Moderna place les bénéfices des ventes de son vaccin dans les paradis fiscaux
Selon un rapport Oxfam, au moins neuf personnes sont devenues milliardaires depuis le début de la pandémie COVID grâce aux profits des sociétés pharmaceutiques en charge de la production et de la distribution des vaccins contre le COVID partout dans le monde. À leur tête, le PDG de Moderna, le marseillais Stéphane Bancel, dont la fortune s’élève maintenant à 4,3 milliards de dollars. Ces bénéfices réalisés grâce aux vaccins sont progressivement placés dans certains des pires paradis fiscaux du monde, prévient un récent rapport du Centre de recherche sur les sociétés multinationales (SOMO).
La commande de l'Union européenne est payée au bureau de Moderna à Bâle, en Suisse
Mardi 13 juillet SOMO a divulgué un contrat entre Moderna et la Commission européenne qui montre que les bénéfices de l'entreprise provenant de la vente des centaines de millions de vaccins pour lutter contre l'épidémie du Covid-19 finissent dans plusieurs paradis fiscaux. D’un côté, l’Union Européenne a payé ses commandes à la filiale Moderna Switzerland GmbH, à Bâle en Suisse, ce qui permet à l’entreprise de biotech de profiter d’un taux d'imposition aussi bas que 13%. Selon le rapport, les bénéfices de Moderna devraient en réalité terminer là où se déroule sa véritable activité économique, ce qui devrait pousser Moderna à les transférer dans les multiples filiales, qui se trouvent dans de nombreux pays. Au lieu de cela, les bénéfices sont dirigés uniquement vers la filiale suisse. Moderna fabrique bien un composant de son vaccin en Suisse, mais cela ne "fournit pas de justification économique convaincante pour laquelle Moderna devrait gagner ses revenus de vaccins européens en Suisse", ont ajouté les responsables du rapport.
L’entreprise pharmaceutique pourrait échapper aux impôts avec une pratique "triple coup dur"
D’un autre côté, Moderna ne paie pas d’impôts sur les brevets déposés : jusqu'à 780 brevets ont été déposés dans le Delaware, où les revenus des brevets sont exonérés d'impôt, ce qui fait de cet État américain un paradis fiscal. Selon le rapport, cette démarche est connue comme un "triple coup dur". C'est-à-dire qu’en plus de payer peu d'impôts, la société bénéficie d’aides publiques pour développer son vaccin, qu’elle facture ensuite à des prix élevés.
Injustice économique des biotechs enrichies pendant la pandémie
Selon le rapport, lorsque les contribuables financent le développement d'un produit, pour ensuite le revendre avec une marge importante, il s’agit d’une injustice économique tangible : "Le fait que les bénéfices qui en résultent finissent dans des paradis fiscaux, où ils seront presque certainement imposés à un taux très bas, voire pas du tout, aggrave cette injustice." En décembre 2020, Moderna a reçu environ 4,1 milliards de dollars du ministère américain de la Santé et des Services sociaux, dont 1 milliard de dollars dans le cadre de l'initiative américaine « Warp Speed ». Le pays a ensuite commandé 7,5 milliards de dollars de vaccins Moderna, en payant environ 15 dollars la dose. L'UE a commandé pour plus de 10 milliards de dollars de vaccin Moderna, au prix de 22,50 $ par dose. Les pays de l'UE, qui paient les vaccins sur leurs propres budgets, ont obtenu une remise de 4,50 $ sur la commande initiale en raison de cet acompte.
Une prédilection pour le marché des pays “riches” pour plus de profits
La Coalition for Epidemic Preparedness Innovations (CEPI) à but non lucratif a accordé à l'entreprise une subvention de 900 000 $ au début de la pandémie sous condition de distribuer par la suite son vaccin en fonction des besoins, et de le vendre à des prix abordables. Selon le rapport, Moderna aurait jusqu'à présent vendu son vaccin principalement aux pays les plus riches du monde et n'a livré aucune de ses premières productions au CEPI. Oxfam alertait dans un rapport que ces vaccins sont financés par des fonds publics, et devraient être avant tout un bien public mondial, et non une opportunité de profit privé.
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