Le média d’investigations Disclose démontre, grâce à des vidéos et de la modélisation 3D, que Zineb Redouane est morte à la suite d’un tir tendu de gaz lacrymogène.
C’était il y a tout juste deux ans, le 1er décembre 2018 à Marseille lors de l’acte III des Gilets jaunes.
Lorsque le cortège de manifestants passe dans la rue des Feuillants, Zineb Redouane, 80 ans, s’apprête à fermer ses volets pour éviter que les gaz lacrymogènes ne pénètrent dans son appartements. C’est à ce moment-là qu’elle est touchée au visage par une capsule de gaz.
Transportée à l’hôpital, Zineb Redouane meurt le lendemain sur la table d’opération, officiellement d’un arrêt cardiaque dû à un choc opératoire.
Bataille pour la vérité
Depuis deux ans, la famille et les proches de l’octogénaire se battent pour savoir la vérité, portant notamment plainte pour « violences ayant entraîné la mort ».
L’une de ses filles assure que la victime lui a dit :
« Le policier m’a visée, je l’ai vue »
Autopsie algérienne contredisant l’autopsie française, « nettoyage » de l’appartement par des forces de l’ordre, CRS frappés d’amnésie sur les circonstances du tir, armes non fournies à l’IGPN… L’enquête patine, la polémique s’installe.
En mars 2019, alors ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner prend clairement position :
« Je ne voudrais pas qu’on laisse penser que les forces de l’ordre ont tué Zineb Redouane. Parce que c’est faux »
Un tir tendu, formellement interdit
En ce 1er décembre 2020, une contre-expertise de médias indépendants, Disclose et le groupe recherche londonien Forensic Architecture, démonte la version officielle qui s’appuie sur le rapport balistique, lequel a conclu à une « mort accidentelle », l’arme – un lanceur Cougar – ayant été « utilisée selon les modélisations et les procédures d’emploi en vigueur dans la Police nationale ».
En clair, ce rapport balistique estime que la grenade à l’origine du décès de Zineb Redouane a fait l’objet d’un tir réglementaire en cloche. La contre-expertise démontre qu’il s’agissait d’un tir tendu, formellement interdit.
Voici l’enquête complète :
Ce mardi, la famille de « Mama Zina » annonce déposer une plainte contre Christophe Castaner, désormais patron des Marcheurs à l’Assemblée nationale, pour « altération et soustraction de preuves ». Selon cette plainte, l’ex-ministre de l’Intérieur aurait notamment « directement donné l’ordre de ne pas saisir le lance-grenades ».
Sur le plan judiciaire, l’enquête est toujours en cours. L’affaire a d’ailleurs été dépaysée à Lyon, le procureur-adjoint de Marseille ayant été présent, le 1er décembre 2018, aux côtés des forces de l’ordre.