Encourager la délation au fisc : le gouvernement prolonge le dispositif des "aviseurs fiscaux"

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FranceSoir
Publié le 04 février 2022 - 18:20
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Une lettre de dénonciation.
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Le 21 avril 2017, le gouvernement socialiste de François Hollande publiait un arrêté autorisant le fisc à indemniser les personnes qui dénonceraient un manquement à certaines règles et obligations déclaratives fiscales. Un dispositif instauré à titre expérimental qui semble avoir satisfait le gouvernement d’Emmanuel Macron, ancien ministre de l’Économie sous François Hollande.

Constatant qu’il présentait un bilan positif pour l’administration fiscale, l’expérimentation des « aviseurs fiscaux », jolie dénomination employée pour ceux qui révèlent au fisc une fraude à l’impôt contre rétribution, sera reconduite pour une durée de deux ans supplémentaires, jusqu’à fin 2023 par la loi de finances pour 2022, rapporte le Figaro.

Une affaire juteuse pour le fisc

On ne dit plus « indic » mais « aviseur fiscal ». Informateurs pour l’administration fiscale, dénonciateurs pour d’autres, quoi qu'il en soit, un rapport d'information remis à l'Assemblée nationale en septembre 2021 sur cette expérimentation souligne un rendement budgétaire « très avantageux pour les finances publiques », de l’ordre de 110 millions d'euros de droits et pénalités.

Initialement créé en 2017 avec pour seul objectif la lutte contre la grande fraude fiscale internationale, le dispositif qui s'est très vite avéré juteux pour Bercy, a été depuis étendu à la TVA et même à tout impôt éludé, dès lors que la fraude dépasse les 100 000 €.

Un système qui s’est avéré lucratif pour les aviseurs fiscaux, qui peuvent toucher une rémunération pouvant aller jusqu’à un million d’euros. Pour la députée socialiste Christine Pirès-Beaune, auteur du rapport parlementaire susmentionné, qui se réjouit de la notoriété grandissante de ce dispositif, ces informateurs rendent service à la collectivité. Elle rappelle que l'indemnisation des « indics » pourrait aller « jusqu'à 15 % des droits recouvrés dans le cas d'affaires de grande importance », conformément à une instruction de Gérald Darmanin, à l'époque ministre de l'Action et des comptes publics.

Une société de contrôle toujours plus envahissante

Si la lutte contre la fraude fiscale est légitime, ces méthodes ne sont pas sans rappeler la volonté du gouvernement Macron d’accroître toujours plus la surveillance des citoyens en invoquant différents prétextes. Dans le cas présent, suite à la mise en place d’un dispositif de la loi anti-fraude de 2019, l’administration fiscale est habilitée à surveiller grâce à des algorithmes les contenus des citoyens postés sur les réseaux sociaux, une nouvelle arme qui lui permet de détecter les éventuels fraudeurs.

Comme le relate France Info, notre banque envoie également tous les relevés bancaires à l’administration fiscale, de même que les organismes sociaux ou les plateformes internet qui lui transmettent nos informations. Cela vient ainsi alimenter un "data-mining" piloté par l’intelligence artificielle qui permet de dresser un portrait de chaque citoyen, géré automatiquement. Autre invention : une police fiscale autorisée à réaliser des mises sous écoute ou des filatures. Le genre de dispositifs qui, comme il est possible de le voir sur les réseaux sociaux, suscite l'indignation :

Le gouvernement avait aussi fait savoir son intention de mettre en place le "name and shame", une pratique qui consiste à publier publiquement dans la presse le nom des personnes sanctionnées.

Un désir de lutte contre la fraude fiscale motivé notamment par le besoin de combler le déficit budgétaire de l’État français. En 2020, celui-ci s’est établi à 212 Md€, résultat de dépenses publiques très élevées qui représentaient la même année 64,3 % du PIB, un niveau plus élevé que celui de l’Union soviétique à sa chute, où le poids de l’État communiste dans la sphère publique était de 62 %, notait fin 2020 Rafik Smati, le président d'« Objectif France ».

Quid de la fraude sociale ?

Pour autant, indépendamment des inquiétudes s’agissant de ces mesures de mise sous surveillance de l’intégralité des citoyens par l’État français, ils sont nombreux à pointer du doigt une incohérence du gouvernement Macron qui se refuse à lutter contre la fraude sociale institutionnalisée.

D’après une Commission d’enquête parlementaire, la fraude sociale pourrait représenter jusqu’à 45 milliards d’euros, même s’il est difficile de la chiffrer comme elle est, par essence, indétectable. Ainsi, entre autres anomalies, la Cour des comptes recense 75,3 millions d’assurés sociaux en France pour 67,1 millions d’habitants.

Pourtant, outre que cette somme est un poids pour le contribuable et qu’elle pourrait être réorientée vers, par exemple, les services de santé, le rapporteur de la Commission d’enquête sur les fraudes aux prestations sociales expose que cet argent volé sert parfois à financer des réseaux criminels.

D’aucuns n’ont pas manqué de faire le parallèle avec la crise sanitaire, comme le président des Patriotes Florian Philippot, soulignant que l’Assurance maladie était capable d’identifier et de désactiver les faux passes sanitaires mais, qu’en 20 ans, elle aurait été étrangement incapable d’identifier et de désactiver les millions de fausses cartes vitales.

Autant d’éléments qui interrogent sur la sincérité et les véritables intentions du pouvoir en place.

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