Voitures électriques : vers un recul de la demande ? "Pas la solution miracle”, estime Akio Toyoda, ex-PDG de Toyota
ECONOMIE - Les voitures électriques “ne sont pas la solution miracle” face aux émissions de carbone et les gens se rendent “enfin” compte de “la réalité”. Akio Toyoda, président du conseil d’administration et ancien PDG du constructeur japonais Toyota, a critiqué cette semaine les réglementations “créées sur la base d’idéaux” et qui font “souffrir les utilisateurs réguliers”. Lors du Japan Mobility Show, anciennement appelé Tokyo Motor Show, il a rappelé ses positions, affirmant que le marché actuel n'est pas suffisamment porteur pour soutenir la croissance de l'électrique. "J'ai continué à dire ce que je considère comme la réalité", a-t-il ajouté. Sa déclaration intervient au moment où l’industrie automobile à travers le monde est confrontée à un recul de l’intérêt des acheteurs.
Le Japan Mobility Show a ouvert la semaine dernière dans la capitale japonaise pour la première fois depuis quatre ans. Akio Toyoda a bien profité de cette occasion pour rappeler ses déclarations en décembre 2022. Alors qu’il occupait toujours le poste de PDG du géant automobile, il intervenait en Thaïlande, lors de la présentation de la version électrique du fameux pick-up Hilux. “Pour moi, la technologie électrique n’est pas la seule façon d’arriver jusqu’à la neutralité carbone (...). Les gens travaillant dans l’industrie automobile font partie d’une majorité silencieuse qui se questionne sur la pertinence de considérer les voitures électriques comme l’unique option”, a-t-il révélé.
Les utilisateurs réticents, les constructeurs inquiets
Si le nombre de voitures électriques (VE) vendues en 2022 a atteint 10 millions d’unités et que ce chiffre devrait augmenter à plus de 14 millions à la fin 2023, des indicateurs laissent croire aux acteurs de l’industrie automobile que cette tendance pourrait ralentir. En Europe, Volkswagen a annoncé une baisse de 50 % de ses commandes. Pourtant, les livraisons de voitures électriques ont augmenté de 45 % les neuf premiers mois de l’année en cours. Ford voit ses prévisions de vente à la baisse tandis que Renault n’a vendu que 228 000 VE en 2022, soit moins que la moitié de ses prévisions de 500 000 unités.
De l’autre côté de l’Atlantique, des constructeurs comme Tesla ou encore Ford ont également évoqué un ralentissement de la demande des consommateurs. General Motors (GM) et Honda réagissent déjà, en abandonnant un partenariat scellé il y a plus d’un an, qui prévoyait de développer une gamme de véhicules électriques moins chers. GM a aussi retardé l’ouverture d’une usine de camionnettes électriques et Ford envisage de réduire le nombre de journées de travail dans son usine de construction de son pick-up électrique, le F-150 Lightning.
De nombreux facteurs expliquent la réticence des acheteurs. Déjà, les VE sont plus chers que les voitures conventionnelles. Et les taux d’intérêts élevés dans certains pays rendent ces véhicules encore plus inabordables. L’autonomie devient également un casse-tête pour les consommateurs. Ces indicateurs inquiètent les fabricants, qui investissent des milliards de dollars dans de nouvelles usines et installations de fabrication de batteries. Ils sont ainsi confrontés, à court terme, à des coûts très élevés et à une pénurie de ressources.
Pour Akio Toyoda, qui a quitté cette année la direction générale de Toyota pour ne rester “que” président de son conseil d’administration et président de l'Association japonaise des constructeurs automobiles, il n’y a pas qu’une “seule solution” pour réduire les émissions de carbone. "Il existe de nombreuses façons de gravir la montagne pour atteindre la neutralité", a-t-il déclaré la semaine dernière lors du Japan Mobility Show.
Des utilisateurs “souffrent” de “réglementations idéalistes”
Il explique le recul d’intérêt des consommateurs par un fait simple : ils “voient enfin la réalité”. "J'ai continué à dire ce que je considère comme la réalité. Quelqu’un doit expliquer à l’industrie ce qui rendra les acheteurs de voitures les plus heureux”, poursuit Toyoda. “Si les réglementations sont créées sur la base d’idéaux, ce sont les utilisateurs réguliers qui en souffrent”.
L’une des solutions privilégiées par Toyota, rappelle-t-il, est l’hybride, car “l’industrie automobile doit se couvrir en maintenant ses investissements dans les voitures à essence”. Son constat est confirmé dans plusieurs pays. Le Wall Street Journal précise qu’aux États-Unis, les hybrides gagnent des parts de marché au détriment des véhicules électriques. D’ailleurs, les stocks de la filiale de Toyota aux USA le prouvent. Le constructeur détient encore un approvisionnement d’un peu plus d’une semaine de Prius hybrides mais un stock de... deux mois de son SUV électrique, le bZ4X.
Le Wall Street Journal ajoute que les constructeurs Ford et Nissan Motor ont décidé de privilégier leurs gammes hybrides et hybrides rechargeables plutôt que leurs véhicules électriques.
Au-delà de leurs prix élevés et de leurs contraintes, ceux-ci ne sont pas non plus parfaits, puisqu’ils émettent eux aussi des particules fines en roulant, selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Certes, cette émission de microparticules reste inférieure à celle des véhicules thermiques. Mais il ne s’agit pas des parties les plus polluantes des VE : les batteries et leur fabrication ainsi que l’acier utilisé dans la construction sont souvent pointés du doigt.
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