Souffrances animales : vers la fin des lapins élevés en cage ?
La souffrance des lapins d'élevage risque peut-être d'être atténuée. Le Parlement européen a voté le 17 mars 2017 une résolution non législative concernant les "normes minimales relatives à la protection des lapins d'élevage" [1]. Il ne s’agit que d’une première étape au processus législatif. Autrement dit, il n’a pas encore de valeur juridique contraignante.
Le texte imposerait aux éleveurs de respecter les besoins naturels du lapin en énonçant notamment que le lapin "conserve des éléments de son comportement naturel". Cela conduit à prendre en compte de façon minimale la protection de sa santé et de son bien-être. Il convient aussi de préciser qu’en élevage intensif [2], les races de lapins à croissance rapide sont utilisées. Cela amène d’autant plus à s’intéresser au respect de leur bien-être.
En effet, la résolution fait état de "bien-être médiocre", de niveaux de stress élevés, et de taux de mortalité et de maladie des lapins d'élevage importants. C'est la raison pour laquelle les éleveurs et l'ensemble du secteur cunicole doivent avoir "les meilleures normes au monde en matière de sécurité alimentaire, de santé et de bien-être animal et de respect de l'environnement".
La protection des lapins n'est pas l'unique objectif de cette résolution non législative. Avant le vote, le rapporteur Stefan Eck a pris la parole déclaré que "nous devons nous éloigner de cette pratique qui enferme les lapins dans des cages. Nous devons établir des normes minimales pour protéger ces animaux, tout comme nous le faisons pour les poules pondeuses, les porcs et les vaches. Parallèlement, nous devons prendre en compte les impératifs des sélectionneurs et des éleveurs de lapins [3]".
En effet, les autres espèces énoncées bénéficient d’une protection juridique par des textes spéciaux [4], laissant les lapins aux dispositions générales concernant la protection des animaux dans les élevages. Il s’agit d’une directive européenne de 1998 [5] aux termes de laquelle il convient de favoriser notamment la liberté de mouvement des animaux de sorte que "même s'il est attaché, enchaîné ou maintenu, tout animal doit pouvoir disposer d'un espace approprié lui permettant de se déplacer sans souffrance ni dommage inutile". L’effectivité du texte appartient aux Etats membres. C’est donc à eux de s’y appliquer en ce sens et de faire respecter le bien-être des animaux dans les élevages. Pour autant, il n’y a pas non plus de raison pour exclure les lapins d’élevage d’un texte européen spécial à des fins de protection de leur bien-être. En effet, un texte spécial permettrait de rédiger des dispositions spécifiques au bien-être de l’espèce concernée et éviterait toute divergence entre les Etats membres sur la taille des cages, l’enrichissement adapté aux conditions de l’espèce concernée.
Selon la résolution, la plupart des lapins élevés dans l'Union européenne vivent dans des cages non enrichies dans "un environnement stérile équipé uniquement d'une mangeoire et d'un abreuvoir". C'est pourquoi les systèmes de production biologique sont préférés aux cages en batterie dans la mesure où "les lapins sont élevés dans des enclos de groupe, équipés d'un accès à une petite zone de pâture". Il en va de même de "l'élevage en parcs en plein air, ou les systèmes de clapiers, avec de l'herbe pour nourriture principale, qui améliorent le confort et le bien-être des lapins d'élevage". Est encouragée, afin de permettre plus de comportements sociaux et locomoteurs, l'utilisation de systèmes en parcs collectifs.
L’un des enjeux de la résolution est aussi de redorer la place du marché de la viande de lapin de façon à concurrencer le marché chinois. Car au total, sur le territoire européen, 340 millions de lapins sont abattus pour la viande chaque année et parmi eux 99% proviennent de Chine. La résolution précise donc que les producteurs chinois vont finir par prendre la place des agriculteurs européens et ce, au détriment du bien-être animal, si aucun texte juridique n'est pris en ce sens.
Les députés exhortent la Commission à voter un projet de loi allant dans le sens de la résolution afin d'éliminer les cages en batterie et les remplacer par des solutions plus respectueuses du bien-être et de la santé des lapins. D'autant que certains Etats membres ont déjà mis en œuvre une législation nationale allant dans ce sens. Par ailleurs, l’Autriche a interdit l'élevage des lapins en cage pour la production de viande en 2012. La résolution non législative met également l'accent sur le fait qu’améliorer les conditions de vie des lapins permettrait de réduire l'usage d'antibiotique ce qui permettrait de préserver la santé publique.
La meilleure solution en termes de systèmes de logement devrait être mise en place afin d'améliorer le bien-être des lapins sans pour autant oublier de prendre en compte la situation financière des agriculteurs, l'accessibilité du prix de la viande de lapin pour les consommateurs. Par conséquent, les députés aimeraient que la Commission propose des lignes directrices et des recommandations afin de mettre en place des normes minimales pour la protection des lapins d'élevage.
[1]http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=TA&language=FR&reference=P8-TA-2017-0077
[2] Cf. Dossier thématique sur l'élevage industriel du n°2- 2014 de la Revue Semestrielle de Droit Animalier
http://www.unilim.fr/omij/files/2015/04/RSDA-2-2014.pdf
[3]http://www.europarl.europa.eu/news/fr/news-room/20170308IPR65690/lapins-d%E2%80%99%C3%A9levage-plus-d%E2%80%99espace-et-disparition-progressive-des-cages-en-batterie
[4]Directive 1999/74/CE du Conseil, du 19 juillet 1999, établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses ; Directive 2008/119/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des veaux ; Directive 2008/120/CE du Conseil du 18 décembre 2008 établissant les normes minimales relatives à la protection des porcs.
[5]Directive 98/58/CE du Conseil, du 20 juillet 1998, concernant la protection des animaux dans les élevages.
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