La guerre en Ukraine révèle nos manques en matière de défense et de sécurité françaises
François Cornut-Gentille, rapporteur spécial des crédits de la Défense et député de la Haute-Marne, dresse un tableau très négatif sur la capacité de la France à tenir en temps de guerre. Selon lui, "si la France était confrontée à une menace directe de guerre, elle ne pourrait pas tenir plus d'une semaine".
L'armée française n'est plus au niveau
Spécialisé dans les questions de défense à l’Assemblée nationale, il s’était battu pour empêcher la fermeture de la base aérienne 113, installée à Saint-Dizier. Cette base comprend cinquante Rafales capables de porter des charges nucléaires indispensables, qui auraient pu servir dans le cadre de la mission de dissuasion nucléaire. Toutefois, le constat du député est sans appel : "On me demande si l'on est au niveau en cas de conflit de haute intensité, la réponse est clairement non. Nous connaîtrions de grosses difficultés. Notre armée est obsolète." Il ajoute que "la France est restée sur un schéma mêlant des restes de guerre froide et opérations de projection de forces limitées. Mais, les temps ont changé, comme on peut le constater en Ukraine où le conflit ne répond à aucun schéma classique."
L’un des problèmes principaux se situe au niveau des munitions. L’armée française ne dispose pas d’assez d’obus et de missiles. François Cornut-Gentille avait déjà alerté sur cette question : "Personne n’a voulu m’entendre, car nous vivions pendant des années dans l'illusion d'une paix durable. Personne ne croyait aux risques d'une nouvelle guerre sur le sol européen. La guerre en Ukraine révèle nos manques." Jusqu’ici, l’armée française s’était plutôt spécialisée dans des opérations extérieures au Mali, en Syrie ou en Centrafrique. "Nous pouvons mobiliser 5 ou 6 000 hommes, mais pas 20 000 à 40 000 hommes dans un conflit en Europe, si cela devenait nécessaire. On est face à d’énormes difficultés, budgétaires, stratégiques. On envisage des opérations extérieures, mais pas des conflits armés de masse", explique-t-il ensuite.
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"Il faut montrer que l'on est prêts à engager plus d'argent"
De plus, la guerre en Ukraine est intervenue alors que le gouvernement a réduit le budget des armées de 300 millions d’euros, dont plus de 200 millions pour les achats d'équipements militaires, pour pallier les conséquences économiques du conflit ukrainien. Pour lui, c’est une démonstration de faiblesse envoyée aux Russes et aux militaires, alors que l’Allemagne a récemment décidé de débloquer 100 milliards d’euros pour moderniser son armée. "Il faut montrer que l'on est prêts à engager plus d'argent pour financer les munitions, les missiles supersoniques, les satellites. Retirer de l'argent à l'armée, c'est démontrer à nos ennemis potentiels qu'elle n'est pas une priorité", martèle le spécialiste.
Notons toutefois que cette diminution s'inscrit dans une augmentation générale du budget de la défense, à hauteur de 1,7 milliard d'euros par an, et qu'elle ne représente donc pas grand-chose en comparaison. C'est d'ailleurs la première fois que les promesses budgétaires de la défense ont été honorées, selon les Échos, un sujet de satisfaction pour la ministre des Armées Florence Parly. Cette augmentation globale intervient dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM), qui prévoit un effort financier de 295 milliards d'euros sur sept ans (2019-2025) afin de moderniser les infrastructures et les capacités de l'armée.
Cela étant, François Cornut-Gentillle n'en démord pas et avance sans sourciller que la place de la défense française n’est pas assurée, l'expliquant ainsi : "Depuis des années, notre leadership en matière de défense était perçu comme une évidence, car la France était la seule nation d’Europe continentale à intervenir sur des théâtres d’opérations extérieures. Cependant, le succès réel de ces opérations nous a aveuglé sur des faiblesses structurelles de notre outil de défense. Je peux citer le renseignement spatial ou encore le transport stratégique". Le rapporteur évoque aussi d'autres enjeux de sécurité tels que le nucléaire, les drones ou le spatial, qui "doivent être étudiés en profondeur si l’on veut renforcer notre souveraineté et demeurer un pays meneur en Europe."
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En définitive, il propose la mise en place d'urgence de réunions de concertation afin d'établir un nouveau plan de défense.
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