficacité chez les 65 ans et plus
A-LB poursuit son propos : « En effet, les vaccins ne sont pas des totems d’immunité. Certes, ils réduisent les formes graves de covid [5], et c’est déjà pas mal. »
[5] Non, toujours pas d’accord. Cela n’a pas été démontré dans les essais cliniques préliminaires réalisés avec les quatre vaccins actuellement autorisés dans l’Union Européenne. Un amalgame a été savamment fait entre les formes peu sévères et les très sévères. Les premières, prises en charge dans des services hospitaliers « lambda » qui guérissent sous deux ou trois semaines, sont au moins cinq fois plus fréquentes que les très sévères qui, elles, justifient un passage en réanimation avec intubation, et ventilation mécanique. Ce sont ces dernières qu’il importe d’éviter. Nous n’avons aucune donnée publiée sur l’efficacité de la vaccination anti-covid à réduire ces formes très sévères !
A-LB : « Mais chez les personnes âgées, ou celles dont le système immunitaire est plus fragile, ils sont moins efficaces. Et c’est ce que vient de rappeler une étude publiée dans la revue Nature et menée par l’équipe de l’immunologue de l’université de Cambridge, Ravindra Gupta. Elle a recruté 140 patients de 72 ans et plus. Et ce que les chercheurs ont vu, c’est que trois semaines après une première injection de vaccin Pfizer, le taux d’anticorps baissait légèrement, en fonction de l’âge des participants. Pour les plus de 80 ans, il était même deux fois plus bas et la moitié d’entre eux n’avait plus suffisamment d’anticorps pour éviter l’infection. »
L’animatrice : « C’est pour ça qu’il faut deux doses ? »
A-LB : « En effet, mais même avec deux doses, les anticorps et les lymphocytes, hein, qui activent la réponse immunitaire, sont moins nombreux chez les personnes plus âgées. De plus, les variants baissent la protection des vaccins. Selon Public Health England, la Santé Publique britannique, on va dire, ils ont une efficacité de 79%, contre le variant delta [6]. Ce qui reste très bien. Mais c’est moins que les 89 % contre le variant dit « anglais ». Ravindra Gupta plaide donc pour la vaccination de tous ceux qui travaillent avec des personnes âgées, parce que les personnes vaccinées, on le sait, transmettent moins de charge virale. Cela compensera donc que d’autres personnes soient moins bien protégées par la vaccination à cause de leur âge et des variants. En Angleterre, comme en France, la moitié des personnels en Ehpad est partiellement vaccinée aujourd’hui. »
[6] Oui, sauf que le rapport de Public Health England (ici, voir le tableau 2 « Vaccine effectiveness against symptomatic disease for alpha and delta variants » de la page 7), d’où ont été extraits ces chiffres (79% et 89% pour une vaccination complète avec deux doses administrées), ne référence que des études de cohorte observationnelles ou des études cas-témoins, qui sont les plus mauvais niveaux de preuve avant les avis d’experts qui ne valent, eux, pas grand-chose. Aucune étude clinique randomisée n’a été citée par PHE à l’appui de ce qui ressemble plutôt à de la propagande qu’à une démonstration scientifique robuste !
Alors, regardons d’un peu plus près ce que nous dit l’étude anglaise publiée dans Nature.
L’immunologiste Ravindra Gupta rappelle, en introduction, le manque criant de données issues d’essais cliniques, portant sur la réponse neutralisante et l’efficacité vaccinale chez les personnes de 80 ans et plus. Ces données sont d’autant plus urgentes à obtenir, que le délai entre les deux doses a souvent été rallongé par les gouvernements, de trois semaines, ce qui était pratiqué dans l’essai clinique préliminaire et prévu par l’autorisation européenne de mise sur le marché, accordée par exemple au vaccin Pfizer, COMIRNATY, par l’EMA, à 12 ou 16 semaines, voire davantage, pour maximiser les primovaccinations… De plus, l’émergence de nouveaux variants plus transmissibles et présentant une moindre sensibilité aux anticorps déclenchés par le vaccin, le rendant ainsi moins efficace pour prévenir l’infection, suscite des craintes pour les groupes vulnérables, chez qui l'amplitude et la qualité des réponses immunitaires peuvent être amoindries.
L’équipe de recherche a effectivement comparé la réponse immunitaire développée après vaccination avec le vaccin anticovid à ARN messager de Pfizer, chez des personnes très âgées et des professionnels de santé plus jeunes.
Pouvoir neutralisant des anticorps développés par l’immunisation vaccinale
Le graphique ci-après, trace la détectabilité dans le sérum d’une neutralisation du virus par les anticorps, après une première dose de vaccin. Il objective vers l’âge de 80 ans, une chute brutale du pouvoir neutralisant des anticorps dirigés contre la protéine spike du virus. Chez environ la moitié des personnes âgées de 80 ans et plus, aucun pouvoir neutralisant des anticorps n’a été mis en évidence entre la troisième et la douzième semaine suivant la primovaccination…
NATURE Ravindra Gupta et al. Anticorps neutralisants post-vaccination selon l'âge
Les histogrammes du graphique ci-après, montrent également des diminutions drastiques du pouvoir neutralisant des anticorps après avoir reçu les deux doses du vaccin, en fonction de la souche virale (WT : Wuhan ; B.1.1.7 : variant anglais ; B.1.351 : variant sud-africain, P.1 : variant brésilien)
NATURE Ravindra Gupta et al. Anticorps neutralisants post-vaccination selon l'âge et le variant
Réponse des cellules B au vaccin anticovid à ARN messager
Comme pour le pouvoir neutralisant des anticorps, les taux d’immunoglobuline G (IGG) dirigées contre la protéine de la Spike, déclinent avec l’âge. Ce que montre le graphique suivant :
NATURE Ravindra Gupta et al. Déclin des IGG dirigées contre la Spike avec l'âge
Réponse des cellules T au vaccin anticovid à ARN messager
Dans ma chronique N°67, je soulignais que « les cellules T et B peuvent conférer une protection à vie contre certaines maladies similaires au covid-19. Un article bien connu de Nature de 2008 a révélé que 32 personnes nées en 1915 ou avant, conservaient un certain niveau d'immunité contre le virus de la grippe aviaire ou contre la souche de la grippe de 1918, et cela, 90 ans plus tard ». C’est dire si le rôle des cellules T à mémoire est crucial dans la réponse immunitaire. Comme quoi, vous le voyez bien, ce ne sont pas uniquement les anticorps (immunité humorale) qui nous protègent, loin s’en faut. L’immunité cellulaire, qui passe par les CD4+, CD8+, cellules B, cellules T, lymphocytes tueurs…, a probablement un rôle bien plus important dans les défenses immunitaires contre des agents infectieux du type SARS-COV-2. Le « hic », c’est qu’en routine, les laboratoires ne dosent que les anticorps (sérologie), et les tests du type de ceux réalisés par l’équipe de Ravindra Gupta, ne sont pas sortis de ses paillasses, et n’ont pas été développés par l’industrie du réactif et des analyses de laboratoires de biologie médicale.
Partant du principe que, bien qu'il soit de plus en plus reconnu que les anticorps neutralisants dominent la protection contre l'infection initiale, les cellules T pourraient limiter la progression de la maladie lorsque les titres d'anticorps neutralisants sont faibles. Les chercheurs en immunologie de l’université de Cambridge ont donc mesuré la réponse des cellules T à la protéine Spike du SRAS-CoV-2 chez des individus vaccinés. Lorsqu’ils ont tracé les réponses des cellules T spécifiques de la Spike, en mesurant l’interféron gamma produit, il y avait une corrélation négative avec une chute aux alentours de 80 ans (Fig. 4a). Un effet similaire, bien que moins prononcé, a été observé en mesurant la production d'interleukine 2 (Fig. 4b).
NATURE Ravindra Gupta et al. chute de la réponse des cellules T aux alentours de 80 ans fig 4a
NATURE Ravindra Gupta et al. chute de la réponse des cellules T aux alentours de 80 ans fig 4b
Chez les 80 ans et plus, une baisse très marquée de la réponse des cellules T CD4+ a été observée par rapport au groupe de contrôle plus jeune :
NATURE Ravindra Gupta et al. chute de la réponse des cellules T CD4+ chez 80 ans +
Voici les conclusions des chercheurs de Cambridge :
Dans une cohorte de 140 individus, nous avons démontré non seulement une relation inverse entre l'âge et les réponses neutralisantes après la première dose du vaccin Pfizer ARNm, mais aussi un déclin plus précipité autour de l'âge de 80 ans. Les personnes âgées de 80 ans ou plus ont été vaccinées en priorité au Royaume-Uni et ailleurs, car elles représentaient le groupe le plus exposé au risque de formes graves de COVID-19. Nous avons constaté qu'environ la moitié des personnes âgées de plus de 80 ans ont une réponse en anticorps neutralisants sous-optimale après la première dose, accompagnée d'une réponse des lymphocytes T plus faible que chez les personnes plus jeunes. Nous montrons que les personnes âgées sont probablement plus exposées aux variants, car une plus grande proportion d'individus du groupe des plus de 80 ans n'a montré aucune activité neutralisante contre le variant brésilien et le variant anglais après la première dose. De manière rassurante, nous avons observé des réponses neutralisantes dans tous les groupes d'âge après la deuxième dose, bien que des travaux supplémentaires soient nécessaires pour comprendre l'effet de l'âge sur la durabilité des réponses immunitaires après la vaccination.
L’avis du 23 août 2021 du Collège de la HAS relatif à la définition des populations à cibler pour une campagne de rappel vaccinal chez les personnes ayant eu une primovaccination complète contre la Covid-19.
Le 24 août 2021, cet avis favorable de la Haute Autorité de Santé était bruyamment relayé sur France Info. Camille Revel : « L’Info avec vous, Armand Peyrou-Lauga. Bonjour Armand. »
AP-L : « Bonjour. »
Camille Revel : « Et à la Une, la Haute Autorité de santé donne son feu vert à une troisième dose de vaccin anti-covid. »
AP-L : « Une troisième dose pour les plus de 65 ans et les plus fragiles. La campagne pourra commencer fin octobre. Précisions dans un instant… Vous pourrez donc vous faire piquer une troisième fois contre le covid si vous avez plus de 65 ans. C’est ce que préconise la Haute Autorité de santé. Elle vient de rendre son avis, Anne Le Gall ? ». Anne Le Gall : « Voilà, la HAS recommande cette dose de rappel pour les personnes âgées de 65 ans et plus, ainsi que pour toutes celles qui présentent des comorbidités : diabète, obésité, certains cancers ou troubles psychiatriques notamment. Cette catégorie des plus de 65 ans correspond à celle à qui on propose déjà la vaccination contre la grippe, avait indiqué hier Olivier Véran. Et dans son avis, la HAS propose d’ailleurs que le gouvernement étudie la possibilité de vacciner les personnes âgées concernées, en même temps contre le covid et la grippe saisonnière pour simplifier l’organisation. La HAS recommande, par ailleurs, de privilégier les vaccins à ARN messager pour cette campagne de rappel. Pfizer et Astrazeneca [7], donc. Sans préférence pour l’un ou pour l’autre. Et ce, quel que soit le vaccin reçu en premières injections. Cette campagne de rappel pourrait démarrer à l’automne, indique la HAS. Mais, attention, il faudra respecter un délai d’au-moins six mois entre la deuxième et la troisième dose. »
[7] Quelle boulette ! Le vaccin Astrazeneca est à Adénovirus et pas à ARNm !!! Les vaccins à ARNm sont ceux de Pfizer et de Moderna…
Un peu plus tard, toujours sur France Info (à 1:40 de l’enregistrement audio : ici). Agathe Mahuet : « Une troisième dose de vaccin anti-covid, pour les plus de 65 ans, ou pour les personnes susceptibles de développer une forme grave de la maladie. La Haute Autorité de santé y est donc favorable. Elle a rendu son avis aujourd’hui. Une préconisation basée sur des fondements scientifiques [8], comme l’explique la Professeur en Médecine [9], Présidente de la Haute Autorité (de Santé) [10], Dominique Leguludec, avec Camille Revel. »
[8] Non, il est très exagéré de dire cela… Une journaliste du service public doit-elle être partisane ? Doit-elle soutenir la communication gouvernementale ? Ou devrait-elle garder un esprit critique et s’exprimer avec retenue ?
[9] Dominique Luguludec est radiologue. Les médicaments ne sont donc pas sa tasse de thé…
[10] Dominique Luguludec, faut-il le rappeler, a été nommée par un certain… Emmanuel Macron, ardent défenseur de la vaccination de toute la population et promoteur de l’odieux passe sanitaire, après avoir juré, craché, qu’il était contre la vaccination obligatoire !
Pr Dominique Leguludec : « Il existe plusieurs études qui montrent dans différents pays une baisse de l’efficacité vaccinale qui est liée à deux facteurs. D’une part le variant delta. Les vaccins, tous, sont un peu moins efficace vis-à-vis de ce variant. Et d’autre part le temps, sans qu’il soit parfaitement, sans qu’il soit facile de distinguer entre ce qui revient au variant et ce qui revient au temps. Néanmoins, on voit bien qu’il existe une baisse d’efficacité vaccinale qui se prolonge dans le temps. Et nous anticipons donc, qu’entre six mois et douze mois après la première vaccination complète, une dose de rappel est importante pour les gens qui ont des risques de faire des formes sévères. [11] »
[11] Cela, il va falloir le démontrer dans un essai randomisé en double aveugle, que l’injection d’une troisième dose permet bien d’éviter des contaminations, des formes sévères, et des décès, dans des populations comparables, avec des âges représentatifs des personnes vulnérables, en comparant en double insu le vaccin au placebo ! Et cela, en testant les différentes strates du grand âge et du très grand âge…
Camille Revel : « Vous privilégiez la fin octobre. Olivier Véran avait évoqué le mois de septembre. Pourquoi choisir cette période-là ? »
Pr Luguludec : « Alors, en fait, d’abord, il n’y a pas d’urgence, hein. Cette baisse est progressive et modérée au cours du temps. [12] »
[12] Cela dépend pour qui. Elle oublie les « 422 cas d’échecs vaccinaux graves liés au vaccin Comirnaty (Pfizer) qui sont cités dans son avis validé par le Collège, et pour lesquels l’ANSM a effectué une analyse descriptive : La majorité des personnes étaient âgées de 85 ans et plus (52%). Parmi ces personnes, 162 ont été hospitalisées (38%) et 107 sont décédées (25%). La majorité des décès sont signalés chez des personnes de 85 ans et plus (72%). La présence d’une ou plusieurs comorbidités (facteurs de risque de Covid-19 grave) est mentionnée pour 279 personnes (66%), majoritairement âgées de 85 ans et plus ». Ces cas ont évidemment été très sous-déclarés. Pour ce profil de patients, il est urgent de savoir si oui ou non, une troisième dose est, ou pas, efficace ! Mme Leguludec et ses collègues du collège de la HAS n’ont pas dû prendre connaissance de l’étude publiée dans Nature, de l’équipe de chercheurs de l’université de Cambridge, dont nous avons extrait un peu plus haut les enseignements. 50% des plus de 80 ans pourraient avoir une immunité totalement déficiente !
Pr Luguludec : « Euh, deuxièmement, nous nous calons sur la vaccination contre la grippe, puisqu’il s’agit à peu près des mêmes personnes qui bénéficient de la vaccination antigrippale et qui vont pouvoir bénéficier de cette troisième dose de rappel. Puisque ce sont celles qui sont à risque de formes sévères. Il n’y a pas un recouvrement total, mais très important entre les deux populations. Donc, quand on regarde quand ont été vaccinés la majorité des gens en France, enfin, les grosses quantités de vaccination qui ont été faites aux mois d’avril, mai etc…, la vaccination antigrippe qui commence fin octobre et qui va prendre son essor tout le mois de novembre et décembre, collera avec ce délai. »
Camille Revel : « Donc l’idée, Professeur, c’est de simplifier le parcours vaccinal ? »
Pr Leguludec : « Exactement, c’est de pouvoir éviter aux personnes de se rendre deux fois pour se faire vacciner et donc de pouvoir bénéficier des deux en même temps. Nous n’anticipons pas de problème avec une vaccination conjointe. [13] »
[13] Ça mériterait aussi d’être testé, dans un essai randomisé en double aveugle, non ?
Camille Revel : « Là, on parle de combien de personnes qui seront concernées dès la fin octobre ? »
Pr Leguludec : « Ecoutez, toutes les personnes, dont les personnes au-delà de 80 ans, étaient déjà concernées par les annonces gouvernementales, ainsi que les personnes immunodéprimées. Là, il s’agit des plus de 65 ans et puis de toutes les personnes susceptibles de faire des formes graves avant 65 ans. Donc, on anticipe au moins 15 millions de personnes supplémentaires. »
Camille Revel : « Et on parle de rappel avec quels vaccins ? »
Pr Leguludec : « Alors, un vaccin ARN, quel qu’il soit. Pour l’instant, nous n’avons pas de données pour privilégier un des deux vaccins. »
Camille Revel : « Ce qui veut dire Pfizer ou Moderna. C’est bien ça ? »
Pr Leguludec : « Ce qui veut dire Pfizer ou Moderna. Nous devons anticiper cet avis pour des questions organisationnelles. Mais, d’ici le démarrage, nous aurons encore d’autres résultats. Nous attendons des résultats et nous attendons également l’avis de l’Agence européenne du médicament (EMA), qui interviendra très probablement fin septembre et qui nous permettra d’avoir des données complémentaires d’ici le début de cette campagne de rappels. [14] »
[14] Sur cette question cruciale de l’EMA, Mme Leguludec n’est pas aussi explicite que ce que l’on peut lire dans l’avis validé par le collège de la HAS, et manque de fermeté à l’égard de l’EMA. Voici quelques extraits de l’avis :
- Un encadré page 17 : « Si il paraît très probable qu’une injection de rappel 6 à 12 mois après une primovaccination complète procurera effectivement un effet « boost », comme c’est le cas pour la plupart des vaccins, l’administration d’une dose de rappel à distance de la primovaccination n’est pas prévue à ce jour dans les autorisations de mise sur le marché conditionnelles des différents vaccins disponibles [15]. Il est au préalable indispensable de disposer de données permettant d’évaluer précisément la tolérance et l’impact d’un tel rappel sur la prévention des formes graves de la maladie après un schéma de primovaccination complet. [16] »
[15, 16] Ce qui justifie pleinement le titre de ma chronique !
- « Ainsi, comme c’est le cas dans les différents pays ayant d’ores et déjà annoncé des campagnes de rappel en population générale, cet avis est-il rendu en amont de la validation par l’Agence européenne du médicament de la possibilité d’administrer une dose de rappel, afin d’anticiper l’organisation d’une campagne couplée grippe/Covid-19 dont la mise en œuvre (à partir de la fin de l’automne), n’interviendra qu’après l’avis formel de l’EMA. [17] » (page 21)
[17] Il est clair que la HAS cherche à se couvrir ! Mais devant les auditeurs, Madame Leguludec est bien trop conciliante avec l’EMA. Nous avons des AMM centralisées en Europe depuis des décennies. Il est inconcevable que la HAS puisse recommander une troisième dose qui n’est pas explicitée dans l’AMM européenne (Mais pour modifier les caractéristiques produites dans l’EPAR, il faudra autre chose que l’argumentaire de l’avis HAS, qui ne comporte aucune étude randomisée en double aveugle versus placebo démontrant l’utilité clinique de la troisième dose, sur des critères « durs », décès évités, formes sévères évitées…
La HAS rappelle aussi dans son avis la position récente de l’EMA sur une éventuelle troisième dose :
- « Au niveau européen, l’EMA a indiqué le 14 juillet 2021, qu’il était trop tôt pour confirmer qu’une dose de rappel pour des vaccins Covid-19 serait nécessaire et quand celle-ci devrait être effectuée : il n'y a selon elle, pour le moment, pas assez de données provenant des campagnes de vaccination et des études en cours pour comprendre combien de temps durera la protection conférée par les vaccins, compte tenu également de la propagation de variants. [18] »
[18] Serions-nous plus zélés en France que dans le reste de l’Union Européenne ?
D’ailleurs, il suffit de regarder sur le site de l’EMA les « caractéristiques produit », en français, fiche complète de 27 pages, pour COMIRNATY® le vaccin Pfizer (ici). À la rubrique « 4.3 Posologie et mode d’administration », il n’y a pas de troisième dose :
Posologie COMIRNATY, vaccin Pfizer, absence de troisième dose EPAR FR 03-09-2021
Idem, pour le vaccin Moderna, l’AMM ne prévoit aucunement une 3ème dose !
Posologie, vaccin Moderna, absence de 3ème dose EPAR FR 03-09-2021
Nous le voyons bien, la troisième dose n’est pas (encore) autorisée dans l’Union Européenne ! Gare aux médecins qui la prescriront ou l’administreront, ainsi que les infirmères, dès le mois de septembre, car ils seront « Hors AMM ».
Mais, retrouvons la suite de l’interview de Dominique Leguludec (à 4:59 de l’enregistrement audio : ici). Camille Revel : « Pour vous, à l’heure actuelle, vous, professeur Leguludec qui êtes Présidente de la Haute Autorité de santé, il n’y a pas de nécessité d’un rappel pour le reste de la population vaccinée ? »
Pr Leguludec : « Alors, il y aura un jour une nécessité de rappel [19]. On voit bien que l’efficacité vaccinale baisse avec le temps. Néanmoins, elle n’est pas d’actualité pour l’instant. Nous pouvons attendre. Je crois qu’il faut d’abord s’adresser à ceux qui étaient d’ailleurs les premiers vaccinés, au début de la campagne vaccinale. Et donc, qui atteindront une baisse significative plus tôt que les autres [Elle parle sans-doute de leur titre d’anticorps neutralisants]. Et puis, qui sont à risque de formes sévères. Cela nous laissera également le temps de voir ce que devient ce variant ou d’autres variants potentiels. Donc, pour le reste de la population. La population générale, pour l’instant, il y a tout lieu d’attendre le début de l’année prochaine, nous verrons où nous en serons sur le plan épidémiologique. »
[19] Elle s’avance peut-être un peu trop, Mme Leguludec. Après la quatrième vague, qui a été plutôt une vaguelette, personne ne peut prédire aujourd’hui s’il y aura ou pas une cinquième vague en France métropolitaine…
Camille Revel : « Je vous entendais dire, ce n’est pas, il n’y a pas urgence. Est-ce que c’était vraiment urgent, ce rappel, sachant que, si je ne me trompe pas, 20% des plus de 80 ans, ne sont pas encore totalement vaccinés ou [partiellement] vaccinés ? »
Pr Leguludec : « Alors, cela n’empêche pas d’aller cibler les plus de 80. Je crois qu’il faut continuer à faire des efforts, que fait actuellement la Sécurité sociale pour aller vers les personnes les plus éloignées du système de santé, pour aller vers les personnes âgées, pour que les infirmières se déplacent à domicile. Je crois qu’il faut en effet en priorité continuer à étendre la primovaccination. Il nous faut également dire aux Français, qui sont vaccinés, qu’il ne faut pas abandonner toutes les mesures barrières, parce que l’efficacité contre l’infection symptomatique ou asymptomatique, sans formes sévères, hein, est moins bonne pour ce variant et que donc, on peut être contagieux, même en étant vacciné. Donc, malheureusement, il faut encore être prudent. »
Camille Revel : « Donc, on l’entend bien, vous préconisez évidemment de continuer le respect des gestes barrières. [20] »
[20] Cela dépend de quoi l’on parle. La distanciation physique, OK (1 m, 2 m, on manque cruellement de données probantes pour savoir quelle est véritablement la bonne distance), Le lavage des mains (avec du gel hydroalcoolique, de l’eau savonneuse, ou le simple rinçage à l’eau courante), probablement. Le port du masque, assurément NON ! Nous avons dix études cliniques robustes, et une méta-analyse de neuf d’entre elles, qui montrent qu’il réduit peu ou pas les nouvelles contaminations de virus respiratoires tels que celui de la grippe ou le SARS-COV-2. Nous l’imposer encore n’est pas scientifique du tout !
Camille Revel, résumant le propos de la Présidente de la HAS : « La Haute Autorité de santé préconise une dose de rappel du vaccin anti-covid chez les plus de 65 ans et celles plus à risque de faire des formes graves de covid-19, à compter du début de la campagne de vaccination antigrippale. Ça nous emmène fin octobre. Qui sera prioritaire au sein de ce public pour cette dose de rappel ? »
Pr Leguludec : « Ecoutez, il n’y a plus de problèmes de doses, actuellement. Nous avons des doses en quantités. Donc, les personnes choisiront leur moment où elles se feront vacciner contre la grippe. Et je crois qu’on pourra les accueillir. »
Agathe Mahuet / « La Présidente de la Haute Autorité de santé, Dominique Leguludec, avec Camille Revel ».
Quelques minutes plus tard, ce 24 août 2021, dans la tranche 17h00-20h00 (à 7:27 de l’enregistrement audio : ici).
Agathe Mahuet : « Un rappel du vaccin contre le covid pour les plus âgés et les plus fragiles à partir de septembre [21], on va voir cela en détail… Il y aura donc bien une troisième dose de vaccin contre le covid, ces prochaines semaines en France. Dose de rappel, préconisée par la Haute Autorité de santé. Bonsoir Olivier Hémond. »
[21] Il faudrait savoir. La HAS recommande fin octobre, et là il est question de septembre. Quelle cacophonie !
OH : « Bonsoir. »
AM /: « Préconisée d’abord pour les plus vulnérables, dès début septembre et puis peu à peu pour les plus de 65 ans. »
OH : « Oui, ça va commencer très vite, puisque le ministère de la Santé l’a confirmé ce midi, les prises de rendez-vous pour cette dose de rappel pourront débuter dès la semaine prochaine [22], pour celles et ceux qui vont recevoir cette nouvelle injection en ville ou dans les centres de vaccination. Cela concerne les personnes de plus de 80 ans, et les personnes à risque, soit ayant des facteurs de comorbidité, comme un diabète ou une obésité, soit les personnes immunodéprimées. Pour les résidents en Ehpad ou équivalents, la campagne démarrera quelques jours plus tard, autour du 11 septembre. Le temps pour ces établissements de commander et de recevoir les doses nécessaires. Pour les plus de 65 ans, le calendrier n’est pas encore totalement établi. La HAS préconise d’ailleurs de coupler pour ces personnes la dose de rappel avec celle du vaccin contre la grippe, hein, qui arrive généralement mi ou fin octobre. Ça pourrait éviter à un certain nombre de personnes de prévoir deux nouveaux rendez-vous de vaccination. Le ministère se donne quelques jours pour trancher cette question. À noter que cette dose de rappel sera faite avec le vaccin Pfizer, ou avec le Moderna, les deux vaccins à ARN messager qui sont autorisés en France. [23] »
[22] On parle là d’un démarrage dès le 30 août. Il ne faudrait pas confondre « vitesse » et « précipitation » ! Ça leur prend comme une envie de pisser au ministère de la Santé ? Madame Leguludec, qui est une ministre de la Santé « bis », aurait dû marquer bien mieux son territoire, face à l’impétuosité d’Olivier Véran…
[23] Ben non, ce n’est pas autorisé par l’EMA. Il ne faut pas dire n’importe quoi à l’antenne, M. Le responsable santé de France Info. La présidente-directrice-générale de Radio France, Sybile Veil, a affirmé le 1er septembre sur France Info que les informations étaient toujours vérifiées avant de passer à l’antenne. Ce n’est pas le cas. Mais on en reparlera…
Laissons Olivier Hémond poursuivre : « Sans préférence pour l’un ou l’autre (Vaccins Pfizer et Moderna), et sans lien avec le premier vaccin reçu. Autre élément, l’injection est permise six mois minimum après les autres. » [24]
[24] Quelle imprécision ! Il fallait comprendre « après la deuxième dose ! Mais que font ses collègues chargés de vérifier l’information avant son passage sur les ondes ?
OH : « Donc, si par exemple vous êtes dans les catégories citées, mais que vous venez de recevoir une deuxième dose de vaccin Pfizer, par exemple au mois d’août, eh bien vous ne pouvez pas avoir ce rappel avant février prochain. »
AM : « Pourquoi parle-t-on de ce délai de six mois ? »
OH : « Eh bien, essentiellement, parce que les études sur l’efficacité des vaccins montrent qu’ils protègent parfaitement [25] de la maladie au moins six mois. Après, cela peut baisser en termes d’immunité. Alors, c’est peut-être plus longtemps, cette protection totale [25]. Mais on n’a pas encore suffisamment de recul pour le dire. »
[25] M. Hémond est-il un VRP de Pfizer ? Quel culot d’employer de tels superlatifs « protège parfaitement », « Protection totale ». En réalité, voici ce qu’on peut lire dans l’avis de la HAS : « Le développement des vaccins contre la Covid-19, demeure toutefois récent et la durée de protection à long terme conférée par la primovaccination complète n’est à ce jour pas connue. Des données d’efficacité à six mois dans les essais cliniques ont été publiées uniquement pour le vaccin Pfizer et sous forme d’un préprint (téléchargeable ici, supplément ici) qui n’a pas été revu par les pairs. Il est bien mentionné que : « Ce préprint rapporte de nouvelles recherches qui n'ont pas été certifiées par un examen par les pairs et ne doivent pas être utilisées pour guider la pratique clinique ». En outre, il faut savoir que la plupart des participants du groupe placebo initial ont été vaccinés avec le vaccin Pfizer, ce qui a mis fin à la partie de l’essai contrôlé par un placebo [26].
[26] Le groupe de contrôle ayant majoritairement été vacciné, il n’y a donc plus de groupe de contrôle. Dans ces conditions, il ne sera plus possible d’observer une occurrence plus importante d’événements indésirables chez les vaccinés, ni d’avoir une évaluation comparative de l’efficacité vaccinale par rapport aux non-vaccinés (groupe placebo).
AM : « Et puis, il faut prendre en compte le rôle du variant delta. »
OH : « Evidemment, il rebat en partie les cartes parce que, comme le souligne la HAS, un certain nombre d’études montrent que cette version du virus est plus contagieuse et qu’au fil du temps, même vacciné, et surtout en fonction de l’âge, on peut plus facilement être porteur de la maladie, être contagieux à son tour, et même avoir des symptômes. Certes, généralement plutôt légers. Donc, se refaire vacciner doit permettre de mieux se prémunir contre ce variant et permettre de limiter sa propagation ? C’est particulièrement le cas pour les personnes ayant reçu le vaccin Janssen, souligne la HAS. [27] »
[27] Non, ce n’est pas ce que dit la HAS à propos du vaccin Janssen. M. Hémont extrapole ou déforme les propos de la HAS dans son avis du 23 août 2021 : « Enfin, pour le vaccin Covid-19 Janssen, les données initiales des essais de phase III ont montré la persistance de taux d’anticorps neutralisants pendant au moins douze semaines, y compris chez les personnes âgées de 65 ans et plus. À partir des données de phase I/II obtenues sur un échantillon de 20 personnes, une étude montre que les taux d’anticorps neutralisants après une seule dose du vaccin Covid-19 Janssen persiste pendant au moins huit mois. En outre, à partir des d’un échantillon de huit participants de l’essai ENSEMBLE, une autre étude récente suggère qu’une seule dose de ce vaccin confère une activité neutralisante supérieure contre le variant delta que contre le variant Bêta, contre lequel l’efficacité avait été démontrée dans l’essai pivotal. Des données plus robustes sur la persistance de l’immunogénicité et de l’efficacité à plus long terme dans les essais de phase III ENSEMBLE (schéma à une dose) et ENSEMBLE 2 (schéma à deux doses) sont attendues pour les prochaines semaines. (à retrouver page 3 et 4 de l’avis de la HAS). Le propos déplacé et qui peut être décodé comme discréditant le vaccin Janssen, de M. Hémond, n’avait pas sa place à l’antenne de France Info…
Agathe Mahuet : « Olivier Hémont, Chef du service Santé de France Info, merci et bonsoir à vous, Olivier Guérin. » (Nous sommes à 10:00 de l’enregistrement audio : ici).
Pr Olivier Guérin : « Bonsoir. »
AM : « Vous êtes, vous, le chef du pôle gériatrique du CHU de Nice, membre du Conseil ccientifique. Vous présidez la Société Française de Gériatrie et de Gérontologie. Dix-huit millions de personnes concernées au total, cet automne, et dans l’immédiat, six millions de français parmi les plus âgés, les plus fragiles. Avec des prises de rendez-vous dès la semaine prochaine, le lundi 30 août. Vous êtes prêt à cela ? »
Pr OG : « Ah ben oui, et puis on l’avait déjà proposé dans… au sein du Conseil scientifique, il y a plusieurs semaines. Donc, euh, on attendait le positionnement de la Haute Autorité de santé. Et puis, des données récentes, pour le coup, qui faisaient que la HAS en avait besoin, euh, sur l’efficacité de ce rappel. Parce que finalement, on n’avait pas beaucoup de recul. Et notamment, une étude israélienne a montré l’efficacité de ce rappel à six mois, euh, qui augmente fortement la protection, à la fois contre la transmission et encore plus contre les formes sévères. [28] »
[28] Cette étude Israélienne que je n’ai pas retrouvée dans la bibliographie de l’avis HAS favorable à la troisième dose, je l’ai demandé en matinée ce vendredi 3 septembre par courriel au Pr Olivier Guérin. Pour l’instant, je n’ai rien reçu. En réalité, dans son avis, la HAS n’a pu citer qu’une seule étude américaine de phase 2 (ici), dont le promoteur est Moderna, publiée le 6 mai 2021 en préprint (donc non revue par les pairs, et dont les conclusions sont inapplicables à la pratique clinique…). Tous les auteurs de ce travail sont des salariés ou des dirigeants de Moderna ! Cette étude ouverte (open label) n’a fait que titrer les anticorps après une troisième dose administrée environ six mois après la vaccination complète du vaccin Moderna initial ou d’une version modifiée pour cibler la protéine « S » du variant sud-africain. L’intérêt de cette étude est très modeste, puisqu’il ne s’agit pas d’un essai visant à évaluer l’efficacité à réduire les contaminations, les formes sévères ou les décès, mais seulement la production d’anticorps neutralisants.
Logigramme de l’essai ouvert de phase 2 Moderna évaluant l’effet « booster » d’une troisième dose sur le titre des anticorps neutralisants :
Schéma de l’essai de phase 2 Moderna
AM : « Qui augmente l’immunité donc. Est-ce que cela signifie que cette troisième dose pourrait-être la dernière ou pas forcément ? »
Pr OG : « Alors, ça, c’est une bonne question. Il n’y a que l’avenir qui nous le dira. Si on part vers un schéma de revaccination périodique, un peu comme la grippe saisonnière, ou si ce rappel sera le dernier. On a cet espoir-là, mais c’est très difficile à l’heure actuelle de vous le dire. On apprend en marchant. »
AM : « Hum, et la Haute Autorité de santé, effectivement, ne se prononce pas pour l’instant là-dessus, valide simplement le principe de ce rappel. Vous, vous nous disiez, il y a peu de temps, que le problème était, euh, aussi, d’atteindre les gens isolés, les personnes âgées qui vivent seules à domicile, et non pas forcément en Ehpad, qui ne sont toujours pas vaccinées. Il en reste. Est-ce que ça vous semble faisable de conjuguer comme ça cet enjeu-là et celui d’une campagne de troisième dose dans le même temps ? »
Pr OG : « Oui, je crois qu’on peut faire les deux. Après, c’est une question de stocks, mais ça, le ministre de la Santé a toutes les infos qu’il faut, donc, si c’est proposé, c’est que nous avons les doses pour le faire. Il faut absolument prioriser évidemment le fait de d’abord vacciner ceux qui ne le sont pas encore. Ça reste la priorité absolue du système de santé et de l’ensemble des acteurs. On en a déjà parlé, des collectivités territoriales par exemple, de l’aide du monde associatif. Mais, on peut faire ce rappel maintenant, qui permet de restaurer une immunité plus performante, avec un variant plus contagieux, beaucoup plus contagieux et un peu plus dangereux. [29] »
[29] Lui a-t-on dit au Pr Olivier Guérin, que la quatrième vague touche à sa fin et qu’elle aura été beaucoup plus douce que les précédentes. Si ce variant était beaucoup plus contagieux et un peu plus dangereux, les pics d’incidence, d’hospitalisation, d’entrée en réanimation et de décès à l’hôpital (Santé Publique France dissimule depuis des mois ce qui se passe dans les Ehpads…) seraient-ils redescendus aussi vite ?
AM : « Hum, à partir de fin octobre, donc on l’a dit, on va d’ailleurs pouvoir se calquer en fait sur la campagne du vaccin contre la grippe, pour, eh bien, administrer ces doses de rappel. C’est une bonne chose, ça, selon vous, en termes d’organisation ? »
Pr OG : « Bah oui. Et puis là, on rentre vraiment dans une culture de la prévention par la vaccination. C’est vraiment très important. Nous, les gériatres, ça fait longtemps qu’on dit qu’il faut mettre encore plus le paquet, je dirais, sur la vaccination antigrippale, hein, qui fait entre 8 000 et 15 000 morts [30], selon la sévérité de la grippe chaque année, sauf l’année dernière, où effectivement les mesures barrières ont réduit la grippe à sa portion congrue. [31] »
[30] Cela n’a jamais été mis en évidence, alors qu’avec les données de l’assurance maladie qui possède la liste des Françaises et Français vacciné(e)s ou pas contre la grippe chaque année, nous aurions pu réaliser une étude de cohorte ou cas témoins en vie réelle et à l’échelle du pays ou de la France métropolitaine pour estimer l’efficacité de ce vaccin à éviter des décès…
[31] Mais pas du tout, il y a bien eu en 2019-20 une grippe en France, avant l’arrivée du sars-cov-2. J’ai même pu évaluer à partir des données du fichier individuel des décès de l’INSEE, que les plus de 85 ans représentent environ 50% de la mortalité totale en période épidémique (Pic d’incidence établies par le réseau Sentinelles).
Le Pr Olivier Guérin poursuivait « Mais, c’est une bonne chose de coupler les deux. Ça fera, ça sera en même temps. Et on rentre dans cette culture de vaccination. Et là, je pense que nos concitoyens ont bien compris, pour la grande majorité en tous cas, l’importance du geste vaccinal. [32] »
[32] Est-il vraiment bénéfique de coupler un vaccin, celui de la grippe, dont on ignore totalement l’efficacité pour éviter des décès, avec celui contre le covid-19, dont on ignore aussi l’efficacité chez une personne sur deux âgée de 80 ans et plus, à l’immunité fortement compromise, selon les travaux de l’équipe de l’immunologiste Ravindra Gupta, de l’université de Cambridge, publiés dans la revue Nature le 30 juin 2021 (et présentés dans cette chronique), en sachant que le grand et le très grand âge n’ont jamais été inclus dans les essais randomisés, dont on ne connaîtra jamais que les résultats préliminaires, puisque les laboratoires ont sabordé leurs études en faisant vacciner la majorité de ceux qui étaient initialement dans le groupe placebo !
AM : « Hum, presque comme une bonne habitude à prendre en fait. Quasiment à dates fixes, disons ? »
Pr OG : « Exactement. »
AM : « Alors, il y a cet enjeu du variant delta. On le comprend bien sûr. Euh, l’intérêt ; eh bien, euh, d’accroitre l’immunité face au covid, avec cette troisième dose. Est-ce que cela veut dire qu’on commence en fait, dans vos services, vous en gériatrie, à voir revenir dans ces services covid, dans les hôpitaux, des patients plus âgés. Est-ce que c’est aussi un élément qui pousse à cette troisième dose ? Des gens qui seraient vaccinés, mais de moins en moins immunisés ? »
Pr OG : « Oui, c’est vrai que depuis, notamment début août, on a vu arriver à nouveau des patients, je pense aux patients d’Ehpad, qui étaient assez absents au début de la quatrième vague, et qui là, reviennent en petits nombres. Mais, avec des formes parfois sévères, euh, vaccinés, et qui montrent qu’effectivement, il est temps pour ces patients-là, particulièrement vulnérables, et donc avec une immunité plus faible, de faire cette campagne de rappel pour réussir à passer un automne où on évitera à la fois la saturation des hôpitaux, puis évidemment, et surtout, et c’est le plus important, des formes graves pour ces patients-là. »
AM : « Ouais, au CHU de Nice, où vous travaillez vous, c’est le cas ? Vous avez eu comme ça des patients, plutôt d’Ehpad, et déjà vaccinés, qui étaient de retour à l’hôpital ? »
Pr OG : « Oui, quelques-uns, et puis en tant que président de la Société Française [de Gériatrie et de Gérontologie], c’est vrai qu’on a eu des retours de collègues, hein, médecins coordonnateurs, des grands groupes, privés ou publics, d’Ehpad, qui disaient qu’ils revoyaient des cas, qu’on ne voyait plus depuis plusieurs semaines. Donc, je pense que c’est le moment. Ça vient à la fois de la contagiosité plus élevée du variant delta et du fait que la population générale n’est pas encore suffisamment vaccinée. Donc, évidemment, il faut continuer aussi pour diminuer la pression, on va dire de circulation virale, à se vacciner de manière massive [33]. Et c’est aussi une anticipation de la reprise potentielle de la dissémination virale par la reprise en collectivité de nos enfants, qui, euh, peuvent aussi diffuser le virus, même si eux, heureusement, ne font le plus souvent pas de formes sévères. » [34]
[33] Ces médecins qui prônent une vaccination de la totalité de la population, pratiquent une médecine qui en fait trop. Il aurait fallu ne vacciner que les 17 millions de Françaises et de Français vulnérables (le grand âge et ceux qui risquent de faire des formes très sévères, avec intubation et ventilation mécanique en réanimation (dont on aimerait bien d’ailleurs connaître le nombre…) et « foutre la paix » aux autres, jeunes et en bonne santé, qui ne feront que des formes bénignes ou légères, le plus souvent asymptomatiques. D’ailleurs, la probabilité en réalité qu’une grande part de la population française dispose d’une immunité innée ou croisée (avec les coronavirus responsables des rhumes) me semble très élevée. À ce stade et après plus de 18 mois de pandémie, moins de 10% des Français ont été testés positifs au Covid…
[34] « Pas le plus souvent ». Non, ils font exceptionnellement une forme sévère. On voit que Olivier Guérin est gériatre, mais pas pédiatre ! Il n’y a eu que huit décès covid-19 depuis 18 mois chez les 0-9 ans. La majorité présentait des comorbidités.
Seulement 8 décès covid-19 à déplorer depuis 18 mois chez les 0-9 ans
AM : « Hum, justement Olivier Guérin, est-ce qu’il est totalement justifié, eh bien, de lancer cette campagne de troisième dose, quand, euh, certains, parmi les plus jeunes, n’ont pas encore tous reçu leur première dose et puis que certains pays moins développés, peinent à se procurer des vaccins ? »
Pr OG : « Alors, concernant la France, déjà. C’est vrai, que, euh, il faut. On a toujours privilégié, on va dire, la vaccination de ceux qui étaient le plus à risque de faire des formes sévères. Donc, là, on est toujours dans la même logique, hein, de privilégier ceux qui risquent de mourir, ou d’avoir des formes graves, ou de finir en réanimation à cause du covid-19. Ça n’empêche pas qu’effectivement, il faut se vacciner à côté, même pour ceux qui sont moins à risque [35]. C’est aussi un geste altruiste. Mais pas que, parce qu’il y a quand même des formes symptomatiques et puis les covid longs, qui sont très embêtants pour beaucoup de nos concitoyens. Donc, il faut le continuer aussi. Mais encore une fois, l’objectif premier, c’est de couvrir le mieux possible, ceux qui sont le plus à risque de faire des formes sévères. »
[35] Ben, non. Si on n’est pas à risque, il n’est pas utile de se faire vacciner.
AM : « Hum, mais quand on regarde effectivement ces pays qui n’ont pas reçu de doses en quantités comparables à la France, la question reste posée par certains ? »
Pr OG : « Tout à fait. Alors là, c’était pour la France. Après, il faut qu’on ait une vision très internationale. On ne pourra pas se débarrasser de la pandémie, si on n’a pas une vision planétaire, une vision qui concerne toute l’humanité, et là, je pense que les pays riches ont ce devoir, finalement, de solidarité et d’aider à vacciner les populations des pays les plus pauvres. C’est à la fois un devoir moral, je trouve. Mais aussi un vrai devoir de santé publique, qui s’impose à nous, tout simplement. »
Agathe Mahuet : « Hum, malgré tout, premiers rendez-vous disponibles pour un rappel du vaccin en France dès le début du mois de septembre pour les Français les plus âgés, les plus fragiles également. La Haute Autorité de santé a donc donné son feu vert aujourd’hui. Merci beaucoup Olivier Guérin, gériatre, membre du Conseil scientifique et président de la Société Française de Gériatrie (et de Gérontologie). »
Le 31 août « le vrai du faux, émission culte de France Info qui prétend être toujours capable de discerner entre le vrai et le faux » (à 17:03 de l’enregistrement audio : ici). Camille Revel : « Et voici, le vrai du faux, bonjour, Thomas Pontillon. »
TP : « Bonjour Camille. »
CR : « Ce matin, on s’intéresse à la vaccination contre le covid. »
TP : « Oui, alors que la France va bientôt démarrer sa campagne pour une troisième dose, dix-huit millions de Français sont éligibles. Il s’agit des résidents d’Ehpad, des plus de 65 ans et des personnes qui ont des comorbidités. Une liste peut-être trop longue, selon Philippe Juvin, le Chef des urgences à l’hôpital Pompidou à Paris (Hôpital européen Georges Pompidou, HEGP), et candidat à la primaire de la droite, a alerté hier sur CNEWS, sur les inégalités vaccinales dans le monde et il a notamment pris, cet exemple. »
Philippe Juvin : « La question de l’Afrique. C’est que vous avez moins de 2% de personnes vaccinées. Tant que l’Afrique ne sera pas vaccinée, l’Afrique est une usine à variants. »
CR : « Moins de 2% de personnes vaccinées en Afrique. Est-ce que Philippe Juvin dit vrai ? »
TP : « Eh bien, oui, c’est vrai. Hein, selon les chiffres compilés par le site Our world in data, seulement 2,6% de la population africaine a été totalement vaccinée. » [36]
[36] Encore un qui ne sait pas compter. 2,6%, c’est plus que 2% ! Plus sérieusement, le site Ourworldindata est plutôt illisible. Juvin et les journalistes de France Info, n’ont pas bien regardé, et ils ont tout faux. Le chiffre de 1,96% ne correspond pas au pourcentage de vaccinés en Afrique, mais au pourcentage de doses injectées en Afrique par rapport au total des doses administrées dans le monde ! Le pourcentage d’Africains et d’Africaines ayant reçu une première dose est de 5,2% (au 3 septembre 2021) et celui des complètement vaccinés est de 2,9%.
Doses de vaccins covid-19 administrées, par continents
Pourcentage des Africains ayant reçu une dose de vaccin
Pourcentage d’Africains complètement vaccinés
Un chiffre à méditer sur le site Ourworldindata : Seulement 1,8 % de la population des pays à faibles revenus a reçu au moins une dose de vaccin !
Thomas Pontillon poursuivait : « (Moins de 2%), c’est dix fois moins que la moyenne mondiale et c’est très loin des chiffres que l’on retrouve dans les autres continents. Par exemple, l’Asie et l’Amérique du Sud, ont vacciné un tiers de leur population, 42% pour l’Amérique du Nord, et presque une personne sur deux pour l’Europe, qui est donc le continent où on a le plus vacciné. »
Camille Revel : « Et au sein même de l’Afrique, Thomas, la situation est contrastée ? »
TP : « Oui, par exemple, les Seychelles ou l’Île Maurice, très tournées vers le tourisme, sont les seules à avoir vacciné une majorité de leur population. Le Maroc est aussi avancé, avec presque 40% de vaccinés, mais l’écrasante majorité des pays n’atteignent pas la barre des 10%, qui était pourtant l’objectif de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avant l’été. »
CR : « Et comment peut-on expliquer un tel retard ? »
TP : « Alors, il y a une défiance vis-à-vis des vaccins, dans certaines régions. Mais il y a surtout des difficultés d’approvisionnement. Seulement 40 millions de doses ont été distribuées à l’Afrique, via le dispositif « COVAX ». La France a promis hier dix millions de vaccins supplémentaires, mais les livraisons ont tendance à traîner. Par exemple, le Congo a reçu ses premières doses COVAX, seulement hier. Un nouveau mécanisme financier, en lien avec la Banque mondiale a été récemment mis en place pour accélérer les livraisons. L’objectif est d’atteindre 40% de vaccinés en Afrique d’ici la fin de l’année. »
CR : « Thomas Pontillon, le vrai du faux, sur France Info. »
En conclusion :
- Les États / Nations / Pays ont capitulé face aux laboratoires pharmaceutiques, particulièrement Pfizer et Moderna, qui ont réussi le tour de force (ou de passe-passe, sans jeu de mots) d’imposer aux pays riches, au premier chef desquels la France, une troisième dose de rappel, qui n’est pas dans l’AMM accordée par l’EMA, et pour cause !
- En effet, aucune étude clinique randomisée en double aveugle versus placebo n’a été conduite pour démontrer l’utilité d’un rappel six mois après la primovaccination complète, en termes de réduction des contaminations, des formes sévères, particulièrement celles nécessitant un séjour en réanimation pour intuber et ventiler mécaniquement, encore moins des décès, et ce, comparativement à l’absence de rappel (groupe placebo).
- Au-delà de 80 ans, et par strates successives (ex : à 85 ans, à 90 ans, à 95 ans, à 100 ans…), l’efficacité des vaccins, fussent-ils à ARN messager, est inconnue, tout comme les risques d’événements indésirables qu’ils font encourir. En effet, devant l’immensité de la tâche à accomplir pour juger de l’imputabilité des quatre vaccins autorisés dans l’Union Européenne chez les quelques 875 741 cas individuels recensés (en date du 28 août 2021) pour qui au moins un événements indésirable a été déclaré dans Eudravigilance (travail d’expertise à réaliser à partir des données déclarées et du dossier médical complet de chaque cas), il est clair que ce travail ne sera jamais effectué. Nous ne saurons rien sur les risques encourus avec ces vaccins. Comment donc, dans ces conditions de complète ignorance, présupposer d’un rapport bénéfice/risque favorable de la vaccination anti-covid (je devrais dire plutôt, « des vaccins anticovid ») pour l’ensemble de la population ?
- Les milliards d’euros de dépenses à venir pour couvrir une campagne de rappel (troisième dose), et puis, pourquoi pas, une quatrième, cinquième… énième piqûre de rappel, serviront-ils à quelque chose ? Nul ne le sait.
- Enfin, à titre anecdotique, les médecins prescripteurs et vaccinologues, ainsi que les infirmières, auront-ils conscience que leurs actes seront pratiqués en-dehors de l’AMM européenne, et qu’en cas de d’événements indésirables graves, ils ne seront pas couverts ?
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