Défaite de Manuel Valls : l'ancien Premier ministre, dernier "favori" victime des primaires
L'élimination de Manuel Valls dimanche 29 de la course à l'Elysée confirme l'effet dévastateur des primaires pour les têtes d'affiche de la politique, qui ont de plus en plus de mal à résister à l'envie de changement des Français.
Nicolas Sarkozy battu sèchement au 1er tour de la primaire à droite, Alain Juppé distancé au second, Cécile Duflot écartée par les militants écologistes, Manuel Valls battu dimanche. En quelques semaines, un ancien président, deux ex-Premiers ministres, une ex-ministre et chef de parti sont passés à la trappe des primaires, et François Hollande a préféré ne pas s'y frotter.
Après le "tous contre Sarkozy" qui a marqué la primaire à droite, le "tous contre Valls" a brisé les rêves présidentiels de l'ex-Premier ministre. Début décembre, il était donné favori de la primaire après la décision de François Hollande de ne pas se représenter.
C'était compter sans le rejet des électeurs de gauche qui l'ont tenu responsable du bilan du quinquennat.
Evitant l'élimination au 1er tour qui a stoppé net Nicolas Sarkozy, il se retrouve dans la situation d'Alain Juppé, écarté en fin de course. "La primaire pénalise ceux qui ont exercé le pouvoir relativement récemment. On sanctionne ceux qui étaient au pouvoir et qui ont déçu", analyse François Miquet-Marty, président de l'institut ViaVoice.
Fin novembre, l'élimination de Nicolas Sarkozy a été la première surprise des primaires. Les électeurs ne voulaient pas du match revanche Sarkozy-Hollande de la présidentielle 2012 et l'ont fait savoir. "Il y a des dirigeants qui capitalisent plus que d'autres une hostilité émotionnellement forte. La sarkophobie était enfouie mais la campagne l'a forcément réveillée. Hostilité à gauche, mais à droite il était aussi très clivant", note Philippe Braud, politologue au Cevipof (Science-Po).
Avec Nicolas Sarkozy, 62 ans, François Hollande, 62 ans également, avait perdu son meilleur ennemi. Au plus bas dans les sondages, accusé d'avoir trahi ses engagements, le chef de l'Etat a renoncé à se soumettre à la primaire douze jours plus tard.
"La primaire l'a plus handicapé qu'autre chose, on voit bien que l'idée d'un président de la République contraint de participer à une compétition primaire est pour lui un exercice compliqué", souligne François Miquet-Marty.
Alain Juppé, 71 ans, a fait les frais de la demande de renouveau. En tête des sondages pendant des mois, il a échoué loin derrière François Fillon au second tour. "Les primaires déplacent un peu ce qui se passait auparavant au 1er tour de la présidentielle, où être favori n'était pas forcément un avantage", note François Braud. Son âge et son décalage par rapport aux attentes des électeurs de droite ont joué contre lui.
A 41 ans, Cécile Duflot pouvait espérer échapper à l'usure du pouvoir, plus de deux ans après avoir quitté le gouvernement. Mais les électeurs EELV lui ont préféré dès le 1er tour des candidats plus écologiquement purs. La méfiance des militants envers les règles du jeu politique ont eu raison de la candidature de l'ex-ministre du logement.
A droite comme à gauche, le vote sanction a souvent primé sur le vote d'adhésion, et le renouveau passe en priorité par le changement de têtes, trop vues, trop connues. Résultat: François Fillon, 62 ans, désigné par la droite, est en politique depuis près de 40 ans et Benoît Hamon, 49 ans, choisi par le PS, depuis plus de 25 ans. L'un comme l'autre ont pourtant réussi à se tenir quelques temps à l'écart.
"La primaire permet de donner une légitimité à celui qui a pris ses distances, elle permet de le réintroduire dans le jeu", note François Miquet-Marty. Et de concilier les attentes des Français, qui veulent à la fois le renouveau et l'expérience.
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