Simone Veil est morte
Grande figure de la vie politique en France, survivante de la Shoah, européenne et féministe convaincue, Simone Veil, qui avait porté la loi légalisant l'avortement dans le pays en 1974, est décédée vendredi à 89 ans.
"Ma mère est morte ce matin à son domicile. Elle allait avoir 90 ans le 13 juillet", a annoncé à l'AFP l'avocat Jean Veil, fils de cette centriste historique attachée aux valeurs morales et républicaines.
Une cérémonie d'obsèques officielles, présidée par Emmanuel Macron, se tiendra mercredi à Paris.
Mme Veil s'était notamment illustrée en faisant voter en 1974 la loi portant son nom sur l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Elle était alors ministre de la Santé sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing.
Son difficile combat pour faire adopter cette loi - contre une partie de la droite - a fait d'elle, pour longtemps, la personnalité politique la plus populaire de France.
Née le 13 juillet 1927 à Nice (sud-est), fille d'un architecte, Simone Veil est une rescapée des camps de la mort, où elle avait été déportée à 16 ans. Elle avait rencontré à l'Institut d'études politiques de Paris ("Sciences Po") son futur mari Antoine Veil, décédé en 2013.
Elle a été la présidente du premier Parlement européen élu au suffrage universel, et membre du Conseil constitutionnel de 1998 à 2007.
Son décès a suscité une pluie de réactions unanimes en France, dans la classe politique comme dans la société civile.
"Puisse son exemple inspirer nos compatriotes, qui y trouveront le meilleur de la France", a déclaré le président Emmanuel Macron sur Twitter.
Son prédécesseur socialiste, François Hollande, a salué auprès de l'AFP une femme qui "a incarné la dignité, le courage et la droiture".
L'ex-président Valéry Giscard d'Estaing, 91 ans, qui en avait fait sa ministre, s'est dit "bouleversé". "C’était une femme exceptionnelle qui avait connu les plus grands bonheurs et les plus grands malheurs de la vie", a-t-il estimé.
"Simone Veil reste immortelle", a estimé un autre ancien président, Nicolas Sarkozy, confiant son admiration pour la défunte.
- Courage et humanité -
Tous les partis politiques français, depuis l'extrême droite de Marine Le Pen, dont le père avait pourtant violemment combattu Mme Veil, jusqu'à la gauche radicale de Jean-Luc Mélenchon, ont rendu hommage à celle qui "appartient au meilleur de notre Histoire", selon les mots de ce dernier.
La maire de Paris, la socialiste Anne Hidalgo, a annoncé vouloir donner son nom "à un lieu marquant" de la capitale.
Antonio Tajani, le président du Parlement européen, a quant à lui estimé que le message de Simone Veil sur "le droit des femmes en Europe" et sur l'antisémitisme restait "vivant".
"Elle avait vécu dans sa chair les déchirements tragiques de l'Europe et avait su, par son engagement politique, contribuer à bâtir une paix durable en Europe", a renchéri le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dans une lettre adressée à Emmanuel Macron.
Le grand rabbin de France, Haïm Korsia, a salué une femme "déterminée et toujours digne", qui avait choisi, à la fin de sa vie, de consacrer son énergie à la Fondation pour la mémoire de la Shoah créée en 2000.
Le Planning familial français a quant à lui rendu hommage à sa "bagarre" pour le droit à l'avortement, un combat qui "demeure d'une brûlante actualité".
Après un début de carrière au ministère de la Justice, Mme Veil est la première femme à devenir secrétaire général du Conseil supérieur de la magistrature (1970-74).
Elle est nommée ministre de la Santé en 1974. Tête de liste du parti centriste français UDF lors des premières élections au Parlement européen au suffrage universel en 1979, elle renonce à siéger au gouvernement pour devenir présidente du Parlement européen (1979-1982). Elle y siègera jusqu'en 1993.
De 1993 à 1995, Mme Veil est ministre d'Etat, ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville, dans le gouvernement de droite d'Edouard Balladur, sous la présidence de François Mitterrand.
Avocate du "oui" au référendum de 2005 sur la Constitution européenne, elle a écrit en 2007 une autobiographie à succès "Une vie" dans laquelle cette ennemie de la langue de bois au fort caractère raconte son destin de rescapée des camps, son athéisme, son féminisme.
En 2008, élue à l'Académie française, elle avait fait graver son numéro de déportée sur son épée d'académicienne. En 2012, elle avait été élevée à la dignité de grand-croix, la plus haute distinction de l'Ordre de la Légion d'honneur.
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